Correspondance Shella Chauvette
Belladère, 23 nov. 2012 [Alter Presse] --- « J’étais dans un marché en train d’acheter de la nourriture, quand les soldats dominicains m’ont arrêtée. Mes deux enfants sont restés seuls, parce que mon mari n’était pas là. »
C’est le témoignage recueilli par AlterPresse auprès de Dorlia Exumé, qui fait partie d’un groupe de 145 Haïtiens et Haïtiennes reconduits à la frontière de Belladère (Sud-est) par les autorités dominicaines, lundi 19 novembre dernier.
Ces personnes, 45 femmes, 3 enfants et 97 hommes, ont été déposées à Carisal en territoire haïtien, sans avoir eu le temps de récupérer leurs affaires. La plupart pieds nus, les mains vides.
Des cambistes haïtiens touchés par leur désespoir leur ont donné un peu d’argent.
« Malheureusement, l’Etat haïtien est impuissant pour freiner ces rapatriements massifs de nos compatriotes », déplore Lesly Charles, un cambiste pour qui le geste de donner de l’argent à ces migrants semble aller de soi.
Mais les rapatriés ont gagné Belladère non sans mal. Les motocyclistes les ont forcés à payer plus que le tarif normal de la course, ont-ils témoigné. Leur calvaire a ainsi continué, quand une fois arrivés, ils n’ont trouvé aucune structure d’accueil pour les prendre en charge.
Il existe pourtant au complexe administratif à la frontière un bureau de l’Office national de la migration (Onm), un organe de l’Etat.
Les officiers du service de la migration se plaignent cependant de ne pas avoir les moyens d’accueillir ces Haïtiennes et Haïtiens, qui généralement passent une journée sans nourriture.
« Nous sommes du bureau de la migration, notre mission est d’assister les rapatriés. Souvent nous ne pouvons pas nous présenter, car nous ne savons quoi dire, et quoi faire, puisque nous n’avons rien pour assister ces hommes et femmes livrés à eux-mêmes. Donc cette institution existe seulement de nom », déplore l’administrateur assistant du bureau de la migration, Douzable Anderson Junior.
L’unique recours des rapatriés demeure en général les bureaux du Groupe d’appui aux rapatriés et refugiés (GARR) et du Comité des droits humains à Belladère (Komite dwa moun Beladè/Kdmb).
« Samedi 17 Novembre, 15 rapatriés sont arrivés au bureau en train de pleurer, puisqu’ils n’ont pu trouver personne pouvant les assister. J’étais obligée de les conduire chez moi afin de leur donner quelque chose à manger », raconte la secrétaire du Kdmb, Marie Yolène Vertus. [sc kft gp apr 23/11/2012 11 :20]