P-au-P, 16 mai 2013 [AlterPresse] --- Comme à son habitude, le chef de l’État, Joseph Michel Martelly, a mis les responsables de l’Unité de construction de logements et de bâtiments publics (Uclbp) dans l’embarras, en contestant publiquement le prix du loyer des maisons au village Lumane Casimir (au nord-est de la capitale), qui prévoit d’accueillir des familles sinistrées du séisme de janvier 2010, a observé l’agence en ligne AlterPresse.
Comme si le président ne savait pas grand-chose du « parc strictement locatif » qu’il est venu inaugurer le 16 mai 2013, il s’enquiert, en prononçant son discours, du coût du loyer et du temps d’accès à la propriété du logement.
Alors que le directeur de l’Uclbp, Harry Adam, dit s’appuyer sur « des calculs économiques » pour fixer le tarif mensuel à 2,500.00 gourdes (US $ 1.00 = 44.00 gourdes ; 1 euro = 60.00 gourdes aujourd’hui), Martelly conteste et propose 1,500.00 gourdes.
Pourtant, bien avant, Martelly avait annoncé que l’État prendrait en charge la moitié des frais pour les bénéficiaires.
Ce sont 120 unités de logement qui seront distribuées aux locataires d’ici juillet 2013, même si seulement 8 personnes ont reçu symboliquement des clés à la cérémonie d’ « inauguration de la phase 1 du projet », précise Adam.
Constituée après le tremblement de terre du 12janvier 2010, la base de données de l’organisation internationale de la migration (Oim) a servi de support dans le choix des premiers locataires.
Le revenu moyen de la catégorie ciblée a été le critère de sélection, selon un consultant du projet, requérant l’anonymat.
Arborant des maillots frappés d’un « mèsi prezidan Martelly » qu’elles ont été « obligées » de porter pour participer à la cérémonie, plusieurs des 120 premières personnes sélectionnées ont, tout de même, manifesté leur insatisfaction.
« On ne savait pas que c’était des maisons à louer. Personne ne nous l’a dit avant. On pensait qu’on allait payer progressivement et, au bout d’un certain temps, on serait des propriétaires », explique un bénéficiaire, père de famille en provenance d’un camp de personnes déplacées à Cité Soleil (municipalité au nord de la capitale).
Dans l’état actuel de la législation haïtienne, les gens ne seront jamais les propriétaires des maisons, puisque les terres proviennent d’une déclaration d’utilité publique de la zone, souligne le directeur Adam à AlterPresse.
« L’État ne peut pas prendre des terrains privés pour les donner à d’autres citoyens », ajoute Adam.
Le prix est trop élevé pour des personnes vivant dans des conditions difficiles, estiment certains bénéficiaires, espérant tout de même pouvoir devenir propriétaires en économisant de l’argent progressivement.
« Je ne vais pas payer cette cage à 1,500.00 gourdes par mois. Je préfère mettre de l’argent de côté pour acheter une parcelle et construire ma propre maison », soutient un autre déplacé bénéficiaire.
Certes, « ce n’est pas la maison de rêve de quelqu’un, mais c’est un premier pas », admet Martelly, dans ses propos.
Le respect et la dignité d’habiter dans un village décent sont les plus importants, aux yeux de Martelly.
Quelques chiffres
Les travaux, qui ont débuté en décembre 2011, devraient être achevés en 2014, d’après le directeur de l’Uclbp.
Le village « Lumane Casimir » comprendra 3,000 unités de logements devant coûter à l’État haïtien 40 millions de dollars étasuniens tirés du fonds Petrocaribe.
A ce stade du projet, plus d’un millier de logements sont prêts.
628 habitats individuels, 593 édifices à étages comportant 4 appartements chacun (2,372 appartements au total), devront accueillir une population de « 15,000 habitants », d’après Martelly.
Chaque habitat individuel a une salle à manger, une cuisine, une salle de bain et 2 chambres. Mais les dimensions laissent à désirer, puisque le tout s’implante sur environ 16 m2 en ce qui concerne les habitats individuels.
12 salles de classes, des espaces de jeux, dont un terrain de basketball, un local pour un dispensaire, sont également aménagés.
Le village renfermera aussi « un commissariat de police, une place publique, une caserne de pompiers, un terrain de football et un marché public ».
Parmi des « actions accompagnatrices » de la population, le directeur de l’Uclbp annonce la construction « d’un mini parc industriel » pour le développement du potentiel de créations d’emplois.
Pendant que les responsables sont partis avec l’idée de « construire une communauté fière de son village », les discussions et les visages des gens ne l’ont pas montré. [efd apr 17/05/2013 00:40]