Par Ralph Henry
P-au-P, 13 janv. 2012 [AlterPresse] --- De petites croix noires en bois plantées dans le sol, d’autres plus grosses un peu partout dans un paysage quasi-désertique ; tel est le tableau offert, dans l’après-midi du jeudi 12 janvier 2012, à l’occasion d’une cérémonie officielle de commémoration au site de Saint-Christophe (au nord de la capitale Port-au-Prince), où ont été ensevelies des milliers de personnes décédées lors du tremblement de terre du 12 janvier 2010.
La structure en béton du mémorial de céramique noire, érigé sur le site Saint-Christophe et surmonté d’une grosse pierre, semble veiller sur le silence qui empreint le site, observe l’agence en ligne AlterPresse.
Accompagné d’une chorale de circonstance, l’orchestre philharmonique de Sainte-Trinité (du nom de l’église catholique anglicane du même nom) distille des chants et des notes, qui luttent avec le vent.
Les aiguilles d’une horloge restent figées sur l’heure fatidique de la catastrophe, 04:53 pm locales (21:53), quand a eu lieu le tremblement de terre le 12 janvier 2010.
« An n sonje pou n vanse (Préservons notre mémoire pour avancer) », exhorte un message appose sur une affiche géante, alors qu’aux alentours des étendards aux couleurs nationales font office de sentinelles.
Les personnes disparues sont officiellement estimées à plus de 300,000 : des frères, des sœurs, des mères, des pères, des femmes, des maris et des amis à ne pas avoir eu la chance de survivre au tremblement de terre de janvier 2010.
« Le coup fut rude », reconnaît le chef d’État haïtien Michel Joseph Martelly, qui a pris la parole en la circonstance.
« Pour mieux rendre hommage à celles-là et ceux-là qui nous ont été enlevés le 12 janvier (2010), nous, qui avons survécu à ce drame, nous devons travailler de telle sorte que les fils, les petits-fils, les proches, les parents, les amis et les descendants de celles et de ceux qui sont partis en ce jour pathétique ne connaissent point pareil sort par la faute des carences des êtres humains », conseille Martelly.
Temps de deuil, mais aussi temps d’exprimer des revendications pro et antigouvernementales
Quelques dizaines d’individus, en partie des personnes déplacées du camp Canaan - situé à quelques kilomètres du site Saint-Christophe - sont venus, pancartes en mains, inviter la présidence à se pencher sur leur sort, pendant que d’autres exhibent des photos du président.
De son côté, Martelly appelle les citoyennes et citoyens haïtiens à un aménagement intelligent du devenir national.
La leçon à tirer est claire : « tout doit être repensé et reconstruit autrement », suivant les propos du président.
La présidence recommande aux gouvernés de s’inspirer du passage de leurs compatriotes dans l’au-delà « non pas pour nous lamenter ou continuer à les pleurer, mais pour que l’exemple de leur trépas amène à aménager un bâtir et un habitat haïtien, conforme aux exigences de sécurité commandées par notre nature aux caprices meurtriers et dévastateurs ».
En ce sens, il s’agit d’un rappel sur la réalité du territoire national en Haïti, continuellement exposé à des menaces sismiques.
La rupture d’avec de vieilles pratiques, qualifiée (par Martelly) de déconstruction de certaines habitudes, et l’appropriation d’autres valeurs en matière de construction : des bases nouvelles plus sécuritaires et plus durables, susceptibles de désamorcer tous risques de retour à l’horreur, sont aussi souhaitées par la présidence.
Outre ces mots, aucune mesure n’est jusque là annoncée pour empêcher les gens de continuer à bâtir n’importe comment, notamment au flanc des mornes.
Pas encore de dispositions institutionnelles, non plus, pour accompagner, dans la reconstruction de leurs habitats, des citoyennes et citoyens qui, après avoir vu leurs maisons s’effondrer, recourent aux mêmes techniques et aux mêmes matériaux (de qualité douteuse) pour s’aménager des abris. [rh kft rc apr 13/01/2012 9:57]