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La question des réfugiés, vue d’Haïti et de la République Dominicaine

P-au-P., 20 juin. 02 [AlterPresse] --- La troisième journée mondiale des réfugiés, ce 20 juin 2002, a suscité des réflexions et prises de position en Haïti et en République Dominicaine sur la situation des migrants des deux cotés de la frontière séparant les deux pays qui se partagent l’ile.

Un mouvement incessant d’émigration se fait d’Haïti vers la République Dominicaine, tandisque les Dominicains, autant que les Haitiens, sont de temps à autre surpris en mer dans de frêles embarcations faisant route clandestinement vers les Etats-Unis ou l’ile de Porto-Rico, sous domination américaine.

Le Groupe d’Appui aux Réfugiés et Rapatriés (GARR) a exprimé sa "profonde préoccupation face au flux croissant de femmes et d’hommes haïtiens, de tous âges et de toutes catégories sociales, obligés de se réfugier ailleurs à la recherche d’un mieux-être ou de sécurité". L’organisation rappelle qu’en République Dominicaine, aux Etats-Unis d’Amérique, dans les Antilles, particulièrement aux Bahamas, partout, les réfugiés haitiens "sont exposés à des situations d’exploitation, à des arrestations et incarcérations douloureuses suivies dans bien des cas de déportations".

Au cours du premier trimestre de cette année, près de 5000 Haitiens ont été rapatriés de la République voisine. Les réfugiés haïtiens disparus en mer chaque année se comptent par centaines, rappelle le GARR.

Le GARR invite tous les compatriotes à unir leurs efforts "pour que le pays cesse d’être une terre d’expulsion pour ses propres enfants, mais plutôt un endroit où tous les citoyens et citoyennes ont envie de rester pour construire l’avenir".

Au nombre des facteurs qui poussent les Haitiens à fuir le pays, le GARR cite la persistante détérioration des conditions de vie, l’insécurité permanente qui transforme des quartiers comme Cité Soleil en des camps de la mort. Le GARR évoque également des choix de politique économique lourds de conséquences pour le paysannat haïtien, tel le projet gouvernemental d’installation d’une zone franche dans la plaine agricole de Maribahoux.

Par ailleurs, le GARR a profité de la journée mondiale des réfugiés pour lancer son site Internet http://www.garrhaiti.org , consacré à la migration et a la problématique frontalière.

Pour sa part, le Service Jésuite aux Réfugiés (SJR) / branche République Dominicaine organise, du 19 au 21 juin, à Santo-Domingo, un mini-festival de cinéma sous le thème "Mundo Refugiado". Parmi les films programmés, on note "Vies Oubliées", un documentaire sur la situation des réfugiés en République Dominicaine. Les projections sont suivies de débats autour de la situation relatée.

Dans un résumé de la situation des réfugiés en Amérique Latine et la Caraibe, le SJR prend souvent en exemple le cas de la République Dominicaine pour les mauvais traitements accordés aux migrants. Le pays applique, selon l’organisation, "une politique de sécurité frontalière", ce qui résulte en une militarisation de la frontière haitiano-dominicaine pour éviter le passage de réfugiés.

D’autre part, en République Dominicaine, "le racisme anti-haïtien est très marqué" et sur cette base, des réfugiés sont agressés et ne bénéficient d’aucune assistance médicale ou d’accès aux médicaments, dénonce le SJR. L’institution religieuse met également l’accent sur les "rapatriements massifs des Haitiens sans aucun respect des droits fondamentaux les plus élémentaires".

Au niveau de la région latino-américaine et caribéenne, les autres cas mentionnés dans le relevé du SJR sont l’Equateur, le Venezuela et le Panama. [gp apr 20/06/02 22:00]