P-au-P., 8 mai. 04 [AlterPresse] --- Une délégation haïtienne composée de deux membres du Jury de l’UNESCO pour la Liberté de la Presse en Haïti, Michèle Pierre Louis, présidente de FOKAL (Fondation Konesans ak Libète) et de notre collaborateur Vario Sérant, également directeur de l’information à Télé Haïti, a pris part à un colloque
sur la liberté de la presse et la gestion des conflits qui s’est tenu à Port
Of Spain (Trinidad), du 2 au 4 mai 2004.
Ce colloque a également réuni des délégations venues des différents Etats membres de la Caricom. Il s’est déroulé sous les auspices de l’UNESCO, de l’Association des Journalistes du Commonwealth (CJA) et de la Conférence des Médias Caraïbéens (CCM).
Dans ses propos de circonstance, la représentante de l’UNESCO à Trinidad et
Tobago a mis l’emphase sur le rôle essentiel que les médias indépendants ont
joué dans le processus démocratique dans divers pays.
Josiah Jocelyne a déclaré que « en temps normal, la réduction du déficit de
l’information sur des dossiers sensibles a permis d’améliorer la qualité des
décisions, de relever le niveau des débats et prévenir ou repousser les
différents et les conflits », en faisant particulièrement référence à Haïti.
Elle a ajouté que « quand la situation bascule dans le désordre et
l’incertitude, la diffusion d’informations fiables et de qualité peut
contribuer à rétablir l’équilibre ».
Récemment, a-t-elle renchéri, « ceci a été démontré dans la République sour
des Etats de la Caricom, Haïti, où la nécessité d’avoir plus de médias
indépendants et pluralistes s’avérait cruciale ».
Le Jury du Prix de l’UNECO de la Liberté de la Presse en Haïti a choisi
cette année de ne pas attribuer de prix à une figure particulière de la
presse, mais d’honorer l’ensemble de la presse indépendante pour le courage
exemplaire dont elle a fait montre pendant la récente crise politique
(NDLR).
Selon Josiah Jocelyne, les médias peuvent jouer un rôle capital dans la
promotion de points de vue divers sur des dossiers sensibles et conflictuels
et dans la stimulation du dialogue comme alternative aux conflits.
La responsable de l’UNESCO a fait savoir que « en recherchant ces faits, les
journalistes deviennent particulièrement vulnérables. Car, dans des
situations de conflit, la diffusion de la vérité peut être suivie de
persécutions, pertes en vies humaines et préjudices matériels. Ceux-là et
celles qui ont été témoins de certains faits et qui ont relaté la vérité
deviennent des ennemis mortels ».
Josiah Jocelyne a rappelé qu’il revient aux autorités de tous les pays de
préserver la paix, la sécurité, l’ordre et le respect des droits des
journalistes de travailler dans des conditions de sécurité.
Reprenant des propos tenus par le président de Banque Mondiale, Wolf
Wolfenson et le directeur général de l’UNESCO, Koitchiro Matsura, à
l’occasion de la journée internationale de la liberté de la presse l’année
dernière, Josiah Jocelyne a indiqué que la liberté de la presse relève d’une
quête permanente et « qu’elle ne peut attendre des jours meilleurs ».
Elle a martelé que la liberté de la presse est une condition sine qua non
pour la construction d’une société inclusive.
« La sécurité, le respect des droits humains et l’implication de la société
civile dans la promotion du développement figurent parmi les principes
fondamentaux dont l’UNESCO a toujours fait la promotion », a conclu la
représentante de l’UNESCO à Trinidad et Tobago.
Ce colloque parrainé entre autres par l’UNESCO a donné lieu à des échanges
intéressants entre les professionnels de médias présents sur des thèmes
divers dont « Stratégies de Survie pour les Médias Publics », « La question
du Quota : légiférer ou non sur le contenu local », Reportages en temps de
siège », « Convergence Wave » en anglais) .
Ce dernier thème fait allusion à la polyvalence des professionnels de médias
et à leur appropriation des nouveaux outils technologiques en vue de
développer leurs talents et renforcer leur impact.
En rapport avec la liberté de la presse, « nous devons aussi renouveler et
renforcer les standards de qualité des reportages, appuyer et développer la
formation des journalistes de sorte qu’ils puissent jouer efficacement leur
rôle dans la société », ont fait savoir plusieurs panélistes.
Ce colloque a été aussi l’occasion pour les différents intervenants de
scruter le champ journalistique à l’horizon 2020.
Ils ont entre autres souhaité que les médias, particulièrement les journaux,
deviennent plus interactifs, qu’ils jouent correctement leur rôle dans la
transmission des valeurs.
Des panélistes ont par ailleurs planché sur la difficile réalité de la
presse dans plusieurs pays comme à Cuba où ils ont exigé la libération du
journaliste Raul Rivera ou à Haïti où deux journalistes ont été assassinés
ces dernières années, Jean Dominique (3 avril 2000) et Brignol Lindor (3
décembre 2001).
« Etre journaliste en Haïti, c’est marcher avec un cercueil sous les bras »,
a indiqué dans la foulée la présidente du Jury pour la Liberté de la Presse,
Michèle Pierre Louis, paraphrasant par ainsi Jean Dominique.
Différents intervenants se sont plaints également de la concentration des
médias dans les pays développés, lequel phénomène conduit, ont-ils précisé,
à la censure. Un des panélistes a vivement dénoncé les « spin doctors » en
Australie, des lobbyists qui manipulent constamment des journalistes.
Des participants au colloque ont aussi souligné de nouvelles contraintes
imposées à la liberté de la presse et à la liberté d’expression en rapport
avec la lutte contre le terrorisme. D’autres ont plaidé pour la mise en
place d’infrastructures devant concourir à une meilleure et plus
substantielle diffusion,à l’échelle internationale, de l’information
concernant les pays du Tiers Monde. [vs apr 08/05/2004 01:00]