P-au-P, 12 juil. 2012 [AlterPresse] --- Plus d’une centaine d’Haïtiens ont été recensés victimes d’accidents de voiture ou de naufrages en mer durant le mois de juin 2012, alors que le gouvernement persiste à avancer des mesures de sécurité qui peinent à se concrétiser, selon les informations rassemblées par l’agence en ligne AlterPresse.
Deux accidents sont rapportés en juin dans la Grande Anse (Sud-Ouest), dont un ayant fait neuf disparus et 19 blessés. Au Cap Haïtien (Nord), 4 morts et 58 blessés sont comptés dans un autre accident.
Dans tous les cas, le chauffeur de l’autobus est mis en cause. Des poursuites sont annoncées. Des mesures de sécurité routière avancées.
Cependant, le 16 janvier 2012, ces mêmes mesures ont été proclamées par les responsables sans suivi, après un terrible accident survenu sur la route de Delmas (à l’angle de Delmas 33). Le président Michel Martelly et son premier ministre Laurent Lamothe ont, en tout cas, pris le soin de présenter leurs sympathies dans des communiqués.
De la parole aux actes
En mer, des Haïtiens continuent à périr.
En dépit des promesses de changement et du « décollage » proclamé par l’équipe au pouvoir, des Haïtiens continuent de risquer leur vie en mer, sur des embarcations souvent surchargées et non conformes à ces types de voyage.
Onze (11) personnes sont mortes, et 10 autres déclarées disparues le 12 juin 2012, lorsqu’une embarcation a coulé avec 28 émigrés haïtiens à son bord.
Quatre-vingt quatre (84) autres émigrés sont interceptés par les Américains le 21 juin. Voyageant à bord d’un cargo, ils se sont déclarés être des commerçants.
Cette situation survient, alors que le gouvernement de Laurent Lamothe parle de sécuriser la frontière pour combattre la contrebande et le trafic des personnes. Des lots de marchandises ont été saisis, des personnes arrêtées.
L’annonce a aussi été faite, en juin 2012, par le ministre de l’intérieur Thierry Mayard-Paul, de la mise sur pied d’une agence de sécurité nationale (Asn) comprenant une unité de police frontalière de 2,500 hommes. Des hommes, qui auraient pour mission de lutter contre la contrebande et le trafic de personnes.
Mais toutes ces mesures ont du mal à s’articuler à des actions concrètes, même si la police nationale a avancé des chiffres pour souligner une « diminution de l’insécurité ».
Mois de juin pas serein
Le 15 juin 2012, des agents de la mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah) tentent à trois (3) reprises de pénétrer l’enceinte de la faculté des sciences humaines de l’université d’État d’Haïti (Fasch/Ueh).
Cette action crée la panique au sein de la faculté et perturbe les activités.
La Minustah a pour mission, entre autres, d’assurer la stabilité et la sécurité dans le pays. Seulement, son intervention à la Fasch, dont les motifs demeurent mystérieux, a plutôt terrorisé.
Une station de radio (Radio Monopole) est incendiée dans le Sud du pays le mercredi 27 juin 2012 (cf. http://www.alterpresse.org/spip.php?article13044). L’acte serait d’origine criminelle, selon le propriétaire.
Alors que le premier ministre multiplie les sessions du conseil superieur de la police nationale (Cspn0, un autre policier meurt en juin, victime de personnes non identifiées. Sa mort vient allonger une liste de policiers tués depuis le début de 2012.
Des organisations ont, une fois de plus, fait des sorties dans la presse pour demander des garanties en faveur des personnes sinistrées dans le tremblement de terre du 12 janvier 2010, lesquelles sont un peu moins de 400 mille logeant encore dans des camps insalubres aux conditions effroyables et soumis à toutes sortes de violences, dont des expulsions forcées et des atrocités de genre.
Ces personnes sont particulièrement exposées au choléra qui a d’ailleurs fait 227 nouvelles contaminations dans le pays durant les premières semaines du mois de juin 2012, selon les organisations humanitaires.
Environnement : langue de bois ?
Le mois de juin 2012 a été consacré mois de l’environnement par le gouvernement Martelly/Lamothe. Mais, celui-ci n’a pas réussi à avoir le même discours que les mouvements sociaux haïtiens à la grande conférence Rio +20.
Soutenant « l’économie verte » à Rio, Martelly est allé à contre courant de ce que défendent des organisations, comme la plateforme de plaidoyer pour un développement alternatif (Papda), qui ont pris part au sommet des peuples.
Pour ces organisations, l’économie verte n’est qu’une nouvelle formule pour piller les ressources des pays du Sud et marchandiser l’environnement.
Le gouvernement n’a pas réussi, non plus, à parler le même langage que les populations des bidonvilles du Morne L’hôpital et de Jalousie qui ont manifesté dans les rues de la capitale le 25 juin 2012. Ces populations ont énergiquement protesté contre la mesure, prise par le ministère de l’environnement, de démolir leurs maisons.
Même si cette démarche a été présentée comme intégrée à une volonté de protéger Port-au-Prince, Martelly a dû vite se rétracter. Le président a demandé au ministre de l’environnement de surseoir à la démolition et de prioriser le dialogue.
Constitution amendée, plusieurs irrégularités plus tard…
Cette affaire n’est pas la seule, sur laquelle le président a du revenir sur sa décision. Le 19 juin 2012, il publie un arrêté ordonnant la reproduction de l’amendement du 9 mai 2011 de la Constitution. Cet arrêté élimine celui - qu’il avait pris le 3 juin 2011 - pour ne pas publier le fameux amendement.
Le texte, considéré comme non conforme à ce qui a véritablement été voté, aurait à présent, dans sa version définitive publiée, plusieurs irrégularités, notamment la suppression de l’article 237 concernant le choix du premier ministre et de l’article 297, pourtant anti-dictatoriale.
Résolue, l’équipe au pouvoir semble avoir mis le cap sur des élections municipales et sénatoriales partielles à la fin de l’année 2012.
La mise sur pied d’un conseil électoral permanent est annoncée pour suivre celle du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj).
L’installation du Cspj, le 3 juillet 2012, a été applaudie par les autorités nationales et internationales, malgré des suspicions de manipulation dans les choix de ses membres émanant du sénat.
Quoi qu’il en soit, la bonne humeur devrait se maintenir dans les rangs du président Michel Martelly, ancien chanteur. Un carnaval des fleurs est d’ailleurs prévu fin juillet 2012. Un tel événement "carnaval des fleurs", qui est apparu durant la dictature des Duvalier, n’avait pas été répété depuis 1986. [kft rc apr 12/07/2012 0:35]