Par Edner Fils Décime
P-au-P, 24 mai 2013 [AlterPresse] --- Les dernières inquiétudes du président de la commission économie et finances du sénat, Jocelerme Privert, ont alarmé la population quant à l’état réel des recettes publiques.
Aussi, des responsables des institutions étatiques de perception sont-elles intervenues dans la presse, à coup de statistiques, en vue de rassurer les citoyennes et citoyens.
Après le passage du cyclone Sandy, en novembre 2012, et une « conjoncture économique défavorable », les prévisions de recettes à collecter ont été révisées à la baisse, selon le directeur général de la Direction générale des impôts (Dgi), Clarck Neptune.
Au cours des sept premiers mois de l’exercice 2012-2013, le montant des recettes collectées s’élève à 11,514,000.92 millions de gourdes (US $ 1.00 = 44.00 gourdes ; 1 euro = 60.00 gourdes aujourd’hui), indique la Dgi.
Mis à part « les effets Sandy », les motifs de cette révision sont à trouver dans les piètres performances des indicateurs macroéconomiques, les incertitudes relatives au démarrage de la reconstruction (3 ans après le séisme dévastateur de janvier 2010) et la non-réalisation des investissements directs étrangers escomptés, selon le directeur général.
Dans la loi de finances 2012-2013, l’État haïtien prévoyait des perceptions d’environ 52 milliards de gourdes, dont 21, 8 milliards pour la Dgi et autour de 31 milliards pour l’administration générale des douanes (Agd).
« Taux de croissance de 8%, stabilisation du taux de change, inflation modérée, investissement direct des étrangers » sont des éléments du cadre macroéconomique, sur lesquels a misé le gouvernement haïtien
Selon Fresnel Jean-Baptiste, directeur général de l’administration générale des douanes, la subvention des produits pétroliers par l’État haïtien n’est pas en reste dans l’impossibilité de garder des prévisions de 52 milliards de gourdes.
« L’État haïtien perd 200 millions de gourdes par mois, en subventionnant les produits pétroliers, afin d’éviter que les prix grimpent sur le marché », informe-t-il.
L’État haïtien doit donc se contenter de quelques 44 milliards de gourdes environ pour les recettes de la Dgi (18, 8 milliards) et de l’Agd (25 milliards).
Le taux de croissance du pays étant passé à 2% au cours de la période immédiate post-Sandy.
Alors que, pour la même période de l’année fiscale précédente, les recettes avaient atteint le niveau des 22 milliards, les recettes publiques - d’octobre à mars 2013 - s’élèvent à 21, 7 milliards de gourdes, avait révélé, dans la presse, le sénateur Jocelerme Privert.
« Si la tendance continue ainsi, le pays s’achemine vers un déficit budgétaire [de 9 milliards de gourdes, environ] » avait déclaré le Sénateur.
Un gouvernement qui taxe pourtant « de manière exagérée »
Au regard de la « répression fiscale », de la lutte « agressive » contre l’évasion, la fraude et le dumping fiscaux, d’aucuns estiment qu’il est « anormal et bizarre » que le pays enregistre un quelconque déficit budgétaire.
« Ce gouvernement taxe de manière exagérée », s’offusque l’économiste Eddy Labossière.
A quelques 5 mois de la fin de l’exercice fiscal 2012-2013 et « étant donné que la période de vache grasse du cycle fiscal est terminée », Henry-Claude César, chef de service des statistiques de la Direction générale des impôts (Dgi), appelle à l’utilisation de « moyens contraignants, afin de recouvrer les créances fiscales ».
En vue de redresser la barre, Privert conseille plutôt au gouvernement des mesures de renforcement de l’efficacité des organes de collecte des recettes, d’accélération de la lutte contre la contrebande et de l’incitation au paiement des impôts.
« Si jamais il y a déficit budgétaire, le gouvernement doit comprimer ses dépenses. Et surtout fermer ses ministères non-productifs », avance prudemment Labossière.
Pour célébrer ses deux ans au pouvoir, le président Martelly a fait dépenser à la république 40 millions de gourdes.
Alors qu’en novembre 2012, l’ex-ministre de l’économie et des finances, Marie Carmelle Jean-Marie avait demandé que les ministères et les institutions publiques se tiennent aux dépenses essentielles.
« Depuis le gouvernement de transition (2004-2006), Haïti a rompu avec le déficit budgétaire. On a toujours eu un surplus budgétaire – que je ne partage pas non plus-. Que ce gouvernement suit l’exemple de ses deux devanciers », recommande Labossière.
Dans une petite économie comme Haïti, le déficit budgétaire va amener l’augmentation de l’inflation et une plus grande dépréciation de la monnaie nationale, la gourde.
Le taux d’inflation en avril 2013 (glissement/année) est de 7.3% avec une variation mensuelle de 0.3%. En mars 2013, il s’est chiffré à 7.70% avec une variation par mois de 0.60%.
Le mercredi 22 mai 2013, le dollar étasunien s’achète à 43.63 gourdes et se vend à 43.89 gourdes, selon le site officiel du ministère de l’économie et des finances. [efd apr 24/05/2013 9:25]