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Guadeloupe : La mobilisation du LKP repart

Point de vue

Par Danik I. Zandwonis

Pointe-à-Pitre, 31 mars 2012 [CCN/AlterPresse] --- Des milliers de Guadeloupéens ont arpenté des heures durant le macadam brulant des rues de Pointe à Pitre, mardi 27 mars à l’appel du LKP (Lyannaj Kont Pwofitasyon / collectif d’entités associatives, politiques et culturelles) et de plus d’une dizaine d’organisations syndicales. Rien de vraiment surprenant, car depuis 2009, la Guadeloupe a connu des dizaines de manifs de ce type. On pourrait même penser qu’une manif de 10.000 personnes c’est de la simple routine.

Il faut en effet regarder plus loin et se demander, pourquoi 3 ans après les historiques accords Bino ( non respectés) , alors que chacun sait , comme l’a dit Elie Domota, lors d’un meeting, qu’on ne peut plus se contenter de manifester pour la baisse du prix des carburants ou des produits de première nécessité.
Pourquoi une manif d’une telle importance ?

Tous les guadeloupéens, qui ont vécu, le cœur plein d’espérance, le mouvement de janvier 2009, et qui depuis ont assisté impuissants , à la valse des étiquettes, à une remontée spectaculaire des prix, savent par expérience, qu’il faut désormais se battre principalement et uniquement contre le système colonial français et ses relais locaux.

Mais, avant d’aller plus avant dans l’analyse, Il faut quand même le souligner , la manif du 27 mars une fois de plus a démontré que LKP, les forces sociales , étaient encore capables de mobiliser plus 10.000 personnes : sans barrages, sans « débrayages » dans les entreprises, sans violence, sans l’aide des medias officiels, ( tous trop occupés par les présidentielles françaises ! ) et ce en dépit d’un déploiement impressionnant de flics en tenue et en civil. C’est donc d’abord une victoire de la remobilisation.
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Pourtant, en 2012, la capacité de(re) mobiliser les masses, sous la bannière des revendications salariales, pour le respect de tel ou tel accord, est certes un combat nécessaire de l’immédiat, pour la survie, mais absolument insuffisant pour mettre un terme à la domination coloniale et à la pwofitasyon.

D’autres Guadeloupéens, souvent mystifiés, abusés par les médias officiels, peuvent encore croire qu’un éventuel changement à la tête de l’État français, pourrait être la panacée, mais très vite, ils se rendront compte, que Sarkozy Hollande –Mélenchon
n’offrent aucune perspective de libération au peuple guadeloupéen. C’est normal !

Exemple édifiant de ces gadgets politiques : la suppression du mot « race » dans la constitution française annoncé par Hollande et relayé par Lurel. En quoi cela nous concerne t il ? Cela suffirait à éradiquer le racisme anti-nègre, anti-arabe.

En réalité, les manifs revendicatives sont nécessaires mais trop souvent insuffisantes, mais elles ne sont pas inutiles. Les manifs LKP et les discours qui les accompagnent, sont somme toute des éveilleurs de conscience.

Depuis 3 ans au moins, la Guadeloupe et les Guadeloupéens, sont en pleine mutation. On le perçoit encore confusément, quelque chose se prépare dans ce pays.

Mais quoi ?

Ce peuple cari guadeloupéen, dominé, franco -européanisé, déculturé, colonisé, si versatile et qui parfois se refuse à admettre sa condition et va jusqu’à faire semblant de croire qu’il est français : ce peuple est en colère !

Mais c’est une colère froide rentrée, dissimulée, souvent presque imperceptible, mais elle est la. Tapie dans l’ombre.

Elle attend ce déclencheur, qui viendra. Car la « révolte » de 2009, n’aura été que le prélude à un mouvement plus vaste, peut être plus violent qui ne surprendra
Que ceux qui se voilent la face, pour ne pas voir, ceux qui se bouchent les oreilles, pour ne pas entendre.

Mais nous persistons à dire que la colère gronde. L’arrogance outrancière des colonialistes français, l’insouciance et l’imprévoyance de ces politiciens de moins en moins crédibles. La violence d’une fraction de jeunes desperados, la pression constante des pwofitan sur les plus démunis, sont les marqueurs d’un malaise qui éclatera au grand jour.

Cela pourrait, comme à La Réunion, déboucher sur des émeutes de consommation : on casse des vitrines pour se servir… et après ?

La Guadeloupe de la colère ne doit pas être celle la. Il faut donc continuer à mobiliser, à conscientiser et à se préparer à changer la nature profonde du système actuel.

Les peuples Tunisiens, Egyptiens qui ont accompli une partie de leur révolution populaire se sont largement inspirés du modèle LKP. Mais, ces peuples et nations s’étaient déjà débarrassés de leur tutelle coloniale. Pas nous.

Les patriotes guadeloupéens, les plus conscients, fidèles aux idéaux de leurs pères qui se sont battus à mort contre le système esclavagiste, doivent aujourd’hui accepter leur tache historique : combattre au quotidien le système colonial actuel jusqu’à son éradication totale. L’indépendance est à ce prix.
4 jours après l’élection du nouveau président des français, le 10 mai prochain, LKP
Appelle à une puissante manifestation, à une grève générale illimitée. Ce ne sera pas peut être pas (encore !) le grand jour, mais… [ccn apr 31/03/2012 10 :25]