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Haïti-élections : Vote électronique, oui, mais… prudence avec la machine

Par Edner Fils Décime

P-au-P, 09 mai 2013 [AlterPresse] --- Plusieurs partis politiques haïtiens adhèrent à l’éventualité de l’utilisation du vote électronique dans le cadre des prochaines joutes électorales en Haïti.

Cependant, le vote électronique ne serait pas une panacée contre les fraudes si récurrentes dans les scrutins électoraux, déroulés ces dernières années en Haïti, nuancent-ils.

Telle est, en substance, la position de plusieurs dirigeants de partis politiques, contactés par AlterPresse, suite à l’annonce d’exploration de cette possibilité, le 2 mai 2013, par le collège transitoire du conseil électoral permanent (Ctcep).

Pour ces chefs de partis politiques, la vigilance citoyenne est de rigueur.

Opl : moderniser les élections, mais…

L’Organisation du peuple en lutte (Opl), qui se présente comme un « parti moderne », dit n’avoir aucun grief contre les nouvelles technologies de la communication.

« Le pays doit décidément opter pour la voie de la modernisation. C’est inévitable. Naturellement, il faut mettre des balises, des gardes-fous, parce que la technologie n’élimine pas la possibilité de fraude massive. Mais, cela ne doit nullement nous empêcher de faire ce choix, déjà effectué dans d’autres pays, dont le Brésil et le Venezuela », pense Sauveur Pierre Étienne, coordonnateur de l’Opl.

Toutefois, il doit y avoir un dialogue entre le pouvoir exécutif, les partis politiques de l’opposition, le Ctcep, pour voir quel système adopter parmi ceux utilisés par certains pays dit amis d’Haïti, pense l’Opl.

Certains problèmes, notamment celui de l’électricité, doivent être résolus si on veut avoir un vote électronique, estime l’organisation du peule en lutte qui propose un test d’utilisation avant de le généraliser.

« Toutes les habitations, les sections communales, les communes, doivent être électrifiées. De surcroît, il faut faire appel à des techniciens internationaux pour nous présenter les avantages et inconvénients de chaque système par rapport au pays », ajoute Étienne.

Fusion : trop de mains manipulent les élections

« Sources de violence, génératrices de crises à répétition, origine d’instabilité » sont les étiquettes collées aux élections - organisées en Haïti avec le « vote-papier » - par le parti Fusion des sociaux-démocrates.

« Il y a trop de mains qui manipulent les résultats, les bulletins, les procès-verbaux », déplore la fusion des sociaux-démocrates qui suggère du bénévolat, par les citoyennes et citoyens, le jour des élections.

Une pétition est en circulation, en ce sens, sur tout le territoire national, à travers les coordinations départementales du parti politique, informe Edmonde Supplice Beauzile, secrétaire générale de la fusion des sociaux-démocrates.

« Le vote électronique aiderait à réduire, au moins à 80%, les possibilités de fraudes », hypothèse Supplice Beauzile.

« Nous sommes contre l’idée que l’État haïtien commande les équipements pour le vote électronique, via une firme internationale. Nous sommes pour la coopération Sud-Sud avec le Brésil. En 2004, ce pays était même prêt à nous prêter leurs machines, se souvient la Fusion.

Kanpèp : la technique doit servir la politique

« Ce n’est pas l’aspect technique qui doit être déterminant, même si c’est important. La technique doit être sous le contrôle de la politique », argue Marc Arthur Fils-Aimé de Kanpèp, reconnaissant la possibilité de réduction des fraudes par le vote électronique.

La méthode peut changer, mais le fond reste le même, en ce qui touche aux partis politiques et programmes représentant véritablement une alternative pour la résolution des problèmes fondamentaux du peuple haïtien.

« Ce que nous réclamons, c’est la participation populaire à tous les niveaux ».

Mettre en place le système électronique suppose du temps. Des questions, liées à la provenance des machines, à la formation des techniciennes et techniciens, à l’accès de toutes et de tous au vote, doivent également être posées, avance Kanpèp.

Inite : le débat continue

A la plateforme politique dénommée "Inite" (Unité), il n’y a pas encore de position « commune arrêtée », mais les débats sur la question y vont bon train, informe son porte-parole, le député Sorel Jacinthe.

Jacinthe déclare se positionner « personnellement » dans le camp des « pro-vote à la machine ».

« L’expérience post-1986 montre que c’est plus facile de faire des magouilles avec les bulletins en papier. Je crois qu’il n’y a pas de grandes possibilités de détourner le vote d’une personne, surtout avec l’empreinte digitale du citoyen sur sa carte », soutient Jacinthe qui ne donne pas carte blanche aux mains manipulatrices de la machine, mais préconise la « surveillance à la source ».

Inite appelle donc à la participation de « tout le secteur démocratique » dans cette surveillance, soutenant que l’actuelle administration politique n’a pas la volonté politique d’organiser des élections crédibles, honnêtes et inclusives. [efd kft rc apr 09/05/2013 1:00]