Par Edner Fils Décime
P-au-P, 31 janv. 2013 [AlterPresse] --- Le dernier rapport de la fédération internationale des ligues des droits humains (Fidh) tire la sonnette d’alarme sur le danger qu’encourt la sécurité humaine en Haïti, depuis le passage du tremblement de terre du 12 janvier 2010, selon un document dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.
Ce rapport intitulé " Haïti, la sécurité humaine en danger" a été présenté le mercredi 30 janvier 2013 à Port-au-Prince au local du réseau national de défense des droits humains, membre de la Fidh, aux côtés du Centre œcuménique des droits humains (Cedh).
Ce document pointe du doigt la « vulnérabilité accrue pour les victimes du séisme ; l’extension de la pauvreté et de l’exclusion sociale ; la persistance de l’insécurité juridique et de l’impunité [ainsi que] l’impunité des négligences et violations des droits humains commises par des membres de la mission des Nations-Unies pour la stabilisation en Haïti[ Minustah] ».
Intervenant à cette conférence de presse, Geneviève Jacques de la Fidh attire l’attention sur les différentes « solutions précaires qui déplacent les problèmes sans les résoudre », notamment le projet 16/6 de l’ État haïtien piloté par l’ingénieur Clément Bélizaire.
Lancé officiellement le 17 août 2011 par le chef de l’État, Joseph Michel Martelly, le projet 16/6 visait à réhabiliter 16 quartiers défavorisés dans la capitale, en y relocalisant les personnes vivant dans 6 grands camps ciblés dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince.
Pour la Fidh, il semblerait que les « choix des six camps ont été faits sur des critères de visibilité plutôt qu’en fonction du niveau de précarité et de vulnérabilité, puisqu’il s’agissait de camps situés sur des espaces publics visibles (…) ».
Aussi, dans le cadre des programmes de « reconstruction » après le séisme, apparait-il de « graves défauts de gouvernance » qui ont frayé le chemin à la marginalisation de l’État haïtien, de la société civile et des entreprises haïtiennes.
Ceci serait une raison explicative de la « dépendance massive » du pays de l’aide internationale humanitaire et « pourquoi la sécurité humaine reste extrêmement vulnérable aujourd’hui ».
En s’appuyant sur la construction des camps de relocalisation à Corail et à Morne-à-cabris (au nord de la capitale), la Fidh estime que les acteurs nationaux et internationaux n’ont pas assez pris en compte « la dignité et l’avenir des populations concernées ».
Côté Justice et État de droit, Gimena Reyes, responsable de la Fidh pour les Amériques, constate l’existence d’une justice à double vitesse en Haïti.
70% de la population carcérale haïtienne croupit sous le poids de la détention préventive prolongée, rappelle-t-elle.
Alors que Martelly dit faire de l’état de droit une priorité, la Fidh voit plutôt le contraire.
Car « pour les puissants et les proches du pouvoir, il semble que l’impunité soit la règle », déplore Reyes, en soulignant les cas de Jean-Claude Duvalier et de Josué Pierre-Louis.
« C’est lamentable qu’une victime se désiste, alors que les faits ont eu lieu » regrette Gimena Reyes de la Fidh.
Aussi, la Fidh et ses organisations membres appellent-elles au respect de l’indépendance du pouvoir judiciaire et à ce que les « crimes de la dictature Duvalier ne restent pas impunis ».
La fédération internationale des ligues des droits humains appelle également « la communauté internationale à conditionner l’aide au respect des principes fondamentaux et indispensables à la reconstruction d’un État de droit ». [efd kft rc apr 31/01/2013 1:05]