P-au-P, 17 mai 2013 [AlterPresse] --- « Des fois, quand je veux qu’une information soit diffusée, je passe par une station de radio, avec laquelle je suis en contact, ou une personne avec qui j’estime avoir de bons rapports, je lui donne la bonne information ».
C’est ainsi que le président Joseph Michel Martelly s’est exprimé lors d’une visite, le jeudi 16 mai 2013, à la Radio télévision Caraïbes (Rtvc).
Toujours en froid avec la presse, le président y est allé de sa franchise effarante, dans l’ambiance bienveillante instaurée par les animateurs de l’émission radiophonique Matin Caraïbes.
« Qui a la bonne nouvelle ? La bonne nouvelle, c’est moi qui l’ai. Vous parlez de nouvelle, c’est moi la nouvelle », affirme t-il, ajoutant qu’il n’écoute pas la radio.
Ce mépris de Martelly pour le média le plus populaire du pays s’expliquerait par des contenus erronés, selon lui.
« Quand je vois à une ou deux occasions que ce que vous dites [dans les médias] n’a pas rapport à ce qui se fait, je n’ai plus besoin de l’entendre, à moins que je veuille entendre des commérages », poursuit-il. « Voilà pourquoi je n’écoute plus la radio. C’est parce que, la nouvelle que diffuse la radio n’est souvent pas la bonne nouvelle ».
Aussi Martelly invite t-il les journalistes à « venir au palais » national, s’ils veulent avoir des informations, « d’aller à la source », source qui n’est autre que lui-même.
Martelly, qui ne s’est pas du tout départi de sa verve de chanteur "sweet micky", a osé, dans le cadre de l’interview à Rtvc, qualifier de "Ti Lili" la consœur journaliste Lilianne Pierre-Paul, actuelle présidente de l’Association nationale des médias haïtiens (Anmh) et directrice de programmation à Radio Télé Kiskeya.
Ce qui traduit, une nouvelle fois encore, l’arrogance, l’air hautain et l’attitude outrecuidante, voire discriminatoire, de Martelly vis-à-vis de la presse, en général, et de la consœur journaliste Lilianne Pierre-Paul, en particulier.
Les épithètes de "ti" ont leur signification spéciale dans le contexte haïtien. Quand une telle épithète est utilisée par un dirigeant politique, à l’endroit d’une journaliste, elle revêt une caractéristique chargée de sens et de sous-entendus... pour l’avenir...
Méconnaissance du fonctionnement et du rôle de la presse, ou simple naïveté, l’interview du président s’est, en tout cas, achevée sous des éclats de rire et des applaudissements.
L’ancien secrétaire d’État à la communication Guyler C. Delva a interprété le fameux « Hello » de Lionel Richie.
Pour qui se prend Martelly, en déclarant être l’unique détenteur des informations, au mépris du pluralisme idéologique, de la démocratie et de la liberté d"expression, chèrement acquis par les luttes du peuple haïtien ?
Est-ce un nouveau signe avant-coureur des velléités dictatoriales du président pour museler la presse et encourager la pensée unique "du chef" ? [apr 17/05/2013 10:10]