Par Milo Milfort
P-au-P, 15 nov. 2013 [AlterPresse] --- Partir vers l’épuisement de la Grand rue de Port-au-Prince [Boulevard Jean Jacques Dessalines] et de ses quelques quartiers adjacents, dans ses dynamiques sociales, esthétiques, historiques et politiques, à travers un projet photographique, tel est l’objectif d’une formation tenue du 4 au 11 novembre 2013 à Port-au-Prince sous l’égide de la Fondation Connaissance et Liberté (Fokal).
La formation a réuni dix photographes, un rédacteur, une rédactrice et une dessinatrice. Elle a été assurée par le photographe belge Gaël Turine la graphiste espagnole Chiquinquirá García.
A la Grand rue, centre commercial et poumon économique d’Haïti, tout y est. Les enfants des rues, les métiers de tous genres, la prostitution haitiano-dominicaine, le transport avec ses bouchons monstres, les marchés ici et là, l’eau et l’assainissement laissant à désirer, le paysage nostalgique rappelant le tragique séisme de janvier 2010, les activités religieuses, etc.
Un tout que des stagiaires se sont proposés de passer au peigne fin à travers plus d’une centaine de photos et près d’une dizaine de textes, constituant la tête de l’iceberg au cours de cet atelier occasionnant la prise d’au moins un millier de photos par les participants arpentant la Grand-rue et certains quartiers contigus.
Des photos ont été copieusement critiquées, méticuleusement et difficilement sélectionnées après avoir été rapportées par des photographes. Chaque jour, le travail des uns et des autres a été analysé en groupe, en vue de permettre un apprentissage par la pratique.
Importance et défis du photoreportage
L’importance d’être toujours près de son sujet voire de le sentir, savoir dominer et travailler la lumière, la position du photographe par rapport à la lumière, la question d’habillage photographique et de perspectives, la composition photographique tout comme celle du récit, la triangularité et le caractère géométrique des composantes d’une photo sont entre autres, le contenu véhiculé dans le cadre de cet atelier de sept jours.
Selon plusieurs participants et participantes, la formation leur a permis d’être imprégnés de toute la complexité de l’exercice du métier de photo journalisme en Haïti, un pays dans lequel les clichés du genre « Vous venez me prendre en photo pour aller faire de l’argent » ont la vie dure.
Les agressions et menaces verbales et parfois physiques, le refus de se laisser prendre en photo, des sujets ou éventuels réclamant de l’argent pour autoriser le libre fonctionnement dans des zones sécuritairement précaires, sont notamment les défis auxquels affirment être confrontés les participants.
Du point de vue graphique, la cohésion entre textes et images, l’importance du blanc dans la maquette de conception, la mise en page, entre autres, ont permis aux photographes et rédacteurs de percevoir comment valoriser leurs photos et leurs textes via les techniques graphiques, et comment celles-ci existent, au-delà de critères esthétiques.
Un ouvrage est en perspective. Au gré de cette œuvre graphique en devenir, des photos et illustrations auront à côtoyer des textes et des légendes au rythme d’un agencement réfléchi et pensé, en vue de permettre une découverte de la Grand rue de Port-au-Prince, dans ses confins les plus intimes.
Cet atelier fait suite à un premier atelier donné par les deux formateurs avec 12 jeunes photographes en avril 2013 autour de la construction d’un projet photographique. Il a débouché sur une publication visible en ligne et sur support dur sous le nom de « Notre regard », présenté le vendredi 8 novembre 2013
Depuis 2010, FOKAL se dit engagée plus formellement à soutenir le développement de ce regard haïtien en photographie, notamment via la tenue de formations ponctuelles, le développement de la documentation sur la photographie en Haïti, et le soutien à des individus dans leur travail. [mm kft gp apr 15/11/2013 00 :30]