P-au-P, 23 juil. 2013 [AlterPresse] --- « Archive du pays », « monument du reportage photo », « journaliste-photographe de référence d’Haïti », Thony Bélizaire, décédé le 21 juillet, était tout cela à la fois, selon ses proches.
Ayant travaillé à ses débuts pour plusieurs médias, dont l’hebdomadaire Haïti-Progrès, il est surtout connu grâce à son poste de photo-journaliste de l’Agence France presse (Afp).
Il souffrait d’une tumeur à la mâchoire.
« Cela m’a causé un grand choc. C’est l’une des plus grosses pertes de ma vie », déclare avec tristesse le coordonnateur de l’union des journalistes photographes haïtiens (Unjph), Jean Jacques Augustin pour qui Thony Belizaire est « le père du photo-journalisme en Haïti ».
Un professionnel passionné et perspicace
Clarens Renois, correspondant de l’Afp en Haïti et directeur de l’agence de nouvelles en ligne Haïti Press Network (Hpn), a collaboré directement avec lui durant environ 15 ans et le connait depuis vingt bonnes années.
Renois souligne à AlterPresse le « sens aigu de l’information, [le] flair des choses [et le] coup d’œil » de son collègue qui en un « cliché » peut prendre « la photo qui explique tout, la photo qui informe, qui parle et rend le texte plus lisible ».
Il est l’un de ces rares photojournalistes à ne pas rester dans l’ombre, poursuit-il.
« Il va sur tous les sujets et y veut être le premier. Il travaille beaucoup. Il n’a pas peur d’aller dans des endroits les plus difficiles que ce soit d’accès ou pour sa sécurité personnelle. Il est toujours prêt à aller au front. C’est la marque du grand journaliste », confie Clarens Renois.
Les prix qu’il a reçus grâce à son professionnalisme, ses photos sorties partout en Europe, aux Usa, dans des journaux, des revues, des magazines ne lui ont pas donné la « grosse tête ».
Le 27 juin 2007 il a eu le premier prix dans la catégorie professionnelle d’un concours de photographie organisé sous le thème « la vie dans les villes » par le Fonds des Nations Unies pour la population (Unfpa).
A la chasse aux images, Belizaire est toujours aux aguets malgré « son air pensif », selon son Augustin lui-même photojournaliste.
« Ses sens demeurent en éveil. Et rassurez-vous, il vous fera voir ce que vous n’avez pas vu et que vous n’auriez même pas pensé voir », poursuit-il avec une pointe de fierté d’avoir connu cet « homme extraordinaire ».
Dans un communiqué du lundi 22 juillet 2013, le premier ministre haïtien, Laurent Lamothe par le biais de son bureau de communication estime que « Thony [Bélizaire] a profondément influencé le travail des photographes haïtiens, particulièrement les photojournalistes. »
Un photojournaliste engagé
Même s’il est « sans doute le seul jusqu’à présent qui a été le plus publié à l’étranger » ou le « vrai photojournaliste professionnel que le pays a connu », comme le dit Clarens Renois, Belizaire s’est aussi engagé pour la défense de la liberté de la presse en Haïti.
Il était membre du Groupe de réflexion et d’action pour la liberté de la presse (Gralip). Formée au lendemain du coup d’Etat sanglant du 30 septembre 1991 contre le président Jean-Bertrand Aristide, cette structure regroupait des journalistes qui se positionnaient contre le bâillonnement de la presse par les militaires.
Un père de famille soucieux
Ceux qui l’ont connu à l’instar de Clarens Renois peuvent témoigner que le photojournaliste Bélizaire a été « un père soucieux et un mari responsable ».
« Un père de 4 enfants (...) très proche de sa famille. (…) Il faisait son travail de journaliste dans les rues. Il prenait ses enfants à l’école et sa femme au travail et les déposait également. Il pouvait se fendre en 4 pour travailler et rendre sa famille heureuse », explique Renois.
Selon lui, « la presse haïtienne ne peut que dire : c’est le parcours d’un exemple à suivre. » [efd kft gp apr 23/07/2013 09:10]
Source photo : http://deiberthaiti.blogspot.com/2013/07/in-tribute-to-thony-belizaire.html