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Haïti-Reconstruction : La Fondation de France tire des leçons des projets qu’elle finance

Par Edner Fils Décime

Jacmel (Haïti), 02 novembre 2012 [AlterPresse] --- « Clarification de la chaîne des responsabilités ; dépassement des contraintes foncières ; dimension environnementale faible ; un standard minimum pour une reconstruction durable ; amélioration de la qualité et de la solidité ; meilleure implication des bénéficiaires et des acteurs locaux ; renforcement du suivi et du contrôle des chantiers » sont parmi les leçons tirées par la fondation de France, en relation à différents projets soutenus auprès de partenaires en Haïti de 2010 à date (octobre 2012).

L’accent est aussi mis sur une vision globale des projets, en tenant compte des environnements social, économique et culturel.

Tout en préconisant un renforcement des capacités techniques des collectivités territoriales, afin de pouvoir faire respecter les normes et standards, des participantes et participants à un séminaire (de deux jours) de « capitalisation des pratiques de projets de (re) construction » - clôturé le vendredi 19 octobre 2012 à Jacmel (Sud-Est d’Haïti) - pensent approprié d’utiliser les projets de certaines organisations non gouvernementales (Ongs) comme modèles à l’établissement de standards nationaux.

La sensibilisation sur la prévention des risques et désastres ; l’utilité des bâtiments à la population en temps de catastrophe sont, entre autres, des pratiques à pérenniser selon les notes de capitalisation du séminaire.

« Restituer et diffuser les bonnes pratiques découvertes durant l’exécution des projets » : tel a été le leitmotiv du séminaire organisé par la fondation de France, a observé l’agence en ligne AlterPresse.

Cette activité, à laquelle ont pris part une quarantaine de membres d’organisations non-gouvernementales et d’institutions - dont des projets ont été financés par le programme « Solidarité Haïti » (2010 – 2014) -, ambitionne également de préparer une rencontre devant se tenir au siège de la fondation de France, en vue de partager les recommandations et leçons apprises, selon les explications de Louise Perrichon, chargée de mission Haïti à la fondation de France.

En phase de « clôture et de retrait », c’est « un moment important de contribuer à la réflexion sur le sujet de la reconstruction en Haïti et de diffuser les bonnes pratiques qu’on a identifiées », considère Benjamin Bellegy, chargé de mission Solidarité internationale à la fondation de France.

Dès le lendemain du tremblement de terre du 12 janvier 2010, la fondation de France s’est donnée pour principe de ne pas financer la construction de shelters (abris) ni de faire des distributions, ont pris le temps et le soin de souligner les responsables.

« Nous avons voulu travailler dans le durable avec des institutions, présentes en Haïti bien avant le séisme et maîtrisant les besoins de leurs zones d’interventions, qui sont surtout en milieu rural »..

Pas moins de 28 projets sont subventionnés par les fonds de Solidarité Haïti, dont 21 dans le cadre du « programme de reconstruction équipements » et 7 dans le domaine de « l’habitat ».

« 4,580 mille euros ont permis de construire des équipements de qualité dans les quartiers et d’autres d’intérêt général, [c’est-à-dire] 30 écoles, 11 centres socioculturels, 5 centres agricoles et 1 orphelinat », informe Bellegy.

Les 7 projets « Habitat », qui bénéficient d’une enveloppe de 2,240 mille euros, comprennent « 230 maisons neuves, 510 réhabilitations et 2 programmes d’appui à la construction ».

Parmi les différentes organisations non gouvernementales (Ong) et institutions exécutant ou bénéficiant ces 28 projets, il convient de citer : Planète Urgence ; action pour un développement durable (Acded) ; Concert-action ; Inter aide ; Direction nationale du livre (Dnl) ; alliance française de Jacmel ; coordination régionale des organisations du Sud-Est (Crose), Zanmi Lasante ; groupe de recherche et d’échanges technologiques (Gret) ; Solèy Lakay ; etc.

Les critères de choix des projets

« Au départ, nous étions vigilants sur le montage du projet, sa pertinence et son mode opératoire. », rapporte Ludovic Jean-Marc, expert-conseil auprès de la fondation de France.

« Sécurité foncière ou d’occupation ; conformité aux normes et standards ; impact environnemental réduit ; dispositif de formation à la construction ; implication des bénéficiaires ; prévention/mitigation des risques ; ciblage des populations vulnérables » sont certains des critères de sélection des projets de « (re) construction » de la fondation.

Les leçons et recommandations

Au cours du séminaire, un canevas en 3 phases a été adopté pour réfléchir sur les projets : le montage et les acteurs en termes de conception du projet ; la programmation et la conception architecturale ; la mise en œuvre, qui va de la réalisation jusqu’à la livraison du bâtiment a ses destinataires finaux.

Coté acteurs des projets (Ong et institutions), on recommande de « fixer le rôle des bailleurs ; une certaine flexibilité et une souplesse des bailleurs par rapport à certains changements de matériaux ou de modification de plans en cours d’exécution de projets ; la mise en place d’un cahier de charges et de standard minimum à l’intention des Ong par les bailleurs ».

Mise en place d’atelier, formation de maçons, création d’unité de production de matériaux de qualité sont nécessaires pour permettre la duplication des maisons dans les zones de projets, car « la maison n’est pas uniquement une construction, mais un moyen de développement, d’apprentissage pour les gens de la zone », estime Philippe Petit de Planète Urgence.

Pour supplanter le conflit foncier, l’approche légaliste ne serait pas très porteuse de résultats en milieu urbain aussi.

Les Ong proposent de valider le titre de propriété par un consensus communautaire pour légitimer l’occupation d’un terrain.

Des doutes planent sur ce « consensus communautaire », si on tient compte des multiples intérêts qui peuvent traverser une communauté et les racines historiques des conflits fonciers en Haïti.

Où est l’État haïtien ?

« La reconstruction n’est pas qu’un enjeu matériel, de bâtiments. Aussi faut-il toucher à la relance économique, à la culture, à la formation, au développement rural pour essayer de reconstruire sur des bases saines », a compris.la fondation de France comme institution privée.

Toutefois, comment l’État haïtien a-t-il manifesté son droit de regard dans l’exécution de tous ces projets sur le territoire haïtien ? Quel a été le niveau d’implication du ministère des travaux publics ? [efd rc apr 02/11/2012 09:40]