P-au-P., 04 févr. 2014 [AlterPresse] --- La sentence 168-13, rendant apatrides plus de 200,000 Dominicaines et Dominicains d’origine haïtienne, a été, une fois de plus, au cœur des discussions entre Haïti et la République Dominicaine, à la deuxième rencontre du dialogue binational de haut niveau qui s’est tenue à Jimani le lundi 3 février 2014, selon les informations obtenues par l’agence en ligne AlterPresse.
La réunion a porté officiellement sur les questions touchant la migration, les douanes, la sécurité et l’environnement, selon une déclaration conjointe paraphée tard dans la soirée, après plus de 12 heures d’échanges, et qui fait état de la signature de plusieurs accords de coopération.
Même si elle ne figurait pas à l’agenda des discussions, la décision de la cour constitutionnelle dominicaine a occupé une bonne partie des débats, selon des sources proches des négociations.
Il en est de même du comportement, jugé généralement peu respectueux, des Dominicains vis-à-vis des Haïtiens.
Selon un communiqué officiel, le premier ministre Laurent Lamothe a rappelé que ces rencontres ont été notamment provoquées par l’arrêt 168-13.
Le premier ministre souhaite que des solutions soient trouvées à « ce drame humain créé par cette décision controversée ».
De son côté, la République Dominicaine réitère son engagement à introduire au Parlement dominicain, le jeudi 27 février 2014, une loi spéciale traitant de la situation des personnes nées sur le territoire dominicain et qui, actuellement, ne détiennent aucun type de document.
Mais, à l’évidence, cette loi ne concerne pas les Dominicaines et Dominicains en possession de tous leurs documents et qui sont déchus de leur nationalité, soulignent des militants de droits humains contactés par AlterPresse.
Lamothe a plaidé pour plus de respect dans le cadre de ce dialogue, quelques jours après des échanges orageux entre le président dominicain Danilo Medina et son homologue haïtien Michel Martelly à Cuba, lors de la réunion de la Communauté des États latino-américains et caribéens (Celac / 29-30 janvier 2014).
Devant la Celac, Medina a fait un amalgame entre la dénationalisation de ses compatriotes et la régularisation des migrantes et migrants.
Il a également voulu montrer comment son pays prendrait en charge Haïti, notamment au niveau de l’éducation, de la santé et des emplois dans le secteur agricole et de la construction.
Furieux, Martelly aurait eu, par la suite, des échanges orageux, durant 5 heures de temps, avec Medina, rapportent des sources concordantes.
Apparemment, le président dominicain n’aurait pas respecté les termes d’un pacte secret que les deux chefs d’État auraient conclu.
« Le respect mutuel constitue un élément fondamental de la réussite de ces pourparlers », a souligné le chef du gouvernement haïtien à la rencontre de Jimani.
Les accords paraphés concernent les questions douanières, agricoles, environnementales, ainsi que la lutte contre le trafic illicite de la drogue.
A propos de la migration, les points abordés sont relatifs au « plan national de régularisation des étrangers » en République Dominicaine, la promulgation d’un nouveau type de visa pour les travailleurs migrants haïtiens et la gratuité des visas pour les étudiantes et étudiants haïtiens en territoire voisin.
Pour sa part, la délégation haïtienne a réaffirmé son engagement à faciliter l’émission de passeports et d’actes d’état civil en faveur de ses ressortissantes et ressortissants, au niveau des postes frontaliers et dans les consulats haïtiens.
Par ailleurs, les deux délégations se sont également entendues pour impliquer, dans le dialogue binational, les représentants de leur société civile respective.
Ce qui a été salué par la plateforme Groupe d’appui aux rapatriés et réfugiés (Garr).
« Une première bataille remportée », s’est réjoui Jean-Baptiste Azolin, coordonnateur de Garr.
La délégation haïtienne comprenait, entre autres, le ministre des affaires étrangères, Pierre- Richard Casimir, celui du commerce, Wilson Laleau et celui de l’intérieur, David Bazile.
Du coté dominicain, la délégation, dirigée par le ministre de la présidence, José Manuel Trullols, comprenait le vice-ministre des affaires étrangères, José Ramón Fadul, ainsi que ceux de l’intérieur, du commerce, de l’agriculture et de l’environnement.
Des représentants du Venezuela, de l’Union européenne et de la Communauté des États des Caraïbes (Caricom) ont également assisté aux discussions.
La prochaine réunion du dialogue binational de haut niveau est prévue pour le mercredi 12 mars 2014 en Haïti. [gp apr 04/02/2014 07:00]