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HaitiWebdo, Semaine du lundi 21 au lundi 28 octobre 2013

Haïti-Conjoncture : L’exécutif voudrait avoir la préséance sur le législatif et le judiciaire

P-au-P, 29 oct. 2013 [AlterPresse] --- Les dernières sorties du président de la république haïtienne, Joseph Michel Martelly, et de son premier ministre, Laurent Salvador Lamothe, sont peu rassurantes pour les lendemains démocratiques en Haïti. L’exécutif semble vouloir se conférer tous les pouvoirs, relève l’agence en ligne AlterPresse.

Le législatif tient tête et se veut le dernier rempart de la nation, alors que le judiciaire donne l’impression d’être un vassal de l’exécutif.

Or, un système démocratique repose sur ces trois pouvoirs. Une synchronisation fonctionnelle, entre eux, devrait encourager la construction d’un État de droit.

Quand un pouvoir cherche à supplanter les autres, à se revendiquer dans une position au-dessus des deux autres, à empiéter sur les attributions des autres, une réalité d’anarchie voire de dictature doit être crainte.

.Justice

Avocats et parquetiers en grève : revendications antagoniques sur André Michel

Jusqu’au lundi 28 octobre 2013, les avocates et avocats du barreau de Port-au-Prince - soutenus par l’association des magistrats haïtiens (Anamah) - sont encore en grève illimitée pour exiger les révocations du commissaire du gouvernement près le tribunal de première instance de Port-au-Prince, Francisco René, et du juge d’instruction, Lamarre Bélizaire, pour leur implication dans l’arrestation jugée illégale de l’avocat, André Michel.

A l’initiative du commissaire René, les substituts du parquet de la capitale ont observé, le 28 octobre, un arrêt de travail pour demander aux sénateurs de ramener « le prévenu André Michel » au greffe du parquet.

Or, ce même commissaire a déclaré au micro des journalistes avoir libéré André Michel. De surcroît, la presse a constaté que les sénateurs sont sortis avec l’avocat du bâtonnat de Port-au-Prince et non du greffe du parquet du tribunal civil de la capitale.

Farouche opposant du pouvoir en place, le jeune avocat a été arrêté, le 22 octobre 2013, paradoxalement après 6 heures du soir, sous le chef d’accusation de « refus d’obtempérer », lors d’une fouille policière d’une voiture, dans laquelle il n’était qu’un passager.

Ou ira cette grève ?

Lequel de ces deux groupes d’acteurs aura gain de cause ?

Le parquet de Port-au-Prince et le cabinet d’instruction du juge Bélizaire se sont fait une réputation d’instrument du pouvoir exécutif.

Le bureau du premier minisre, le ministère de la justice, le président du Cspj à l’unisson sur le dossier d’André Michel

Après sa libération, le 23 octobre 2013, et son accompagnement par des sénateurs de la république, l’avocat André Michel est encore taxé de « prévenu » et de « fugitif » par le bureau du premier ministre Laurent Lamothe, le ministère de la justice (dans une note dite de clarification) et le président du Cspj, Anel Alexis Joseph.

Ces instances et personnalités ont pointé du doigt le sénat de la république, qui aurait empiété sur le pouvoir judiciaire, à leurs yeux.

Me Michel aurait été sorti du greffe du parquet par les parlementaires, argumente les instances gouvernementales.

Aussi, exigent-elles que Me Michel soit retourné à la justice.

Anel Alexis Joseph parle même d’un éventuel mandat d’arrêt.

Dès le lendemain de sa libération, Me Michel a repris ses activités à son cabinet d’avocat.

En réponse au président du Cspj, dont il dit ne pas reconnaitre l’autorité, le président du sénat, Simon Dieuseul Desras, tente de démontrer que la lettre signée par Joseph, « esclave du pouvoir bandit », est une dictée et un faux issu du ministère de la justice.

L’en-tête n’est pas identique au papier officiel du Cspj, le pied-de-page comporte l’adresse du ministère de la justice, le nom de Joseph n’est pas écrit comme d’habitude et, de surcroît, c’est une voiture-messagère du ministère de la justice qui distribuait la note aux médias.

Au moins, deux membres du Cspj ont réfuté la position de Anel Alexis Joseph, qui reflète « des vues personnelles », « une milice judiciaire au service de l’exécutif », et non celles de l’institution.

Alors, peut-on parler d’indépendance du pouvoir judiciaire ?

.Parlement

3 ministres interpellés par le sénat de la république

15 sénateurs ont interpellé trois ministres du gouvernement de Laurent Lamothe pour le mardi 5 novembre 2013.

Le président du grand Corps, Simon Dieuseul Desras, a déjà transmis la lettre d’interpellation au premier ministre Lamothe aux fins d’informer ses ministres de l’intérieur, David Bazile, des affaires étrangères, Pierre Richard Casimir et de la justice, Jean Renel Sanon.

Le bureau du premier ministre s’attaque au sénat, puis se rétracte

Après avoir transmis, le 23 octobre 2013, une lettre musclée, contestant le choix par le sénat des juges de la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (Cscca), le premier ministre Laurent Lamothe s’est rétracté, deux jours plus tard.

Indiquant que la lettre du 23 octobre 2013 à été transmise « par erreur », Lamothe demande à Desras de l’ignorer.

Quel gâchis1 Quel désordre au sein de l’appareil administratif politique ! Inacceptable !, considèrent politiques et observateurs

Le processus de désignation des 10 juges de la Cscca est politisé, tous les noms retenus sont d’anciens parlementaires, soulignait la lettre du 23 octobre 2013 de Lamothe, dans laquelle le premier ministre dépasse ses prérogatives comme chef de gouvernement.

Dans ladite lettre du 24 octobre 2013, Lamothe a même indexé un postulant, en particulier, exigeant un audit de sa gestion à l’office national d’assurance-vieillesse (Ona).

Même si Lamothe s’est rétracté, cette lettre prouve les intention réelles, des deux branches de l’exécutif (la présidence et le bureau du premier ministre) d’outrepasser leurs attributions et de se substituer, à tout prix, au parlement et à ses prérogatives constitutionnelles, commentent des politiques.

Dans le même registre, le président Michel Martelly a envoyé une correspondance à la présidente sortante de la Cscca, Nonnie Mathieu, pour demander aux anciens juges - dont le mandat a pris fin en juillet 2013 - de rester en poste jusqu’à ce qu’il termine ce qu’il appelle un processus d’ « investigation (vetting) » sur les personnes choisies par le sénat.

Martelly déclare visiblement la guerre aux sénateurs, en les narguant, vu leur incapacité institutionnelle de faire publier des décisions dans le journal officiel de la république, le Moniteur.

.Droits humains

La ministre des droits humains mise en quarantaine par les organisations des droits humains

Dans une lettre ouverte, plusieurs organismes de droits humains expriment leur refus de rencontrer la ministre déléguée auprès du Premier Ministre, chargée des Droits humains et de la lutte contre la pauvreté extrême, Marie Carmelle Rose-Anne Auguste.

Ces organismes de promotion de droits humains reprochent à la ministre Auguste d’appartenir à un gouvernement autoritaire, foulant sciemment aux pieds les principes démocratiques et ne manifestant aucune velléité de respecter ni de faire respecter les droits de la personne humaine.

Marie Carmelle Rose-Anne Auguste voulait présenter, aux organisations, un comité interministériel des droits humains. [efd kft rc apr 29/10/2013 15:25]