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Radio Revue du Week-end

Haïti- Justice : Le Cspj doit faire preuve de leadership, souhaite l’ex-bâtonnier Gervais Charles

P-au-P, 9 juillet 2012 [AlterPresse] --- Considérant, comme un pas important (dans la bonne direction), l’installation (le mardi 3 juillet 2012) du conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj), l’ancien bâtonnier de l’ordre des avocats de Port-au-Prince, Me. Gervais Charles, appelle ce nouveau conseil à faire montre de leadership.

Me. Charles s’exprimait ainsi, le samedi 7 Juillet 2012, à l’émission « Moment vérité », diffusée sur la radio privée Signal F.M.

Le Cspj doit faire preuve d’un leadership éclairé et très vivace pour recouvrer le reste de ses attributions encore entre les mains du ministère de la justice et de la sécurité publique (Mjsp), souvaite l’homme de loi.

La cérémonie d’investiture des neuf (9) membres du conseil supérieur du pouvoir judiciaire a eu lieu, le mardi 3 juillet 2012, à l’école de la magistrature à Port-au-Prince, en présence du chef de l’État Joseph Michel Martelly, du premier ministre Laurent Salvador Lamothe et des présidents du sénat et de la chambre des députés, Dieuseul Simon Desras et Levaillant Louis Jeune.

Peu de temps après, plusieurs juristes ont dénoncé cette installation officielle du Cspj qui, selon eux, a été entachée d’irrégularités, parce que Martelly devait attendre la publication, dans le journal officiel "Le Moniteur" , de son arrêté présidentiel relatif à la nomination de ces 9 membres.

La publication immédiate de cet arrêté, le 3 juillet 2012, dans le moniteur quelques temps après la cérémonie de prestation de serment des membres du Cspj, a un peu calmé les esprits.

Les président et vice président du Cspj sont respectivement Anel Alexis Joseph et Antoine Norgaisse.

Suivant la loi du 13 novembre 2007, le Cspj est considéré comme l’organe d’administration, de contrôle, de discipline et de délibération du pouvoir judiciaire.

Gervais Charles déplore le fait que les parquets restent contrôlés par l’exécutif et le ministère de la justice en ce qui concerne la nomination des juges même si, précise t-il, le Cspj peut donner son avis sur cette question.

Cet avis qui n’a pas de valeur coercitive doit être éclairé par le leadership du Cspj afin de porter l’exécutif à en tenir compte, suggère t-il.

L’avocat dit compter énormément sur les deux membres de la société civile présents dans le Cspj pour faire passer le cahier des charges des barreaux et des autres acteurs concernés.

« Cela demande une implication de tous les moments parce que c’est une nouvelle institution [le Cspj] qui doit être bien encadrée dès ses débuts », conseille t-il.

Le député Arnel Bélizaire dénonce certains parlementaires

Intervenant à cette même émission, le député Arnel Bélizaire demande à certains de ses collègues parlementaires mécontents de se ressaisir par rapport à l’installation du Cspj.

« Le pouvoir du ministre [de la justice] a diminué considérablement. Mais, les grands perdants, ce sont les parlementaires qui comptent toujours sur le système judiciaire pour remporter les élections », explique Bélizaire.

Il critique les pourparlers, entrepris en cachette, dans le passé, par certains parlementaires avec le ministère de la justice, en vue de nommer des juges dans des circonscriptions qui ne sont pas les leurs.

Selon lui, l’installation du Cspj permettra au peuple haïtien de respirer un souffle nouveau.

« Nous souhaitons que les membres du Cspj trouvent beaucoup de supports des parlementaires, de sorte qu’ils trouvent de l’argent pour pouvoir bien fonctionner », réclame le député qui appelle à la formation et au respect des juges.

Dans le cadre de la fonction publique, le député Bélizaire recommande aux autorités judiciaires de recruter des juges suivant les normes, tout en espérant que cela contribuera, dans dix à vingt ans, à l’amélioration du système judiciaire en Haïti.

Donner des moyens au Cspj

« Le Cspj doit avoir les moyens de sa politique », notamment en termes de capacité de dissuasion, préconise, de son côté, le politologue, Jean Baptiste Remarais, à l’émission « Pi lwen, Pi fon » (Plus loin, plus profond), diffusée sur la radio privée Vision 2000, le dimanche 8 juillet 2012.

« Le pouvoir doit pouvoir arrêter le pouvoir », cite t-il, entre autres, faisant référence à « l’esprit des lois », œuvre majeure de Montesquieu, parue en 1758.

« Toute puissance, qui n’est pas dissuasive, n’est pas une puissance », déclare Remarais.

Au sein du Cspj, qui va affirmer un leadership sérieux pour permettre aux magistrats de comprendre la nécessité de cette police [Cspj] qui les coiffe ?, s’interroge le politologue.

Mise en garde

L’installation du Cspj, qui est une avancée, n’empêche pas que les membres de ce conseil soient à la solde d’un autre pouvoi, pense le docteur Junot Félix, prenant l’exemple du parlement qui, dans la réalité, parait dépendant de l’exécutif.

« Ce n’est pas le fait de créer le Cspj et de nommer ses membres, qui va le rendre indépendant », fait-il remarquer.

Le Cspj est une occasion pour résoudre les problèmes caractéristiques du système judiciaire haïtien, avance le consultant en développement de l’éducation, Pierre Délima, qui participait à l’émission « Pi lwen, Pi fon ».

Toutefois, cela ne donne pas une garantie totale de justice, nuance t-il.

Délima estime important d’analyser les mécanismes d’opérationnalisation du Cspj, notamment ses principes, ses règlements en vue de comprendre son éventuel fonctionnement. [emb kft rc apr 09/07/2012 11:35]