Español English French Kwéyol

Pour une positivation des interrelations énergétiques en Haïti

Par Dr. Marc Antoine Archer [1]

Soumis à AlterPresse le 14 juillet 2013

« Il y a trop longtemps que cela dure.

Il est grand temps que cela cesse ! »

Cela fait un certain nombre d’années que l’un des « gourous de la radio » en Haïti commençait son éditorial radiophonique, du lundi matin je crois, en ces termes : « il y a trop longtemps que cela dure … ».

Aujourd’hui, en observant la situation du secteur énergétique haïtien, en analysant son évolution durant ces deux dernières décennies, je me sens incliné, voire contraint, à la même réflexion.

Cependant, les derniers événements - qui ont secoué le secteur de l’électricité, dans son palier de production, et qui, certainement, si rien n’est fait, continueront à secouer les ciments du secteur - me poussent à réaliser ce travail de caractère propédeutique, d’analyse de la situation actuelle, de sensibilisation de la citoyenneté pour le porter à « agir » et d’incitation des différents acteurs à « réagir », en gérant, de la meilleure façon possible, leurs interrelations, pour le bien du pays.

La publication de cet article doit, donc, être perçue comme un effort de ma part (ma redevance citoyenne), pour faciliter la compréhension des enjeux énergétiques, auxquels fait face le pays, et ainsi inciter les « principaux acteurs » à se lancer à la recherche de « meilleures solutions ».

Prenons, comme point de départ, ces 5 observations, qui devront, dans le cheminement réflexif proposé dans cet article, aider à une meilleure compréhension de la réalité énergétique, décloisonner les discours existants (à facile profusion sur les ondes) et faciliter la réflexion sur la recherche de solutions :

1- Haïti est actuellement l’un des pays (de la région) les plus pauvres énergétiquement, aussi bien au niveau de la disponibilité de ressources énergétiques propres (locales) qu’au niveau de la disponibilité de ressources économiques, technologiques ou humaines (pour l’obtention des ressources énergétiques importées, l’amélioration de la valeur ajoutée, la production de richesses de façon compétitive par rapport aux autres acteurs régionaux) ;

2- La consommation énergétique d’Haïti, basée sur l’exploitation agressive des ressources locales, surtout des ressources ligneuses et cellulosiques, exerce une pression « INSOUTENABLE » sur les environnements physique et social du pays, créant une « boucle de rétro-alimentation » perverse qui :

a. alimente la destruction du substrat environnemental du pays ;

b. renforce la dégradation des tissus social et productif ;

c. entrave la génération de richesses et, de là, la compétitivité du pays ;

3- Le fossé, qui nous sépare des autres pays, se fait de plus en plus grand, aussi bien au niveau économique que technologique. Cela se traduit par une destruction, de plus en plus forte, des capacités de construction de la société. D’où un sérieux problème de sustentation pour le pays ;

4- La capacité de création de Capital Humain - capable de gérer les interrelations qui se produisent dans le secteur de l’énergie, entre les différents acteurs, aussi bien internes qu’internationales - est si faible que notre isolement technologique se renforce au fil du temps ;

5- L’indifférence de l’Haïtienne / l’Haïtien, par rapport aux réalités régionales ou sous-régionales, crée, chez nous, des mécanismes de réflexion biaisée. La réalité haïtienne est vécue comme si :

a. elle ne dépendait d’aucun paramètre extérieur ;

b. aucune interrelation n’existait entre nous et les autres :

i. nous sommes « uniques » ;

ii. nous vivons notre « unicité » dans la plus grande désinvolture ;

iii. nous voulons former un « système isolé ».

Dans ce contexte, soit on adopte la position « défaitiste » exprimée par cette première partie de la réflexion « il y a si longtemps que cela dure ... », soit on décide de « prendre le taureau par les cornes » pour se mettre au travail, de façon résolue, et entreprendre les modifications nécessaires à la transformation du secteur (il est grand temps que cela cesse).

Pour cela, la bonne démarche consiste à :

1- comprendre notre situation ;

2- planifier les actions à moyen terme, tout en visant le long terme (scénario 2020/ Prospective 2030 et 2050). Le futur se construit ! ;

3- bâtir le consensus entre les différentes actrices et les différents acteurs ;

4- renforcer le réseau d’interrelations :

a. entre les actrices et acteurs locaux ;

b. avec l’extérieur ;

5- positiver les interrelations.

1- Comprendre notre situation

Commençons par nous mettre d’accord sur un premier point, celui qui est à l’origine de l’une des plus grandes confusions en Haïti : la différence entre électricité et énergie.

L’électricité, quoiqu’étant l’énergie sous sa forme la plus sophistiquée, ne définit pas, à elle seule, l’énergie. Ce n’est que l’une des formes de l’énergie.

L’énergie – en choisissant la définition la plus large, afin de faciliter le consensus - c’est une grandeur physique, numérique, associée à une situation concrète d’un phénomène. Elle n’est visible et identifiable qu’à partir de ses manifestations qui peuvent être :

-  la production de chaleur ;

-  la réalisation d’un travail ;

-  la circulation d’un flux d’électrons ;

-  la combustion ;

-  le rayonnement.

L’énergie peut donc se présenter sous plusieurs formes (énergie mécanique, énergie électrique, énergie chimique, énergie radiante, énergie thermique, énergie nucléaire, énergie hydraulique).

En général, pour mieux nous comprendre, disons que l’énergie a pour objet de satisfaire une série de besoins socio-économiques, à travers l’utilisation de ressources (énergétiques) présentes dans la nature.

La société met alors en œuvre tout un ensemble de processus technologiques, économiques et sociaux, afin de transformer l’énergie primaire disponible en énergie de consommation, capable de satisfaire les besoins de chaleur, lumière, force motrice et électricité. Cela est aussi valable pour Haïti !

Nous avons donc besoin de l’énergie pour :

-  nous déplacer (de façon sûre et aisée), quelle que soit la modalité choisie ;

-  conserver nos produits périssables, en augmentant leur durée de vie (froid industriel) ;

-  pour la cuisson de nos aliments ;

-  pour l’éclairage de nos espaces de vie ;

-  pour la production de biens et de services divers ;

-  pour réduire la dépendance de la « force animale » (si c’est la meilleure option) ;

-  pour améliorer notre confort thermique (climatisation) ;

-  etc.

Donc, forts de ce point de vue et conscients de la différence existante entre « électricité et énergie », posons des éléments de réflexion ou établissons des pistes d’analyse sur la thématique de la satisfaction des besoins énergétiques du pays.

En réalité, au niveau de l’énergie, la seule et unique préoccupation, qui devrait occuper notre temps, en tant que décideur, serait : comment faire pour que la société haïtienne, dans les prochaines années, dans un scénario mondial de fortes pressions sur les combustibles fossiles, puisse disposer de la « capacité énergétique suffisante » pour satisfaire l’intégralité de ses besoins socio-économiques, à travers l’utilisation de ressources (énergétiques) présentes dans la nature, au meilleur coût (économique, environnemental, social) ?

Par conséquent, quels processus technologiques, économiques et sociaux, mettre en œuvre afin de transformer l’énergie primaire disponible en énergie de consommation, capable de satisfaire les besoins de déplacement, de chaleur, lumière, force motrice et électricité ?

Comprendre notre situation veut aussi dire mieux comprendre les causes de la « crise récurrente de l’électricité » en Haïti.

Récemment, la « énième » crise - déclarée entre les fournisseurs privés d’électricité et la Compagnie Haïtienne de Gestion Monopolistique de l’Électricité, Edh, a remis, sur la table, les mêmes éléments de désaccord de toujours.

En fait, on ne fait que tourner en rond autour des mêmes problèmes récurrents :

1- Une couverture en services de l’électricité, fortement déficitaire ;

2- « Le vol d’électricité, avec son taux le plus élevé dans la région » ;

3- « Le déficit budgétaire chronique de Edh et l’obligation de recours aux subventions du trésor public » ;

4- Les difficultés, liées à la gestion de la structure de production privée d’énergie électrique (les producteurs indépendants d’électricité - Independent Power Producer / Ipp -) ;

5- « L’incapacité de Edh à effectuer le recouvrement intégral de ses factures » ;

Mais, résumer les problèmes énergétiques d’Haïti - aux problèmes de recouvrement de l’Edh ou de capacité de pouvoir honorer les dettes contractuelles, basées sur des « protocoles d’achat d’électricité » ou le pourcentage élevé de pertes non techniques de l’Edh (de vol de l’électricité, pour bien dire) -, c’est comprendre partiellement le problème de la satisfaction des besoins énergétiques de la société haïtienne. C’est ne s’intéresser qu’à une partie des problèmes énergétiques du pays ou ne les comprendre qu’en partie.

Notre problème de fond, au niveau de l’électricité, réside dans une question de vision.

Nous avons du mal à comprendre que l’institution Edh n’est, en fait, que la « vision de marché de l’électricité, mise en place par un gouvernement, dans une conjoncture d’imprévisibilité énergétique, postérieure à la crise du pétrole de 1973.

Les temps ont changé depuis.

La société haïtienne s’est profondément modifiée, aussi bien en quantité (de 4,000,000 à 10,500,000 environ actuellement), qu’en qualité (appauvrissement du Capital Humain en termes aussi bien relatif qu’absolu).

Comprendre donc l’idée de mise en place d’un « marché de l’électricité », harmonisé aux besoins de la société haïtienne d’aujourd’hui, est fondamental pour mieux gérer la réalité actuelle et surtout pour agir dans le respect des intérêts collectifs.

On ne pourrait pas comprendre, ni entreprendre la construction de ce « marché », sans insister sur l’importance de la mise en place de tous les éléments de régulation et de contrôle (on n’en a pas l’habitude dans ce pays).

Le problème n’est donc pas celui de la subvention accordée à l’institution.

Haïti, et je l’ai dit à plusieurs reprises, n’est pas le seul pays au monde à subventionner le secteur de l’électricité. Mais, la modalité choisie et le cadre global, dans lequel les apports du trésor public s’effectuent, doivent changer et s’adapter à une dynamique différente.

L’État peut, par exemple, choisir, entre toutes les options possibles :

1- veiller à ne pas entraver la compétitivité du pays. L’État, dans ce cas - dans un régime de concurrence saine, ouverte et transparente, dans un marché de l’électricité quasiment couvert par l’investissement privé - doit fixer un plafonnement des tarifs et apporter un complément entre le prix réel de l’unité d’énergie et le prix payé par l’utilisatrice / l’utilisateur final. Dans ce cas, l’État assume le déficit tarifaire ;

2- L’État peut apporter un soutien direct aux utilisatrices et utilisateurs en situation de fort handicap social ;

3- L’État peut aussi subventionner directement la productrice / le producteur aux fins de réduire le coût de l’unité d’énergie utilisée ;

4- L’État peut aussi choisir de ne rien faire et de laisser fonctionner le marché avec les coûts réels, et choisir, alors, à partir de l’élaboration de politiques publiques complémentaires, d’équilibrer la capacité d’accès aux services de base pour les plus défavorisés économiquement.

Quelle option choisir ?

Cela va dépendre du « choix de futur », réalisé par les décideurs.

Si cela a autant duré, mieux vaut s’y mettre maintenant pour éviter que cette situation perdure jusqu’au point d’hypothéquer les options d’émergence de notre pays.

2- Planifier les actions de moyen terme tout en visant le long terme

Dans un monde à forte complexité énergétique (problèmes géopolitiques, problèmes environnementaux, problèmes économiques, problèmes sociaux), ne pas comprendre que la grande partie des problèmes énergétiques d’Haïti doit se résoudre par l’émergence d’une nouvelle façon de concevoir l’énergie, d’une évolution de la pensée au niveau de la conception de l’énergie en tant que bien public, c’est se leurrer.

Il n’y a que la « pensée active, dynamique » qui puisse nous permettre de dégager, à l’horizon 2030, un « ensemble d’orientations opérationnelles et de préconisations de politique publique en matière d’offre d’énergie, d’accès aux services énergétiques ».

L’énergie est une industrie du temps long : les investissements sont très importants,
 ils se réalisent sur de longues périodes, 
et les actifs (production, transmission) sont construits pour durer plusieurs décennies.

Il nous faut donc bien comprendre la dynamique des besoins énergétiques de la société haïtienne pour savoir comment élaborer les structures de satisfaction desdits besoins. La démarche, à mettre en place, est une démarche collective qui exige :

- d’abord une explication : cela implique une analyse de la conjoncture, des causes et des conséquences possibles de nos choix, face aux options technologiques disponibles et aux réalités sociales existantes ;

- ensuite élaboration d’un projet, autour duquel « bâtir le consensus » social le plus large possible :

- explication du projet et description complète de la situation ;

- puis un plan d’action, incluant une définition claire des différentes actions, les prévisions à court, moyen et long terme, les conséquences des actions, les moyens de financement,

- enfin, un programme d’actions à réaliser et un calendrier d’application, dans l’immédiat, à court terme, à moyen et à long terme.

- les ressources locales dont nous disposons (inventaire) ;

- nos besoins énergétiques réels, présents et futurs (analyse prospective, prévisionnelle) ;

- les ressources que nous voulons consommer (nos choix énergétiques) ;

- les ressources que nous pouvons et devons consommer (durabilité- efficacité énergétique) ;

a- comment les consommer ;

b- quelles priorités accorder à la consommation

- décentraliser la production ;

- maîtriser la consommation.

Nous ne sommes qu’à la case départ. Nous venons de loin. Il faut donc commencer par :

-  faire comprendre que seul le concours, l’implication de toutes les actrices et de tous les acteurs sociaux, peut faciliter l’émergence de solutions à la problématique énergétique du pays ;

-  transmettre les préoccupations citoyennes sur les mauvais réflexes, développés au long de notre histoire de peuple,

o sur les mauvais gestes que nous réalisons de façon individuelle et collective, de façon quotidienne,

o sur la mentalité technologique développée par notre société, cultivée par nos élites, entretenue par elles et complètement inappropriée à la conjoncture mondiale.

-  attirer l’attention de l’Haïtienne / l’Haïtien sur le rôle de l’énergie dans une société qui, malgré tout et malgré nous, se trouve en plein 21e siècle.

3- Bâtir le consensus

En Haïti, malheureusement, nous n’avons jamais vu l’énergie en tant que bien collectif désirable et nécessaire au fonctionnement de notre société. Ni au niveau du particulier, ni au niveau de la direction du pays.

Par contre, nous le croyons nécessaire à notre qualité de vie, individuelle. Nous voulons en disposer pour notre bien-être personnel, même si la grande majorité, autour de nous, n’arrive pas à jouir de ses bienfaits.

Pour que le plus grand nombre d’Haïtiennes / d’Haïtiens puissent se retrouver dans un cadre facilitateur de l’accès à l’électricité, la construction du consensus doit se faire autour de certaines « lignes stratégiques » :

1- amélioration de la gestion des ressources énergétiques disponibles dans le pays ;

2- amélioration de l’accès aux services énergétiques dans les zones rurales ;

3- amélioration de la gouvernance énergétique

a. amélioration de l’efficacité énergétique ;

b. amélioration de la compétitivité économique du pays ;

i. meilleure gestion des besoins énergétiques industriels

ii. augmentation de l’offre énergétique et du capital énergétique

4- promotion de la formation et des innovations techniques par l’amélioration du capital technologique de la société haïtienne, en augmentant le nombre de techniciens bien formés ;

5- diversification énergétique, car :

a. il ne faut écarter aucune filière énergétique que l’économie du pays peut supporter. Cela veut donc dire éviter les filières économiquement onéreuses pour le pays ;

b. on doit accorder la priorité aux mesures et aux technologies, qui permettent d’assurer la fiabilité des approvisionnements et du service énergétique continu ;

c. il est impératif d’informer la société sur les enjeux réels de la situation technologique du pays et de promouvoir l’adaptation à une mentalité technologique facilitatrice de changement ;

d. il faut un cadre réglementaire cohérent et adapté aux besoins énergétiques du pays ;

e. il faut un cadre d’investissements industriels facilitateur ;

f. il faut des politiques gouvernementales actives, constantes, voire même agressives ;

g. il faut une participation active de la société, des consommatrices finales et des consommateurs finaux de services énergétiques ;

h. il convient de promouvoir une conscience citoyenne, permettant de faire de l’énergie un bien public, et des ressources naturelles des biens à conserver, à protéger et à valoriser dans le respect des normes environnementales ;

i. il importe d’établir une pédagogie de l’énergie, permettant de transformer les attitudes et de changer les mentalités.

Pour bâtir le consensus, il faut que l’on connaisse la réalité et que l’on soit conscient des faiblesses structurelles de notre société. Il faut avoir maintenant la volonté de vouloir changer.

4- Renforcer notre réseau d’interactions avec l’extérieur

En dernier lieu, il nous faut enfin prendre conscience que nos problèmes de société, quoique ne concernant qu’Haïti, s’inscrivent dans une dynamique régionale qui implique fortement aussi bien nos voisins les plus proches, la République Dominicaine, que les moins proches, avec lesquels nous sommes liés par un réseau d’interrelations, d’interactions assez fortes.

Voilà pourquoi il faut applaudir, des deux mains, les initiatives qui ont vu le jour à partir du bureau du ministre à la sécurité énergétique (Bmse), depuis novembre 2012, et qui tendent à renforcer les interrelations entre Haïti et les institutions internationales du secteur de l’énergie.

Il faut citer, par exemple, l’organisation latino-américaine de l’énergie (Olade), l’institut espagnol pour la diversification et l’économie d’énergie (en espagnol Idae), la commission nationale de l’énergie de la République Dominicaine (Cne).

1- Avec l’Organisation latino américaine de l’énergie (Olade)

Haïti est membre de cette organisation depuis sa formation (cela fait 40 ans déjà). Cependant, notre présence ne s’est manifestée que de façon timide.

Actuellement, avec une participation beaucoup plus agressive des cadres de l’administration publique haïtienne aux différentes activités et surtout après la visite, en mars 2013, d’une forte délégation de l’Olade conduite par son plus haut responsable, le Secrétaire Exécutif (avec la participation de plusieurs pays : Cuba, Équateur, Venezuela), Haïti a pu mettre en place, à partir du Bmse, différentes structures de collaboration :

-  renforcement des structures de formation de Capital Humain dans le secteur de l’énergie,

-  assistance technique dans un cadre de coopération Sud-Sud (secteur hydrocarbures, secteur minier, marché de l’électricité, etc.) ;

-  création de structures de gestion d’informations énergétique et légale (système d’information énergétique et légale – Siel) ;

-  création du comité d’information énergétique et légale (Ciel) ;

Plusieurs institutions haïtiennes sont concernées : le ministère des travaux publics, transports et communications (Mtptc), le bureau des mines et de l’énergie (Bme), l’Électricité d’Haïti (Edh), le ministère de l’environnement (Mde), le ministère des affaires étrangères (Mae), aussi bien en tant que ministère de tutelle de la commission mixte haïtiano-dominicaine qu’en sa qualité de coordonnateur et point focal de la communauté des États de l’Amérique latine et des Caraïbes (Celac), et le Bmse.

2- Avec la commission nationale de l’énergie (Cne)

En un deuxième point, nous devons obligatoirement parler de nos « relations énergétiques » avec la République Dominicaine (RD).

Une visite du ministre à la sécurité énergétique, à Santo Domingo en janvier 2013, une rencontre à Port-au-Prince de différentes institutions du secteur de l’énergie de la RD (avec à leur tête le président de la Cne) en mai 2013, permettent de comprendre que, des deux côtés de l’île, les deux « acteurs » se sont rendus compte de l’importance des actions harmonisées sur des ressources conjointes.

La création, au sein de la commission mixte haïtiano-dominicaine, du comité Énergie, montre l’importance accordée à ces interrelations.

La réalité de plus de 21 millions d’êtres humains, qui se partagent un territoire d’environ 76,000 Km2 , peut être un argument solide pour convaincre les responsables des deux pays à apprendre à gérer leurs interrelations de façon cohérente, car les grands conflits de ce 21e siècle peuvent se devoir, non seulement aux problématiques identitaires, mais aussi et surtout aux ressources énergétiques (en incluant les ressources hydriques).

3- Avec l’institut espagnol pour la diversification et l’économie d’énergie (Idae)

Cette institution espagnole a décidé de nous accompagner dans notre démarche de création de « Capital Humain » de qualité et en quantité suffisante dans le secteur de l’énergie en Haïti.

Le pilier de l’efficacité énergétique, la formation, l’élaboration de matériel pédagogique, la normalisation dans le secteur énergétique, la modélisation de systèmes énergétiques, etc., autant d’éléments de collaboration et d’échanges entre cette institution et nos institutions du secteur, qui nous poussent à croire qu’effectivement nous sommes sur une bonne voie.

Une nouvelle réalité s’impose à Haïti, celle d’une dynamique d’interactions positives entre différentes actrices et différents acteurs, dans un cadre de fonctionnement suffisamment transparent pour que des interrelations explicites soient suffisamment intéressantes et bénéfiques pour toutes les parties.

Les sous-régions Caraïbes et Amérique Centrale, la région Amérique Latine et le Mexique, l’Amérique du Nord, facilitent la création de nouveaux « cadres de fonctionnement ». Les institutions supra nationales - telles que la communauté des Etats de l’Amérique Latine et des Caraïbes (Celac), l’Association des Etats des Caraïbes (Aec), l’Association de l’Amérique Latine pour l’intégration (Aladi), l’organisation latino américaine de l’énergie (Olade), PetroCaribe, et même la Communauté et Marché Commun des Caraïbes (Caricom) et l’organisation des Etats américains (Oea) - constituent une « palette » de grandes actrices / grands acteurs, grâce auxquels notre pays peut arriver à tisser un « réseau d’interactions » favorable à l’émergence de nouvelles options transformatrices. Une nouvelle réalité !

5- Positiver nos interrelations

Qu’on le veuille ou non, que l’on s’en rende compte ou que l’on fasse semblant de ne pas le voir, Haïti, du point de vue énergétique (ou bien en général) peut être considérée comme un « système complexe », dynamique, ouvert, qui nécessite une réorganisation de sa structure de fonctionnement interne et une régulation de ses mécanismes de fonctionnement avec l’extérieur.

Un système complexe, car l’ensemble d’éléments internes, d’actrices et d’acteurs différents (politiques, économiques, sociaux) se trouvant en interaction dynamique, répond à des intérêts non uniformes ou complètement disparates.

Un système ouvert, car il est en interaction avec son environnement qui l’entoure. Le contrôle de flux échangés (énergie, matière, monétaires, informationnels) permet d’harmoniser les rapports entre le système et son environnement.

Ces flux sont régulés, à la frontière du système par des boucles de rétroaction. Il y a « influence mutuelle » entre le système et son environnement. Toute entrave à cette gestion de flux entre le système et son environnement ne fera que générer des dysfonctions, capables de rendre la structure globale « inapte » à répondre aux besoins.

Un système dynamique, au sein duquel tous les éléments sont en interaction. La gestion d’un tel système nécessite que l’on aborde sa gestion dans sa globalité, tenant compte des différents éléments qui la composent, qui sont organisés en fonction d’un but et des interrelations qui les unissent.

Nous sommes toujours au bon moment ! Les « interrelations », existantes entre les différentes actrices et différents acteurs du secteur énergétique haïtien, sont encore à définir.

L’État doit assumer son rôle d’acteur principal, de catalyseur, de régulateur, de normalisateur. La Société haïtienne, dans son ensemble, doit comprendre, une fois pour toutes, que l’énergie, est son « épine dorsale ».

Sans une société énergétiquement saine, comprenant parfaitement le rôle et la place de l’énergie dans son fonctionnement, sans une prise de conscience claire de la part des différentes actrices et différents acteurs, de leurs rôles, des interactions qui se produisent entre eux et de la qualité des interrelations existantes, il nous sera difficile d’avancer.

Voilà pourquoi, la « positivation des interrelations énergétiques en Haïti » est :
-  un défi collectif ;

-  un travail de longue haleine ;

-  un long chemin à parcourir ensemble.

Le premier pas, maintenant !

marcantoine.archer@gmail.com, iphcaten@yahoo.es


[1Physicien Industriel

Coordonnateur National Olade pour Haïti

Consultant