Español English French Kwéyol

Haïti : L’imagination humanitaire essoufflée ?

Par Wooldy Edson Louidor

P-au-P, 19 nov. 2012 [AlterPresse] --- L’imagination humanitaire, véritable machine capable de mobiliser des fonds d’urgence internationaux pour assister des communautés et des pays en détresse, semble être de plus en plus dépassée par les catastrophes sociales d’origine naturelle à répétition en Haïti.

Haïti est considérée comme le pays de l’urgence, où il devient superflu de décréter un État d’urgence. Où (pis encore !) l’imagination humanitaire semble essoufflée.

La capacité de mobilisation de l’aide humanitaire en faveur d’Haïti, durant et après les catastrophes, est en chute libre ou du moins s’affaiblit de plus en plus.

Par exemple, des organisations non gouvernementales plient bagage ou réduisent leur aire d’intervention par manque de fonds.

Pourtant, la situation humanitaire dans le pays est plus que jamais préoccupante, au point que la fédération internationale des droits humains (Fidh) affirme que « la sécurité humaine est en danger » [1].

Pourquoi ce paradoxe ?

La mort, un fait divers

« De quoi meurt-on en Haïti, dans l’indifférence générale ? », intitule Jamal El Hassani, dans son article paru le premier novembre dernier, suite au passage de Sandy dans le pays [2].

« Le passage de Sandy a fait plus de 50 victimes sur l’île, où meurent, chaque semaine, 20 femmes en couches, 80 malades du choléra, 1.000 malades de maladies transmissibles et 500 enfants de moins de cinq ans », écrit l’auteur, soulignant la banalité de la tragédie causée par le passage récent de Sandy dans un pays, où la mort est un fait divers.

Ainsi, les tragédies, qui surviennent, deviennent-elles de moins en moins des faits de grande valeur journalistique internationale ou des « évènements » humanitaires à l’échelle mondiale.

Aucune surprise ! Tout est prévisible ou pourrait l’être.

Le verbe humanitaire devient tautologique et le discours politique superfétatoire. L’évènement n’est pas ce qui arrive avec les catastrophes, mais ce qui se vit au quotidien.

Flash appeals, lancés par des acteurs autorisés de l’humanitaire et appel urgent des autorités du pays à la solidarité internationale, en vue de toucher les fibres sensibles de l’humanité, semblent répondre tout simplement à un réflexe politique conditionné ou à la logique du « capitalisme du désastre ».

Comment repenser les conditions de possibilité d’une nouvelle logique de l’humanitaire, applicable au cas d’Haïti ? Comment repenser les limites de l’humanitaire, de manière à ce qu’il n’étouffe pas le politique, le social, voire l’humain ? [wel rc apr 19/11/2012 0 :00]