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Haïti-Université : Pétition pour l’autonomie de l’université de Limonade

Le rectorat insiste sur la négociation et la consultation

Le lundi 10 mars 2014 est la date convenue pour la réouverture officielle de l’Université Henry Christophe de Limonade, au terme d’une rencontre, le mercredi 26 février 2014, entre divers représentants de la société dans le Nord d’Haïti et des dirigeants de l’université.

Par Edner Fils Décime

P-au-P, 26 févr. 2014 [AlterPresse] --- Une pétition, rédigée au Cap-Haïtien, le 20 février 2014, et mise en ligne le lendemain, exigeant que l’Université Henry Christophe se transforme en « Université Autonome Henry Christophe de Limonade », a déjà recueilli 256 signatures à 14:15 (19:15 gmt), le 24 février 2014, selon les informations obtenues par AlterPresse.

Quoiqu’elle souligne, dans sa teneur, que les signataires soumettent leurs « revendications aux plus hauts dignitaires étatiques et académiques de la République d’Haïti », cette pétition s’adresse en réalité au président Joseph Michel Martelly.

La professeure Virginie Destuynder, qui appuie cette démarche, explique que les initiateurs n’ont pas eu le choix, puisqu’il n’existe pas un ministère de l’enseignement supérieur en Haïti.

Cette « autonomie » exigée ne signifie nullement indépendance. Elle s’apparente plutôt à une « gestion décentralisée », précise Destuynder.

En gros, les pétitionnaires reprochent l’absence d’une reconnaissance légale du campus de Limonade, la non-formalisation du système académique, de l’organigramme du Campus et de son mode de gouvernance, la non-réalisation de plusieurs investissements (dortoir, cafétéria, matériels de laboratoires), malgré la mise à disposition du budget par le gouvernement.

« Depuis janvier 2014, le rectorat de l’Université d’État d’Haïti (Ueh) conteste les filières enseignées au sein du campus, filières qu’il a pourtant lui-même proposées, dès 2012, dans plusieurs documents officiels ; depuis le 27 janvier 2014, l’Ueh a fermé les portes du campus manu militari, sous prétexte d’évaluation de sa situation administrative et académique » : telles sont d’autres récriminations mentionnées dans la pétition.

Le conseil exécutif de l’Université d’État d’Haïti n’entend pas se prononcer sur la pétition électronique, affirme le recteur Jean Vernet Henry, interrogé par AlterPresse.

Henry dit se préoccuper plutôt de la préparation de la rencontre du mercredi 26 février 2014 avec la société civile dans le Nord.

« Je me garde de tout commentaire sur cette pétition. Nous sommes dans une phase de négociation et de consultation. Le plus important, pour le moment, est la rencontre avec la société civile du département du Nord mercredi [26 février 2014] », insiste le recteur Henry dans des déclarations à AlterPresse.

Quelques jours, avant l’inauguration du campus le 12 janvier 2012, un groupe de personnalités, dont l’ancien gouverneur de la banque centrale, Fritz Jean, ont mis en circulation une pétition pour réclamer un fonctionnement administratif autonome pour cette entité.

Le rectorat de l’Ueh avait vertement critiqué, à l’époque, cette démarche.

Selon la professeure Destuynder, la relation entre le rectorat de l’Ueh et le campus de Limonade est très floue.

De surcroît, le campus de Limonade n’est pas représenté au niveau du conseil de l’Université, la plus haute instance décisionnelle de l’Université d’État d’Haïti.

« Pourquoi ne pas offrir sa chance au Campus de Limonade, le plus grand complexe universitaire du pays ? Pourquoi gâcher cette opportunité de former la relève de demain, en lui imposant un mode de gestion administrative et académique centralisé à Port-au-Prince, inefficace et désuet ? » se questionnent les pétitionnaires.

Déjà, dans une note de presse en date du 6 février 2014, presqu’une vingtaine de professeures et professeurs au campus de Limonade ont condamné la « décision unilatérale », selon eux, du rectorat, de fermer les portes de l’université pour analyser sa situation administrative et académique.

Que disent les dispositions transitoires de l’Ueh ?

Les dispositions transitoires du 21 février 1997 relatives à l’organisation de l’administration centrale de l’Université d’État d’Haïti – en attendant la création de la loi organique de l’Ueh - consacrent l’autonomie et l’indépendance de l’Ueh.

Selon le vœu de l’article 2, indépendance et autonomie pour l’Ueh impliquent « liberté d’expression, liberté académique, liberté de gestion, liberté financière et inviolabilité de l’espace universitaire ».

« Toute entité, extérieure à l’Ueh, ne peut intervenir dans les affaires de cette institution que dans le cadre de conventions dûment approuvées par ses organes compétents », établit clairement l’article 5 de ce document.

La dernière fois qu’un président de la république a tenté de mettre son nez dans la gestion de l’Ueh, cela lui a valu des manifestations énormes et la révolte au sein de l’Université d’État.

C’était le cas sous la présidence de Jean-Bertrand Aristide face au mouvement du 27 juillet 2002.

Pour l’instant, le Campus de Limonade, don controversé de la République Dominicaine, est rattaché à l’Ueh.

Seulement, les partisans d’une séparation affirment qu’il n’existe encore aucune loi sur ce rattachement. [efd kft rc apr 26/02/2014 15:45]