P-au-P., 12 mars. 04 [AlterPresse] --- L’annonce d’une prochaine visite à la Jamaïque du Président déchu haïtien, Jean Bertrand Aristide, à l’invitation du Premier Ministre Percival Patterson provoque des réactions à la Capitale haïtienne.
Le Premier Ministre désigné d’Haïti, Gérard Latortue, a qualifié d’ « inamicale » l’attitude de la Jamaïque. Il a affirmé s’être entretenu le 11 mars autour du sujet avec le Premier Ministre jamaïcain à qui il a signifié que c’était « un geste inamical ».
Gérard Latortue, qui intervenait sur les ondes de radio Métropole, a cependant indiqué que Percival Patterson en a profité pour apporter son appui au processus de reconstruction du pays. Selon Latortue, Percival parle maintenant de « Mr Aristide » qualifié d’« ancien Président », qui sera reçu à Kingston à titre « strictement humanitaire ».
Micha Gaillard, un des dirigeants de la Plateforme Démocratique, a estimé que la présence de Jean Bertrand Aristide dans la région est susceptible de compromettre la stabilité du pays. Gaillard a souligné que les partisans du président déchu ont auparavant annoncé qu’ils allaient rencontrer Aristide à Jamaïque.
Micha Gaillard a appelé le nouveau Premier Ministre haïtien à avoir une position ferme face à son homologue jamaïcain sur la question. Il a ajouté que les responsables haïtiens doivent menacer de faire retrait d’Haïti de la Communauté Economique de la Caraïbe (CARICOM).
Pour sa part, Evans Paul, un autre dirigeant de la Plateforme Démocratique, a tenté de calmer le jeu. Pour Evans Paul, le problème demeure les partisans armés et violents de l’ancien président, avec qui il a gardé contact. Paul a mis l’accent sur la nécessité d’activer un processus judiciaire contre Aristide.
Dans la livraison du 10 mars du quotidien francais Le Monde, un ancien partisan d’Aristide, le sénateur et ancien chef de la police, Dany Toussaint, a fait savoir que l’ancien président maintient un lien actif avec ses bandes armées.
Le journal a indiqué que d’après les informations de Dany Toussaint, confirmées par un important responsable de Lavalas, Jean-Bertrand Aristide maintient depuis Bangui un fréquent contact téléphonique avec Hermione Léonard et avec d’autres proches restés à Port-au-Prince, qui lui servent de courroie de transmission avec les « chimères ».
Dans la capitale, il y a 126 « bases » de « chimères », regroupant environ 500 « soldats », a indiqué Dany Toussaint en précisant que les plus dangereux, moins de 200, sont bien armés et entraînés.
Lors d’un discours prononcé ce 12 mars à la Primature pour annoncer avoir remis la démission de son cabinet au Président Alexandre Boniface, le Premier Ministre lavalas sortant, Yvon Neptune, s’est prononcé en faveur du désarmement des civils armés. Il a promis de collaborer avec les nouveaux responsables pour récupérer les armes illégales. « Le désarmement est un passage obligé pour le renforcement de la démocratie en Haïti », a-t-il déclaré.
L’ancien chef de gouvernement lavalas a affirmé déplorer les débordements enregistrés après le départ de Jean Bertrand Aristide. Yvon Neptune a souhaité que les responsables de l’Etat fixeront sous peu les responsabilités dans les actes de pillage orchestrés un peu partout dans le pays.
Neptune a fait part de son intention de rester en Haïti malgré des « menaces » contre sa personne. Il a fait savoir, entre autres, que les conditions de sécurité des membres de son cabinet et de ses proches sont très précaires.
Le 5 mars dernier, le Groupe des 184 a annoncé avoir commencé à entreprendre des démarches pour obtenir l’arrestation du Premier Ministre sortant pour des crimes et corruption. L’industriel Charles Henry Baker, dirigeant de ce Groupe, a fait savoir que des avocats travaillaient sur la possibilité de lancer un mandat contre Neptune.
Le dirigeant du Groupe des 184 a insisté sur les derniers événements violents qui se sont produits à Saint-Marc (nord), à partir du 9 février, quand plusieurs personnes ont été tuées, suite à une visite de Neptune durant une opération de la police accompagnée de civils armés.
Les représailles contre les opposants de l’ancien régime avaient donné lieu à un véritable massacre, selon la Coalition Nationale pour les Droits des Haitiens (NCHR), qui a établi un bilan partiel de d’une cinquantaine de morts et disparus.
3 personnes sont déjà détenues en rapport avec les évenements de Saint-Marc, a indiqué la NCHR. Il s’agit de Dauphin ROLAND (alias Black Ronald), Harmony RONALD et Mathieu RAPHAà‹L, tous membres de l’organisation pro-lavalas « Bale Wouze ».
La NCHR a souhaité, entre autres, que l’ancien Premier Ministre Neptune et l’ex-Député Amanus Mayette, dénoncés par la clameur publiquesoient mis à la disposition de la justice répressive pour que toute la lumière soit faite sur ce massacre. [rv gp apr 12/03/2004 15:30]