Correspondance Mergenat Exalus
Gonaïves, 17 mai 2012 [AlterPresse] --- Principale activité économique dans certaines régions de l’Artibonite, la production du sel marin connait un certain déclin, malmené par les conséquences des cyclones de 2008 et la concurrence de la République Dominicaine, observe Alterpresse.
Le sel est une source de revenus pour des milliers de chefs de familles dans l’Artibonite. En 2009, il existait 2 850 producteurs de sel dans le pays. Et c’est dans l’Artibonite que 70% du sel national est produit.
Des saliniers aux Gonaïves, interrogés par AlterPresse, déclarent que la production du sel donne vraiment du souci depuis plus de 4 ans.
Selon eux, la majorité des bassins de sel ont été obstrués par des masses de boues sous l’effet des cyclones Hanna et Ike en 2008.
N’ayant pas de moyens techniques et économiques pour nettoyer leurs bassins, certains producteurs ont du abandonner la filière, ce qui a causé une baisse de la production, confient-ils à AlterPresse. Il faut en moyenne 750 dollars américains pour réhabiliter un bassin de sel.
Pour sa part, Lemike Joseph, un jeune producteur, se plaint du ralentissement de la vente du sel local au profit du sel importé dominicain qui semble avoir une meilleure cote auprès des consommateurs locaux. Les Gonaïviens critiquent le sel local qui selon eux contient des impuretés et de la boue, déplore Lemike Joseph.
A Anse-Rouge dans le haut Artibonite, le sel est produit dans toutes les zones côtières, précisément dans les localités de Coridon et Magasin se trouvant respectivement dans la première et deuxième section communale.
Les producteurs de cette région eux aussi font face à des difficultés, selon le maire de la commune, Honorat Celareste.
En saison pluvieuse, les eaux de la rivière Colombier et celles de la ravine Etang se déversent dans les bassins de production et détruisent la récolte de sel. Une situation déplorée par le maire de la commune, qui lance un appel aux responsables du Ministère des travaux publics transport et communication (Mtptc) en vue de corriger la situation.
Le sel est la principale activité des habitants d’Anse Rouge, après la pêche, déclare-t-il à AlterPresse.
Ce tableau n’est pas différent à Grande Saline, dans le bas Artibonite, à en croire le maire de la commune, Jean-Robert Délivrance.
Durant la saison des pluies, le fleuve Artibonite sort de son lit et empêche la production. Ajouté à cela, le mauvais état des routes empêche aux producteurs de Grande Saline de vendre leur sel dans d’autres marchés de l’Artibonite, explique le maire Jean Robert Délivrance.
Il souhaite que l’Etat et des organisations non gouvernementales viennent en appui aux producteurs afin d’améliorer la production du sel dans la commune.
En plus d’un manque d’encadrement et d’organisation des acteurs de ce secteur, le sel marin de l’Artibonite souffre d’un problème d’iode.
Contacté par AlterPresse, le président de la chambre de commerce et d’industrie de l‘Artibonite, Nahoume Dorvil, pense que les autorités haïtiennes devraient profiter de la filière du sel pour résoudre les problèmes de carence en iode rencontrés fréquemment au sein de la population,.
L’iode est un élément très important pour l’organisme humain. Une carence en iode peut occasionner l’avortement et des fausses couches chez les femmes enceintes, le crétinisme neurologique, le retard de croissance et le retard mental chez les enfants ainsi que le goitre chez les adultes, rappelle Nahoume.
Quoiqu’archaïque, la technique de production du sel solaire ou marin dans l’Artibonite est simple selon Clervil Vilius, un producteur des Gonaïves interrogé par AlterPresse.
Selon lui, dans les marais salants, on fait creuser un bassin de forme carrée de cinq à six pieds de profondeur dans lequel on fait pénétrer l’eau de la mer à l’aide d’une pompe électrique ou un tuyau.
L’eau étant reposée et chauffée grâce à l’énergie solaire, au bout d’une vingtaine de jours, elle commence à s’évaporer et se cristalliser. Certaines fois les producteurs y ajoutent des branches d’arbre qui favorisent une cristallisation plus rapide. Les saliniers attendent jusqu’à cinq à six mois pour récolter le sel.
En décembre dernier, une campagne pour l’iodation du sel en Haïti a été lancée lors d’un atelier de travail réalisé au local de la délégation départementale sur la filière du sel dans l’Artibonite.
Différents acteurs intervenant dans cette filière et des organismes comme le Ministère de la santé publique et de la population (Mspp), le Fonds des nations unies pour l’enfance (Unicef) et le Fonds d’assistance économique et sociale (Faes) avaient pris part à cette activité.
Le Faes s’est engagé à assurer le suivi de cet atelier pour lequel les producteurs de l’Artibonite attendent les retombées positives.
En 2005, ces mêmes acteurs avaient procédé à l’inauguration d’une usine à Port-au-Prince pour traiter le sel en provenance de l’Artibonite notamment. L’idée était de pouvoir répondre aux besoins en sel du pays estimés à 45 mille tonnes par an. Mais l’usine ne traite que mille à mille cinq cent tonnes de sel par année. [me kft gp apr 17/05/2012 06:00]