P-au-P, 03 oct. 2012 [AlterPresse] --- « C’est un événement stupide et ridicule ! C’est de l’enfantillage » ou encore la projection « d’une image d’irresponsabilité », voire « d’une perte de temps ».
Tels sont les qualificatifs, attribués par des politiques, comme Himler Rébu et Evans Paul, à la sortie, à pied dans les rues (de l’aéroport international de Port-au-Prince jusqu’aux ruines du palais présidentiel), dans l’après-midi du lundi 1er octobre 2012, du président Joseph Michel Martelly, de retour au pays après sa participation à la 67e assemblée générale de l’organisation des Nations Unies (Onu).
Le parcours de la marche, décidée par Martelly, est évalué à 9 km, de l’aéroport international aux ruines du palais présidentiel.
À la sortie de l’aéroport international de la capitale, lundi après-midi 1er octobre 2012, une foule attendait Martelly qui a prêché la paix et la solidarité, le mercredi 26 septembre 2012, à la 67e assemblée générale ordinaire de l’Onu.
Paradoxalement, un policier national, Frandieu Jean-Pierre, membre de l’unité de sécurité rapprochée du président, a succombé, dans des circonstances non encore éclaircies, au cours de cette démonstration de Martelly, assimilée par ses conseillers politiques à une réponse au mouvement de protestations antigouvernementales, qui tend à prendre de l’ampleur depuis quelques semaines sur le territoire national.
Officiellement, Jean-Pierre, qui aurait eu un malaise cardiaque, serait mort d’une hémorragie cérébrale (cf. http://www.alterpresse.org/spip.php?article13492)
Pourquoi une telle marche et d’où vient la foule qui a accompagné Martelly ?
D’abord, « c’était une manifestation planifiée », estime Evans Paul, principal dirigeant du parti Konfederasyon inite demokratik (Kid), dans des déclarations faites à AlterPresse.
C’est « une honte, quelque chose de programmé, une réponse que le président a voulu donner aux lavalassiens qui ont manifesté le dimanche 30 septembre 2012 », soutient, pour sa part, le sénateur du Nord-Est, Jean Baptiste Bien –Aîmé.
En tout cas, il n’était pas « nécessaire de projeter cette attitude de confrontation », croit Paul qui se demande si « Martelly est en train de dire que le peuple a faim, ou qu’il n y a pas de chômage ? ».
Des fonctionnaires de l’administration publique ou de simples petits employés ont été mobilisés de force pour la circonstance, signale le sénateur Bien-Aimé, mentionnant la présence d’une catégorie de fonctionnaires du palais, d’employés de la municipalité de Delmas et du service métropolitain de collecte des résidus solides (Smcrs), lesquels bureaux publics auraient financé la participation de ces fonctionnaires dans la marche-manifestation.
Tout en reconnaissant le droit de citoyennes et citoyens à sortir pour aller manifester en faveur d’un président (Martelly en l’occurrence), Bien-Aîmé déplore l’utilisation des deniers de l’État pour soudoyer des gens en vue de supporter des manifestations pro gouvernementales.
À la fin du spectacle, offert par Martelly et son équipe, des participantes et des participants - qui réclamaient un montant de 1,000.00 gourdes (US $ 1.00 = 43.00 gourdes ; 1 euro = 58.00 gourdes aujourd’hui) , qui leur était promis - ont été écartés de l’aire du Champs-de-Mars (grande place publique à proximité des ruines du palais national) à l’aide de gaz lacrymogène lancé par la police nationale
Martelly n’a pas tiré leçon de la mouvance politique en Haïti…
Himler Rébu, conseiller au parti “grand rassemblement pour l’évolution d’Haïti (Greh), voit des retombées négatives pour le président, avec la marche à pied du 1er octobre 2012.
« Un gouvernement infiltré par des populistes, qui ont organisé cette manifestation du 1er octobre… C’est « le remplissage du verre d’eau », qui conduirait à un éventuel renversement de Martelly », présage Rébu.
Se référant à son expérience sur la scène politique en Haïti, l’ancien colonel des forces armées d’Haïti évoque une reproduction .« copier /coller » des modèles de manifestations, mis en branle par les généraux Henri Namphy (1988) et Prosper Avril (1990), ou mis en branle par Jean Bertrand Aristide (2004).
De telles manœuvres politiques rappellent la période de 2004, quand un mouvement populaire a contribué à la chute d’Aristide.
« Toutes velléités de minimiser les revendications de la population ne feront que réveiller son orgueil », avertit le dirigeant politique Evans Paul.
Au contraire, elles risquent d’attiser le cours des mouvements de revendications populaires dans divers départements géographiques du pays.
« Le peuple continuera à dire non à la mauvaise gestion gouvernementale, non au népotisme, non aux mauvaises conditions de vie », prédit le sénateur Jean-Baptiste Bien-Aîmé.
Une solution … ?
Le tempérament de Martelly est loin de lui offrir « une solution facile ».
Plus encore, « ses réactions ne sont pas intelligentes », déplore Himler Rébu qui s’est toujours déclaré proche de la vision politique de l’actuelle administration.
Ayant « cassé les ailes de certains de ses alliés, Martelly pourrait tomber du pouvoir avant 3 ans, s’il ne change pas radicalement de politique », indique Rébu qui préconise « le jeu du dialogue ».
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Evans Paul invite Martelly à communiquer avec le peuple « au lieu de faire la confrontation de rue (…) ».
Pour l’instant, la délivrance de « la marchandise (par la concrétisation des promesses de campagne) ou le désistement sont les deux options possibles ».
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« On a toujours le choix et le droit de démissionner », avance Paul. [srh rc apr 03/10/2012 1:30]