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Affaire Bautista

Haïti- Rép. Dominicaine : Un avilissement

Indignation dans des milieux politiques - Martelly et Manigat nient

P-au-P, 3 avril 2012 [AlterPresse] — Le scandale de corruption dans lequel seraient impliqués le chef de l’Etat, Michel Joseph Martelly, et son ancienne concurrente aux élections de 2010, Mirlande Manigat, est un avilissement et une honte pour la classe politique haïtienne, selon des personnages politiques interviewés par AlterPresse.

Le coordonnateur général de l’Organisation du peuple en lutte (Opl), Sauveur Pierre Etienne affirme que c’est avilissant et scandaleux d’entendre que des anciens candidats haïtiens à la présidence auraient cherché la bénédiction des autorités et des hommes d’affaires dominicains en acceptant des financements comme pots de vin.

Une ténébreuse affaire

Martelly aurait reçu directement ou indirectement du sénateur dominicain Félix Bautista, propriétaire de plusieurs entreprises, et proche du président dominicain Leonel Fernandez, un total de plus de 2, 5 millions de dollars US, révèle, dans programme televisé la journaliste vedette Nuria Piera.

Les transactions auraient commencé depuis la campagne électorale présidentielle de 2010 et se seraient poursuivies après l’élection de Martelly à la présidence.

L’ancienne candidate Mirlande Manigat, malheureuse à ces élections, aurait, pour sa part, reçu 250.000 dollars.

La présidence a balayé d’un revers de main ces révélations qu’elle met sur le compte d’ « une vaste campagne d’intoxication de l’opinion publique visant à salir l’image » de Martelly.

De son coté Mirlande Manigat a affirmé son indignation. Manigat tout en brandissant son « intégrité » indique ne pas pouvoir répondre des autres membres de son équipe de campagne.

Ce scandale de corruption arrive une semaine seulement après le premier voyage officiel de Michel Martelly en République Dominicaine, au cours duquel l’ancien chanteur a été décoré par le président Leonel Fernandez.

Ce nouveau scandale, un « avilissement »

« Notre système politique repose sur deux piliers : l’impunité et la corruption », dénonce Sauveur Pierre Etienne déclarant que « nous n’avons pas un système politique fonctionnel et des lois sur les financements des partis politiques ».

« Si c’était dans une société fonctionnelle, la classe politique qui est éclaboussée dans cette affaire, aurait eu des comptes à rendre à la population », croit-il.

« Il y a une crise institutionnelle et morale dans le pays », souligne-t-il.

Le coordonnateur de l’OPL plaide pour la mise en branle d’un processus de normalisation institutionnelle en vue d’éviter la répétition de ce genre de scandales.

Le leader de l’Opl suggère au parlement la mise en place d’une commission d’enquête efficace pour faire le jour sur ce dossier en critiquant du même coup l’incapacité du sénat à traiter du dossier de la multinationalité et la pluri-identité du chef de l’Etat.

Sceptique, Etienne pense que les autorités haïtiennes n’auront ni la capacité et ni la volonté de mener une enquête sur cette question.

Le principal dirigeant de la Confédération unité démocratique (Kid), Evans Paul considère, pour sa part, que ce scandale est une honte qui affectera les deux pays plus particulièrement Haïti.

« Les autorités compétentes doivent mener une enquête pour fixer les responsabilités dans cette affaire et traduire en justice les coupables s’il y a lieu »,selon Paul, qui souhaite la mise en place d’une loi qui exige de la transparence au niveau du financement des campagnes des partis politiques en Haïti.

Pour le leader du Kid, ce scandale aurait comme répercussions sur le pays d’empêcher le déblocage de certaines aides et aussi de ternir davantage l’image du chef de l’Etat qui fait déjà face à une enquête sur sa nationalité étrangère présumée.

Une enquête minutieuse

La journaliste Nuria Piera a d’abord reçu les documents de manière anonyme et ce qui en ressort n’est que le résultat d’un minutieux travail de vérification, selon un article de Jean Michel Carroit publié par le quotidien haïtien Le Nouvelliste.

Les documents révèlent des montants, reçus à plusieurs reprises, notamment par Martelly, en provenance d’entreprises appartenant à Bautista, pendant la campagne et après.

Sur un ensemble de 500 millions de dollars US de contrats de reconstruction après le séisme du 12 janvier 2010, 338 millions ont été accordés à des compagnies appartenant à Felix Bautista et ses affiliés, dans des conditions jugées irrégulières, selon une commission d’enquête mise en place par le premier ministre (démissionnaire depuis le 24 février 2012) Garry Conille.

Ces contrats ont été signés durant la période d’urgence qui a suivi le séisme de 2010 et sous le gouvernement de Jean Max Bellerive.

« Les vices de forme signalés dans ledit document sont ridicules », a réagi, cependant, Jean Max Bellerive au sujet du rapport de la commission d’audit.

Garry Conille a démissionné une semaine après avoir demandé cette enquête. Conille subissait des pressions au sein de son propre cabinet. [emb kft gp apr 03/ 04/2012 8 :15]

Lire les documents présentés par Nuria Piera sur Felix Bautista à l’adresse www.acento.com.do