P-au-P., 16 mars. 04 [AlterPresse] --- Haïti attend la publication officielle sous peu de la liste des membres du nouveau gouvernement que doit diriger le Premier Ministre Gérard Latortue qui a pris ses fonctions le 12 mars dernier à Port-au-Prince.
Les Haitiens avaient ce 16 mars encore les oreilles collées à leurs récepteurs de radio dans l’attente d’informations sur les personnalités qui doivent intégrer ce nouveau gouvernement.
Latortue avait promis pour le 15 mars la composition de son gouvernement, mais il a dû
prolonger le délai afin de mettre la dernière main à la constitution de son équipe. On s’attendait ce soir (16 mars) à la publication de la liste complète des membres du cabinet qui serait composé de 13 ministres et 6 secrétaires d’Etat. L’investiture est prévue pour ce 17 mars dans l’après-midi.
Une réunion de travail a eu lieu au palais présidentiel ce 16 mars dans l’après-midi entre Latortue et le président provisoire Boniface Alexandre afin de s’entendre définitivement sur les choix qui ont été faits.
Latortue a travaillé sans arrêt depuis sa nomination à la sélection de titulaires des ministères sur la base de critères fondamentaux établis par le Conseil des Sages, dont l’honnêteté, la compétence l’engagement en faveur de la démocratie.
La population haitienne paraissait attendre la promulgation du gouvernement de Latortue comme véritable signe d’un retour à la normale. Malgré la reprise de bon nombre d’activités économiques, les écoles demeuraient encore paralysées ce 16 mars. Des
parents ont exprimé des inquiétudes quant à la précarité de la sécurité à la capitale.
Cette situation de fragile début de normalisation pourrrait être affectée par la visite depuis le 15 mars en Jamaïque de l’ex président Jean Bertrand Aristide. Tandis qu’Aristide
Arrivait à Washington, Latortue qui prenait possession des lieux à la Villa d’Accueil (siège de la Primature, périphérie est de la capitale), a annoncé le gel des relations diplomatiques avec Jamaïque, pour protester contre la venue d’Aristide dans ce pays, distant de 180 kilomètres avec Haiti.
Malgré certaines réserves, la décision de Latortue a été généralement bien acceptée en Haïti. Peu avant l’annonce du gel des relations entre les deux pays, dans une déclaration publique transmise a AlterPresse, les organisations haïtiennes membres de l’Assemblée des Peuples de la Caraibe avaient demandé à leurs partenaires de la Caraïbe de faire pression sur leurs gouvernements respectifs « pour qu’ils comprennent que cette présence (d’Aristide en Jamiaque) représente une menace certaine pour le fragile processus de transition politique à peine entamé ».
« Les organisations de la société civile dans les pays frères devraient travailler à éclairer l’opinion publique et leurs dirigeants politiques sur le caractère du régime déchu de Jean Bertrand Aristide qui, en appliquant servilement les politiques dictées par Washington et les Institutions Financières Internationales, a mis notre pays à genoux en détruisant une grande partie de nos capacités productives et de nos Institutions », ont estimé ces organisations.
« C’est la position qui convient », a déclaré Gerard Pierre Charles de la Convergence Démocratique. Etatnt donné la proximité entre les deux pays, Pierre Charles n’a pas du tout digéré la décision du Premier Ministre jamaicain et s’est demandé si cétait vraiment « un geste humanitaire ».
Accompagné par son épouse Mildred Trouillot, l’ex chef d’état devrait officiellement se réunir en Jamaïque avec ses 2 filles, qui ont été envoyées à New York, une semaine
avant la chute d’Aristide le 29 février.
Aux Gonaives (nord), où a commencé en septembre dernier une agitation systématique contre le régime d’Aristide et l’insurrection armée de février, la population a manifesté dans la soirée du 16 février contre la présence d’Aristide en Jamaïque.
Cependant, Jean Robert Simonise, expert haitien en relation internationale, a estimé, sur les ondes de la station privée Radio Métropole que la décision de Latortue pourrait constituer une erreur stratégique. Simonise n’a pas considéré correct le fait d’ « initier son administration par une crise diplomatique ».
Suite à la décision de Latortue, la Jamaïque a dejà annoncé ce 16 février qu’elle ne reconnaît pas les nouvelles autorités en place en Haïti.
24 heures auparavant, l’industriel haitien Robert Tippenhaeur, Consul honoraire de Jamaïque en Haïti a démissionné de ses fonctions en protestation contre ce qu’il considère comme « une gifle » donnée au pays par la Jamaique. [gp apr 16/03/2004 20:00]