Par Roody Edmé
Spécial pour AlterPresse
Les masques sont tombés plus vite qu’on ne le pensait. Le jeu cynique du pouvoir a flingué politiquement un cadre qui hier encore annonçait l’année 2012 comme celle de toutes les opportunités. Il était loin de penser que c’était celle de son chant du cygne. Comme un avant centre d’une équipe de foot, esseulé, ne recevant plus de passe de ses coéquipiers. Garry Conille, pourtant homme de compromis, du moins c’est l’impression qu’il laissait apparaître, n’en pouvait plus sous la charpe de plomb et l’isolement manifeste qui le momifiait vivant.
Garry Conille était un homme triste derrière ses lunettes double foyer, qui cachait mal son spleen. Il supportait tous les malaises du « couple » sans piper mot, en gardant une dignité qui finirait par fondre comme du beurre sous un soleil de Carême.
L’homme n’était plus que l’ombre de lui-même et sa récente visite à Washington qui visait à envoyer le message de la belle harmonie entre les différents pouvoirs et, qui semblait témoigner de la confiance du Pouvoir en sa personne a fait long feu. Les observateurs du jeu politique haïtien sont coutumiers de ce jeu de massacre, de la difficulté de cohabitation qui finit toujours par la mise à mort politique de citoyens compétents et soucieux de servir au plus haut niveau.
Ils sont souvent lapidés par des rumeurs lancinantes, laminés par les querelles de cabinet, puis livrés tout crus à l’appétit vengeur des « ogres » qui les ont fait « rois ». Tous ont connu le sort cruel d’Iphigénie qu’ils aient été proches du soleil noir du pouvoir comme Eric Pierre ou Daniel Rouzier ; qu’ils aient eu un temps le gouvernail comme Michelle Pierre-Louis, la même amère déception finit par emporter ces citoyens qui n’ont jamais eu l’opportunité de donner leur pleine mesure et de servir ce pays comme il se doit, comme il a tant besoin.
Viendra un temps où il faudra se pencher sur les difficultés de cohabitation de notre République issue de la Constitution de 1987. Le poste de Premier Ministre est un siège éjectable qui souffre d’un défaut de fabrique…le siège part à tout moment et la manette est d’une sensibilité dramatique.
La Chefferie haïtienne est-elle soluble dans un pouvoir bicéphale type quatrième république ?
Ce soir du 24 Février, le Président est venu nous …rassurer. Ce n’était pourtant pas si mal parti depuis la réussite du pari des Cayes. Mais les « Carnets noirs de la République » ne sont pas à leur dernier chapitre.
On va se consulter pour choisir un premier Ministre, se chamailler autour des ministrables…à moins que ! On va finalement dénicher l’oiseau rare et assister aux « nuits voraces » de déclaration solennel de politique générale devant le parlement. On en compte une bonne douzaine de ces « politiques générales ».
Ceux qui détiennent les bonnes manettes au Parlement et dans l’Exécutif vont comme au Casino faire leur jeu.
Et le pays reste prostré comme fasciné par le serpent mythique et saisonnier de la Crise. C’est l’époque bientôt pour les chrétiens d’un long chemin de croix, le peuple haïtien dans son ensemble n’a pas fini de gravir son « Golgotha ».
Mais quand donc viendra la « Pâque » ?