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Haïti-Bilan 2013/Droits humains : Année de stagnation, sinon de régression

P-au-P, 26 déc. 2013 [AlterPresse] --- En se basant sur leurs observations, des personnalités d’horizons divers déplorent le fait qu’aucune avancée n’est faite, au cours de l’année 2013, en ce qui a trait au respect des droits de la personne.

Vue d’ensemble

« Haïti a régressé dans les domaines de l’État de droit et de la lutte contre l’impunité », d’après le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh).

Au niveau des droits civils et politiques, « il n’y a pas eu d’avancée. 81% de la population carcérale est en détention préventive prolongée », indique Pierre Espérance, directeur du Rnddh.

« L’année a donné des prisonniers politiques », comme le cas des (2) frères Josué et Enold Florestal, rappelle-t-il.

Le premier a été arrêté le vendredi 26 juillet 2013, parce que son frère, Enold Florestal - qui a porté plainte contre la famille présidentielle pour corruption était jusque-là introuvable.

En termes de recul, « si on n’est pas un proche du gouvernement ou si vous n’appuyez pas sa position, vous êtes révoqué de l’administration publique », relève le Rnddh.

« La politique pénale, c’est la répression (…) ». En clair, « la tendance de la pensée unique est très forte dans cette équipe gouvernementale ».

De plus, « la misère s’est aggravée. Il n’y a pas plus d’emplois créés dans le pays ».

Il y a aussi le fait que les élections sénatoriales partielles, locales et communales, qui devraient être organisées depuis déjà 2 ans (depuis 2011) n’ont pas eu lieu.

La seule note "positive" pour cette année 2013, c’est « la propagande pour l’éducation, même quand ils la font mal ».

Éducation

Pendant que l’éducation reste l’une des priorités gouvernementales dans les discours officiels, les conditions d’enseignement restent les mêmes dans le fond, d’après la Confédération nationale des éducatrices et éducateurs haïtiens (Cneh).

Le salaire et le statut des enseignantes et des enseignants n’ont pas changé.

« Ils sont traités comme le petit personnel », déplore la confédération.

La vaste campagne médiatique du gouvernement, axée sur l’éducation gratuite pour toutes et tous, a porté les parents les plus vulnérables à envoyer leurs enfants dans les écoles publiques.

Ainsi, celles-ci « ont-elles été très sollicitées pour cette année (2013) ».

Cela aboutit à une augmentation de l’effectif d’élèves dans les salles de ces institutions publiques, constate la Cneh.

« Ce n’est pas normal, cette augmentation qui ne rime pas avec la qualité », affirme la Cneh.

« Pédagogiquement, c’est une année piètre et médiocre. Et c’est décevant pour nous, en tant qu’enseignant en tant que citoyen (…) ».

Pendant que certains lycées sont en cours de reconstruction dans la capitale haïtienne, beaucoup (à l’intérieur du pays) ainsi que plusieurs écoles nationales n’ont pas été pourvues en matériels d’appoint (papier hygiénique, entre autres) pour un fonctionnement adéquat.

Logement

Près de 4 ans après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, la manière - dont les autorités haïtiennes gèrent la question du logement dans le pays - est un « scandale », d’après l’organisation Fos refleksyon ak aksyon sou koze kay (Frakka).

« L’État viole le droit des gens, dont la situation se dégrade », poursuit Frakka.

Seules quelques centaines de maisons sont construites, mais « les plus vulnérables n’ont pas accès à ces logements » à cause des conditions de paiement.

Des gens économiquement bien placés viennent réclamer les terres déclarées d’utilité publique à Morne à Cabris (nord-est de la capitale), où existent encore de nombreux camps de personnes déplacées après le tremblement de terre.

Refaire la peinture et quelques réparations de certaines maisons très mal construites - formant un vaste bidonville situé à Pétionville (est de la capitale), baptisé « Jalouzi », est l’une des grandes réalisations du gouvernement pour l’année 2013.

Pour laisser les camps, les personnes déplacéesn reçoivent 20 mille gourdes (US $ 1.00 = 45.00 gourdes ; 1 euro = 63.00 gourdes aujourd’hui) pour payer un an de loyer, et après, ils « retournent dans d’autres camps ou dans des bidonvilles, avec les mêmes conditions de vie », observe la Frakka.

Plus de 200 mille personnes sont toujours dans des abris de fortune, livrées à elles-mêmes dans des camps, exposées aux expulsions forcés, au viol et aux mauvaises conditions de vie.

Alimentation

Le respect des droits à l’alimentation des citoyennes et des citoyens s’est arrêté à des programmes de distribution de plats chauds. Or, la sécurité alimentaire est loin d’être atteinte.

140 des 142 communes du pays étaient en situation de crise alimentaire au mois de mai 2013.

Communication

La liberté d’expression reste menacée, signale la Société d’animation et de communication sociale (Saks), qui parle d’une « tentative de nous faire reculer ».

Les citoyennes et les citoyens, qui manifestent dans les rues pour dénoncer les mauvaises conditions de vie ou autres problèmes, sont forcés de mettre fin à ces mouvements par la police nationale, qui fait un usage extrême de gaz lacrymogènes.

En 2013 également, la station privée Radio Kiskeya est sommée de fournir des preuves sur une information diffusée, alors que certaines radios communautaires sont obligées de suspendre leurs émissions. [apr 26/12/2013 1:32]