Par Emmanuel Marino Bruno
P-au-P, 6 déc. 2012[AlterPresse] --- La bibliothèque haïtienne des frères de l’instruction chrétienne (Bhfic), cambriolée dans la nuit du samedi 24 au dimanche 25 novembre 2012, continue d’offrir ses services, bien que réduits, au lectorat haïtien, observe l’agence en ligne AlterPresse.
D’une capacité d’accueil de 35 à 40 usagères et usagers par jour, cette bibliothèque continue, malgré tout, de fonctionner depuis le lundi 26 novembre 2012, indique la directrice exécutive de la bibliothèque, Marie France Guillaume, qui appelle les lectrices et lecteurs à revenir fréquenter l’espace.
Le mardi 4 décembre 2012, la présence de seulement quatre usagers a été constatée à la bibliothèque aux environs de 12:00 pm locales (17:00 gmt).
Le cambriolage n’a pas totalement paralysé les activités de la bibliothèque, souligne Guillaume reconnaissant, toutefois, que la qualité des services laisse à désirer à cause de l’absence des appareils volés, notamment du photocopieur.
Le photocopieur permettait aux usagères et usagers de reproduire un livre ou un document, parce que la bibliothèque ne fait pas de prêts à domicile, les consultations étant faites sur place, explique-t-elle.
A travers une note, affichée à l’entrée de la bibliothèque, l’administration formule une excuse pour la qualité des services ainsi qu’un appel de dons à l’endroit des lectrices et lecteurs.
Les voleurs ont emporté un photocopieur, trois ordinateurs, des scanners, caméras numériques et des disques durs externes, informe Guillaume qui précise qu’aucun livre imprimé n’a été volé.
Les cambrioleurs ont démoli trois fenêtres en vitres pour pouvoir pénétrer à l’intérieur de l’institution. Les traces de mains sales des cambrioleurs restaient toujours visibles au bas d’une des fenêtres, le mardi 4 décembre.
Un cadenas en fer, de la porte d’entrée principale, a été cassé, selon les observations effectuées après le cambriolage par la gestionnaire Guillaume.
« La nouvelle du cambriolage de la bibliothèque a été un choc pour moi », exprime le directeur de la bibliothèque, le frère Serge Larose, faisant savoir que les endroits endommagés ont été rapidement réparés en vue de sécuriser le volume documentaire précieux contenu dans ce centre.
Les fenêtres saccagées ainsi que le cadenas ont été remplacés . Les marques des travaux de soudure de la porte d’entrée de la bibliothèque étaient toujours perceptibles, ce même mardi 4 décembre.
Le cambriolage de la Bhfic a soulevé l’indignation de nombreux chercheurs, enseignantes et enseignants, étudiantes et étudiants, et de sociétés savantes qui, dans une note de protestation, l’ont qualifié de crime contre la recherche et de coup dur pour l’image du pays.
Devant cet acte inqualifiable, ils souhaitent que des enquêtes sérieuses permettent de récupérer les biens volés et de traduire les coupables devant la justice.
Les signataires de cette note de protestation appellent l’État haïtien à prendre des mesures pour assurer la protection du patrimoine documentaire.
La bibliothèque haïtienne des Fic, un patrimoine
Deuxième plus ancienne du pays, la bibliothèque haïtienne des Fic ou bibliothèque de St-Louis de Gonzague a été fondée à Port-au-Prince en 1912 pour les élèves du collège des frères de l’Instruction chrétienne, une congrégation enseignante d’origine française, venue en Haïti sur invitation en 1864.
A l’initiative du frère Ernest-Louis Dion, la jeune bibliothèque ouvrit ses portes en 1920. Elle constitue aujourd’hui l’une des plus grandes ressources documentaires du pays.
Son fond documentaire renferme un éventail d’ouvrages, liés à l’histoire du peuple haïtien, sa culture, sa législation, mais aussi sa géographie, sa flore, son histoire religieuse, son éducation et sa médecine.
De nombreuses collections de journaux des 19e, 20e et 21e siècles peuvent aussi y être consultées.
Une centaine de volumes traitant de l’occupation espagnole d’Ayiti (1492 – 1697), cent quatre-vingt huit (188) autres livres racontant les aventures des flibustiers et la longue histoire de Saint-Domingue, y sont stockés.
Plus de 200 œuvres de fiction et littéraires, une demi-douzaine de collections incomplètes de revues rares du début du 20e siècle, comme la Ronde (1898 – 1902) et Haïti Littéraire (1905 - 1912) figurent aussi à la Bhfic.
Plus de 120 essais, monographies, des lois et Constitutions des colonies françaises en 6 volumes par Moreau de St Mery, le recueil de vues des lieux principaux de St-Domingue (1791) peuvent aussi être consultés.
430 écrits touchant l’esclavage en Haïti jusqu’à l’indépendance, des essais et monographies consacrés aux gouvernements de Jean-Jacques Dessalines, Henri Christophe et Alexandre Pétion (principaux héros des guerres de l’Indépendance), et environ 200 rapports officiels, analyses, pamphlets, récits de témoins oculaires décrivant l’occupation américaine d’Haïti de 1915 à 1934, composent également le patrimoine documentaire de la Bhfic. [emb kft rc apr 06/12/2012 9:35]