P-au-P, 20 avril 2012 [AlterPresse] --- Après le vote du projet de budget soumis par l’exécutif à la chambre des députés, le sénat dispose de 20 jours pour se prononcer, alors qu’une commission sénatoriale sur les questions de finances dit relever plusieurs anomalies, selon les informations obtenues par l’agence en ligne AlterPresse.
La loi de finances rectificative, qui été récemment votée par la chambre des députés et soumise officiellement au sénat le lundi 16 avril 2012, concerne un montant de 106 milliards de gourdes (US $ 1.00 = 42.00 gourdes ; 1 euro = 61.00 gourdes aujourd’hui).
Le mardi 17 avril, l’Initiative de la société civile(Isc) a organisé une rencontre avec les deux branches du parlement autour de la question du fonds national de l’éducation, des dettes du programme Petrocaribe et de la loi de finances 2011-2012. La rencontre entre dans le cadre d’un projet de l’Isc, relatif au suivi de l’élaboration et de l’exécution du budget national.
A cette occasion, le sénateur Jocelerme Privert, responsable de la commission finances, a délivré sa lecture du budget national en mettant en avant certaines critiques.
« Le gouvernement démissionnaire se retrouve avec cinq mois de dépenses sans autorisation. La plupart des ministères, selon le dernier tableau des opérations financières de l’État, ont déjà dépensé plus de 50% de l’enveloppe qui leur était allouée », explique Privert.
« Ce budget a été déposé la veille même de la démission du premier Gary Conille [intervenue le 24 février 2012]. Dans ce cas, la nature démissionnaire du gouvernement pose problème, parce que les ministres devraient se présenter au parlement pour défendre leur budget. Le parlement pourrait ainsi engager un dialogue avec les ministres qui auront la charge de gérer les portefeuilles alloués à leur ministère », ajoute Privert.
La chambre des députés n’a pas introduit de grands amendements dans le projet de budget déposé par l’exécutif à la fin du mois de février 2012. Cependant, les députés ont décidé de désaffecter 4 cent 21 millions de gourdes de certains ministères et de les transférer (pour l’essentiel) au parlement, souligne Privert.
Parmi ces fonds désaffectés, le parlement a reçu entre 2 cent 50 millions à 3 cent millions de gourdes, après cette modification, et le reste a été réparti entre différents autres ministères.
« Le budget devait être voté avant la loi créant le fonds national de l’éducation, parce que cette loi est appelée à financer certaines provisions budgétaires contenues dans ce document, ce qui n’a pas été fait », relève le sénateur Privert.
Le fonds national de l’éducation a été créé par le président Joseph Michel Martelly pour soutenir son programme d’éducation universelle gratuite, mais sans loi-cadre du parlement.
« Le pays a besoin d’un sénat et d’une chambre des députés, qui savent faire preuve de vigilance et non de laxisme, de rigueur et non de légèreté, dans le traitement des grands dossiers de l’État. Car, quelles que soient les bonnes intentions, il n’y a pas de gestion sans contrôle », considère le secrétaire exécutif de l’Isc, Rosny Desroches, qui forme le vœu d’une coopération étroite entre la société civile et le parlement.
L’une des remarques de l’Isc, autour du projet de budget, c’est le manque de rationalité.
« La trame principale de la procédure est faite de négociation, de compromis, de jeu d’influence. Ce type de budget est confronté à de sérieux problèmes de rationalité », indique l’organisation dans un document d’analyse.
Un « budget n’est pas seulement une compilation de chiffres, mais c’est la traduction des objectifs économiques, sociaux et financiers. En ce sens, ce document devrait concerner non seulement le pouvoir exécutif et le judiciaire, mais aussi les citoyennes et citoyens, parce que le budget doit refléter les aspirations politiques de la population haïtienne », signale le sénateur Jocelerme Privert.
Quoi qu’il en soit, la commission de finances au sénat salue les nouvelles mesures fiscales envisagées par les autorités dans le cadre du projet-loi de finances 2011-2012.
Dans l’objectif d’augmenter les recettes fiscales en corrigeant certains excès en matière d’environnement, ces mesures viseraient essentiellement la protection de l’environnement, par la détaxation du gaz propane, l’augmentation des tarifs sur le fer, le prélèvement de redevances dans les activités de forage de puits.
Des dispositions fiscales devraient également toucher les camions de cinq tonnes qui exploitent les carrières de sable dans les mornes, activité nocive pour l’environnement, de même que les personnes qui consomment de l’alcool.
Le sénat dispose d’un délai de vingt jours pour se prononcer sur les corrections apportées par la chambre des députés dans le projet-loi de finances 2011-2012.
Pour Jocelerme Privert, ce délai est court.
Dans le cas où le sénat décide d’introduire des amendements au document, il faudra retourner celui-ci à la chambre des députés pour un second vote, ce qui pourrait retarder le processus. [jep kft rc apr 20/04/2012 8:15]