Español English French Kwéyol

Emeline Michel : Une voix d’Haïti à Montréal

« Quintessence » en spectacle unique

Interview

Par Gotson Pierre

P-au-P., 29 nov. 2013 [AlterPresse] --- La chanteuse haïtienne Emeline Michel s’apprête à offrir le meilleur d’elle-même à son public de Montréal, Canada, où elle n’avait pas véritablement chanté sur scène depuis trois ans.

Ce 30 novembre, il s’agira de « faire partager au public plusieurs années de travail, plusieurs années d’amour », précise-elle dans une interview accordée à AlterPresse.

« Carrément, ne rien donner à moitié… donner le maximum de soi-même. Nous avons choisi une salle veloutée (Théâtre le Gesù) pour que les gens puissent se procurer le maximum de plaisir », confie l’artiste, surnommée la reine de la chanson créole.

Ce spectacle sera centré sur son 10e opus « Quintessence », sorti en mars 2013 et qui lui a couté 5 ans de travail.

Les échos du 12 janvier 2010

Le projet d’un album autour du thème de l’amour a été totalement modifié à cause du terrible tremblement de terre de janvier 2010, « une grosse cicatrice dans la vie de mon pays », souligne la chanteuse. « Quand on est un artiste, on est le miroir de la société où l’on vit », explique-t-elle.

Elle a donc retenu le titre générique « Quintessence », pour parler (en partie) de son peuple, de sa douleur, des souffrances de son pays et d’un « futur porteur d’espoir ».

Et à propos de ce moment tragique, où on a vu partir en un instant environ 300.000 êtres aimés et où la terre d’Haïti a été brusquement défigurée, l’émotion de l’artiste paraît, près de 4 ans plus tard, intacte. « Cette fragilité nous fait prendre conscience que rien ne nous appartient. On doit délecter chaque moment… apprendre à aimer les gens qui vivent autour de nous, le leur dire et vivre la vie avec toute l’intensité possible ».

Quintessence

L’album qu’explorera Emeline Michel en spectacle unique le 30 novembre à Montréal regroupe 12 titres, dont « Infini », un boléro sur le thème de la paix retrouvée, « Mèsi Lavi », un hymne à la vie, « Djannie », une condamnation de la violence faite aux femmes, « M pa ka domi », une expression de chagrin profond mais aussi une merveilleuse rencontre avec le blues.

« Quintessence » a la particularité de réunir autour de la chanteuse une pléiade d’écrivains et de paroliers, notamment Edwidge Danticat pour « Dawn »,
Yanick Lahens pour « Benji », Frantz Benjamin pour « Kèm pa sote », Ina Césaire de la Martinique pour « Terre mouillée », Koralen (Jean-Claude Martineau) pour « Freedom » et Ralph Boncy pour « Timoun ».

« C’est vraiment une rencontre avec la littérature de mon pays (…). J’ai toujours rêvé cette rencontre de la musique avec des textes (…). Pour moi, c’est une des plus belles expériences de se retrouver dans un univers littéraire et musical ».

A propos de Ralph Boncy (son ancien mari) : « c’était très symbolique pour moi. Le plus souvent dans notre pays, suite à une histoire d’amour et une séparation, c’est la guerre, la discorde… c’était vital pour moi. Je ne pouvais pas inviter tous ces écrivains, poètes et ne pas inviter Ralph (…) Il y a des collaborations qui bâtissent votre vie ».

Parmi les musiciens qui accompagnent Emeline Michel, il y en a une qui est « vraiment spéciale », la pianiste japonaise Yayoi Ikawa. Elle l’a rencontré peu après le tsunami qui a meurtri le Japon en mars 2011, un an après les secousses qui ont profondément fracturé Haïti.

« Nous partageons des vibrations à haute fréquence », confie Emeline Michel, qui se rejoint dans le perfectionnisme de cette pianiste. En plus, elle relève des similitudes culturelles entre cet archipel hyper développé à l’autre bout du monde et cette moitié d’île rongée par la précarité.

Un long chemin jusqu’à Montréal

Le retour d’Emeline Michel à Montréal s’effectue après un passage à Paris, à la Maison des Cultures du Monde et sa participation en octobre à la 28e édition du Festival Créole des Seychelles où elle a été reçue par le président, James Alix Michel.

Une tournée « Quintessence », en préparation, l’emmènera à coup sur en Haïti, où elle avait lancé l’album en mars 2013, pour permettre à son public haïtien de chanter avec elle les chansons de ce disque.

Emeline Michel demeure par ailleurs en connexion avec Haïti. Elle mentionne plusieurs projets d’accompagnement de jeunes musiciens et chanteurs en collaboration avec d’autres artistes et promoteurs comme James Germain et Garry Lubin.

« Quand on a fait beaucoup de scènes et de tournées, il y a des choses qu’on peut partager avec ceux qui font le même chemin, pour les aider, les encadrer, les entourer ». [gp apr 29/11/2013 06 :00]

Écouter l’intégralité de l’interview

Interview Emeline Michel-Gotson Pierre, novembre 2013 by Alterpresse on Mixcloud