P-au-P, 6 févr. 2012 [AlterPresse] --- « … À n’importe quel moment, il peut y avoir du dérapage, nous sommes dans une situation d’inquiétude et d’incertitude… », a déclaré le sénateur du Plateau Central (Nord-Est) Francisco Delacrúz, lors de sa participation à une émission de débats politiques "Ranmase" sur la station de radio privée (Caraïbes FM) de la capitale dans la matinée du samedi 4 février 2012.
Cette déclaration arrive à un moment, où les tensions augmentent dans les artères du pouvoir exécutif, entre la présidence et le parlement, où la pression ne cesse de croitre un peu partout dans la capitale et dans certaines zones du pays pour des raisons diverses.
La suspicion de la multiple nationalité du président de la république Joseph Michel Martelly, annoncée dans les médias par le sénateur du Nord Moïse Jean Charles, ne manque pas de troubler la scène politique haïtienne.
Le président jouirait des nationalités italienne, américaine et haïtienne. La Constitution haïtienne du 29 mars 1987 ne reconnait pas la double nationalité.
Martelly ne semble pas disposer à donner une fin tranquille à ce dossier.
Questionné par un confrère de la radio privée Kiskeya à ce propos, bien avant son départ pour le Venezuela le vendredi 3 février 2012, Martelly a invectivé le confrère sur un ton acre et agressif « … je ne répondrai pas … » après avoir argué qu’ « …aucune institution ne peut nous (la présidence) poser cette question », mais également en questionnant l’appartenance du média pour lequel travaille le journaliste.
Deux commissions parlementaires devront laisser le pays, au début du mois d’avril 2012, pour se rendre aux États-Unis d’Amérique et en Italie dans l’objectif de vérifier, aux services d’immigration de ces 2 pays, la nationalité du chef de l’État.
Le président Martelly serait destitué par le sénat haïtien et jugé ensuite pour tromperie, selon le code d’instruction criminel haïtien, s’il bénéficie vraiment d’une double voire d’une triple nationalité.
À ce moment, c’est le président récemment nommé (octobre 2011) à la tète de la Cour de Cassation, Anel Alexis Joseph, qui se chargerait de l’intérim.
D’autres membres de l’exécutif, « la ministre du tourisme (Stéphanie Balmir Villedrouin), le ministre des affaires étrangères (Laurent Lamothe ), le secrétaire d’État à l’intérieur (Georges Racine) », auraient des nationalités étrangères, toujours selon Moïse Jean-Charles.
Les ministres et secrétaire d’État cites s’inscrivent en faux contre cette accusation
À la fin du mois de janvier et tout au début du mois de février 2012, des sympathisants de Martelly et d’autres - se réclamant des supporteurs du sénateur Jean Charles - ont gagné les rues. Ils ont aussi mis le feu à des pneus usagés, notamment, dans le quartier de Bel Air (centre de la capitale).
Entré en fonction le 14 mai 2011, après avoir été reconnu vainqueur du deuxième tour de la présidentielle de mars 2011, Michel Joseph Martelly n’a pas toujours eu bonne relation avec les élus législatifs.
Une fois de plus « … à la guerre comme à la guerre… », comme il aime le dire, le chef de l’État ne parait pas opter pour les options pacifiques.
Dans la soirée du mercredi 1er février 2012, Michel Martelly fait irruption dans la résidence privée du chef du gouvernement Garry Conille, où se déroulait une rencontre entre le premier ministre et des parlementaires, à laquelle Martelly n’a pas été invité.
Selon les explications du premier ministre et du sénateur de l’Ouest John Joël Joseph, les points qui devraient être abordés étaient : la présentation des craintes du premier ministre par rapport à ses 100 premiers jours et à certains membres de son gouvernement dont il ne contrôle pas les actions, puis la nécessité de réfléchir sur des contrats octroyés à des entreprises privées haïtiennes par l’État haïtien, dont les clauses ne sont pas claires.
Martelly aurait accusé les parlementaires participants de machiner un coup d’État contre lui, selon les déclarations de plusieurs qui élus qui étaient à cette réunion. Sans doute le président se rappelle t-il le putsch de 1991 dont il côtoyait les principaux auteurs !
Le journaliste et chroniqueur sportif Patrice Dumont trouve que « Michel Martelly (l’individu citoyen) met en danger la vie du président de la république », toujours dans le cadre de la même émission radiophonique de débats politiques.
Pour parler de ce qui s’est passé en sa résidence, Conille préfère qu’on lave les linges sales en famille.
« Quand un problème au niveau de l’État, quand un différend au niveau de l’État arrive dans la scène publique, cela ajoute un élément de difficulté au niveau du problème… », estime Garry Conille qui a participé via téléphone à l’émission ‘’Ranmase’’ sur la radio Caraïbes, ce 4 février.
Conille dit préférer retirer « sur la place publique des problèmes ou des différends » qu’il peut aborder avec les partenaires avec lesquels il interagit, toujours selon ses propos.
Une position que le président du sénat et de l’assemblée nationale, Dieuseul Simon Desras, ne partage pas.
Dans une lettre ouverte, Desras exige des excuses publiques de la part de Martelly. [rh kft rc apr 06/02/2012 10:57]