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Haïti-Droits humains : Quel avenir pour les enfants commerçants aux Gonaïves ?

Correspondance Exalus Mergenat

Gonaïves, 11 déc. 2012 [AlterPresse] --- Mal vêtus, sales, les chaussures déchirées, de petites filles et de petits garçons, orphelins de père ou de mère, négligés par leurs parents, passent la quasi-totalité de leur temps à vendre de l’eau potable en sachets dans les rues des Gonaïves, chef-lieu du département de l’Artibonite à 171 km au nord de la capitale, relève l’agence en ligne AlterPresse.

Un quotidien difficile, qui ne leur permet pas de jouir pleinement de leurs droits.

Au centre-ville, dans le voisinage de la place d’armes et au marché communal, des dizaines d’enfants désœuvrés s’adonnent à cette activité commerciale courante, gage de leur subsistance ainsi que de leurs parents.

Dans certains cas, tout leur foyer repose sur leurs frêles épaules.

Charles, un garçon de 13 ans, aux yeux brillants et expressifs, se permet un moment de repos : la journée a été rude. Il est orphelin de père et, le comble, sa mère est aveugle.

Il a commencé à vendre les sachets d’eau avec seulement 25.00 gourdes (US $ 1.00 = 43.00 gourdes ; 1 euro = 60.00 gourdes aujourd’hui), un don d’un agent de la police nationale d’Haïti (Pnh) cantonné au commissariat Toussaint Louverture des Gonaïves.

« Avec cette modique somme, j’ai acheté des sachets d’eau potable pour ensuite les revendre à des chauffeurs de motos-taxis et à des camionneurs », raconte-t-il, la voix assez grave pour son âge.

« Je suis dans cette branche d’activité depuis 7 mois. Aujourd’hui, j’achète et revends beaucoup plus d’eau potable en sachets. Ce qui m’a permis d’avoir la possibilité de donner un peu d’argent à ma mère. Le peu qu’il puisse être, elle l’utilise pour acheter du pain », poursuit-il, un peu satisfait de lui-même.

Paul, un autre garçon, affirme aussi que la vente de l’eau lui rapporte des profits qui lui permettent d’économiser plus de 400.00 gourdes, depuis qu’il a commencé.

Cependant, il est conscient du fait que cette activité est susceptible de compromettre son avenir. L’envie de gouter le pain de l’instruction lui paraît difficile, vu sa condition.

« J’aimerais aller à l’école, mais je n’ai pas de chaussures, ni d’uniformes. L’année prochaine, si j’ai la possibilité, je m’inscrirai dans une école. C’est l’unique chemin pour réussir dans la vie », reconnait Paul.

La situation n’est pas différente pour son camarade Ernst, âgé de 16 ans, la taille haute et le port altiers.

La vie de Ernst n’est pas un long fleuve tranquille. Il a été négligé par ses parents qui habitent à Pilate (Nord). Aux Gonaïves, il habite chez sa tante, commerçante au marché communal, qui essaie de joindre les deux bouts. Elle lui a fait un prêt de 50.00 gourdes, ce qui lui a permis de se lancer dans le commerce de l’eau potable en sachets.

Contrairement à son camarade Paul, Ernst a déjà fréquenté une école, même si c’était pour une courte période. Parvenu en 3e année fondamentale, il a abandonné, faute de ne pas pouvoir payer les frais de scolarité.

« La vente de l’eau potable m’est utile, certes. Mais, elle n’assure pas mon avenir », déclare-t-il, souhaitant retourner à l’école pour pouvoir être un homme utile à sa famille et à la société.

Interrogées, les autorités de la direction départementale de l’institut du bien-être social et de recherches (Ibesr) dans l’Artibonite n’ont annoncé que des mesures, notamment de réinsertion.

Aucun plan ni budget clair ne sont présentés.

Pour ces enfants, le directeur de l’Ibesr aux Gonaïves, Cindais Jean, n’a qu’une promesse : accompagnement et prise en charge. [em kft rc apr 11/12/2012 0:50]