P-au-P., 21 févr. 2014 [AlterPresse] --- Munis de branches d’arbres, dont des feuilles de cocotiers, entonnant des chants de rara, plusieurs habitantes et habitants de l’Ile-à-vache ont manifesté, ce vendredi 21 février 2014, dans la localité de Kay Kòk, pour exiger la libération d’un des leurs, accusé de fomenter le mouvement de revendications contre le projet touristique gouvernemental, rapportent des témoins à AlterPresse.
Cette nouvelle forme de mobilisation a été enregistrée, alors que le premier ministre Laurent Salvador Lamothe procédait à l’inauguration de trois espaces communautaires (un centre, un restaurant et une station de radio) dans la localité dénommée Madame Bernard.
« Le restaurant ainsi que le centre communautaire se trouve à Kay Kòk, à l’extrême pointe ouest de l’Ile. La population, qui vit principalement à l’est de l’île, prendrait environ une journée pour se rendre dans ces espaces communautaires. Ce qui voudrait dire que ces projets ne nous concernent pas », critique Marc Donald Lainé, président de l’organisation Konbit peyizan Ilavach (Kopi).
Quant à la station de radio communautaire, qui porte le nom de « Voile Fm », elle est installée dans la zone de Trouvivier, à proximité de l’endroit dénommé Raquette. Émettant depuis quelques jours sur la fréquence 100.5 FM, elle ne diffuse que de la musique.
Lamothe s’est déplacé sur l’île, à la tête d’une imposante délégation, notamment la ministre du tourisme Stéphanie Balmir Villedrouin, dans un contexte de contestation, par la population, du projet gouvernemental baptisé « destination touristique de l’Ile à Vache ».
Insatisfaits à date, les habitantes et habitants continuent d’exprimer leur désapprobation du plan de développement touristique envisagé.
« Dans ce gouvernement, lorsqu’un ministre raccorde, l’autre défait ou désassemble… La ministre Balmir Villedrouin a parlé de relocalisation des habitants, alors que Lamothe évoque le contraire » …, relève Lainé.
Depuis 2 semaines, craignant pour leur sécurité, divers membres de l’organisation Kopi se sont mis à couvert, d’autant que des coups de feu sont parfois entendus le soir.
Le jeudi 20 février 2014, beaucoup d’élèves ont pris peur et couru dans toutes les directions, face à la présence de tant d’hommes armés sur l’île, dont plus d’une quarantaine d’agents de la Brigade d’intervention motorisée (Bim).
Le retrait de l’arrêté du 10 mai 2013, point focal pour relancer le dialogue
Les membres de Kopi affirment rester attachés à leur revendication, le retrait de l’arrêté du 10 mai 2013 déclarant « zone réservée et zone de développement touristique » le territoire de la commune de l’Ile-à-Vache.
« C’est un arrêté scélérat. Ce projet dénote un plan macabre, un piège à rats, un suicide collectif, ayant pour objectif de chasser tous les habitants sur l’île. C’est un génocide culturel, qui met tout le monde dans la tourmente sur l’ile, en dépossédant les habitants de leurs terres. Personne n’a plus le droit de construire sur l’ile », se plaint Marc Donald Lainé, interrogé par AlterPresse.
L’Ile-à-Vache, un trésor caché ou une aubaine pour les étrangers ?
« Si l’Ile à Vache est un trésor caché, la population doit en jouir et être intégrée dans les aménagements envisagés. Nous sommes les artisans, qui ont travaillé pour l’embellissement de ce coin paradisiaque, convoité par le gouvernement de Lamothe », estime Lainé.
Il y aurait beaucoup d’opérateurs financiers étrangers convoitant plusieurs portions de terre pour des projets touristiques d’envergure, lesquels auraient des incidences négatives sur l’agriculture de l’île, suivant les informations disponibles.
Konbit oganizasyon peyizan Ilavach relève combien ont été écartés les maçons, contremaîtres et autres techniciens de l’île dans les travaux constructions (y compris dans l’installation de lampadaires), au profit de ceux d’autres communes du pays.
Alors que trois espaces communautaires ont été inaugurés le 21 février, les besoins réels de la population, à savoir un lycée (beaucoup d’élèves continuent de suivre des cours sur des pierres, faute de bancs) ainsi qu’une école professionnelle, ne sont pas pris en compte.
« La seule forêt, que possédait l’Ile, a été rasée pour l’aménagement d’un aéroport », dénonce l’organisation Kopi, qui formule des doutes quant à l’impact véritable du projet touristique sur les conditions de vie des habitantes et habitants de l’Ile-à-Vache. [jep rc apr 21/02/2014 16 :39]