P-au-P, 09 déc. 2011 [AlterPresse] --- A la veille du 63 e anniversaire de la déclaration universelle des droits de la personne, ce 10 décembre 2011, la nouvelle administration politique en Haïti doit encore faire sa preuve en matière de bonne gestion, de reddition de comptes et de transparence dans la gestion des affaires du pays, observe l’agence en ligne AlterPresse.
La position d’Haïti, classée 175 e sur 183 pays (ex-æquo avec l’Irak avec un score de 1.8) dans le rapport 2011 relatif à l’indice de perception de la corruption (Ipc) dans l’administration publique et la politique – publié début décembre par Transparency International, vient relancer les interrogations dans l’opinion publique sur l’orientation de la présidence de Michel Joseph Martelly et de son équipe depuis 6 mois.
A noter que la République dominicaine, se trouve à la 129 e position, un score de 2.6 sur 10, aux côtés de l’Arménie, du Honduras et des Philippines.
Interrogé par la presse nationale, Martelly se refuse toujours à donner des informations sur le coût de ses nombreux voyages à l’étranger, depuis sa prise de fonction le 14 mai 2011, avec de fortes délégations.
Au moment de se rendre au Venezuela, le jeudi 1er décembre 2011, pour la première session de la communauté des États latino-américains et des Caraïbes, Martelly a invité les journalistes à aller vérifier eux-mêmes le nombre de personnes composant sa délégation.
A ses yeux, cette information ne serait pas pertinente par rapport à ce qu’il juge important pour la presse de mentionner dans les compte-rendus quotidiens.
Avant et après les résultats de la présidentielle 2010, Martelly, qui a toujours manifesté de l’agacement au sujet des questionnements des journalistes, semble vouloir faire la leçon aux professionnels de l’information, s’adjugeant le droit de définir quelle orientation donnée aux nouvelles, contrairement aux prescrits de la liberté de la presse.
Sa femme, Sophia Saint-Rémy, dispose d’un bureau, pour lequel les ressources tirées du trésor public ne sont pas connues. L’un de ses enfants, Olivier Martelly, est nommé directeur de projets dans le cadre de la réhabilitation ou de la construction d’une dizaine de centres sportifs sur le territoire national.
Aujourd’hui, il n’existe encore aucune donnée tangible sur les coûts financiers des voyages effectués par la présidence, ni sur la part consacrée aux voyages des fonctionnaires dans le budget national en exécution.
Pas d’information, non plus, sur les montants utilisés pour financer les traitements de 18 ministres et de 19 secrétaires d’État, une situation sans précédent dans les administrations publiques qui se sont succédé depuis 1986 en Haïti.
Une disposition légale enjoint aux fonctionnaires de l’administration publique de produire une déclaration de leurs biens auprès d’un greffe de tribunal de première instance. Personne ne sait a date qui du président, de son premier ministre, des ministres et des secrétaires d’État ont déjà accompli cette formalité administrative et légale de déclaration de patrimoine.
Cette disposition vaut aussi pour les parlementaires (sénateurs et députés) qui non seulement n’usent pas de transparence en déclarant leur patrimoine, mais semblent user de pouvoir discrétionnaire dans la communication de dossiers financiers relatifs à leur gestion. A date, aucun éclaircissement n’a été apporté sur les traitements de 100 mille gourdes (durant plusieurs mois ; US $ 1.00 = 41.50 gourdes ; 1 euro = 61.00 gourdes) par consultant, accordés par divers ministères à plusieurs anciens parlementaires.
Par ailleurs, dans plusieurs bureaux publics (comme dans certaines branches de la police nationale d’Haïti), voire privés, des transactions sont effectuées sans aucun reçu de quittance de droits ou taxes perçues. Ce qui jette des doutes sur la destination des fonds ainsi collectés.
Au moment où les dirigeants actuels parlent d’objectifs d’investissements, de création de 500 mille emplois sur 3 ans et de croissance positive de l’économie dans quelques années, l’absence de transparence sur ces informations risque de peser lourd, d’autant que la république d’Haïti a un niveau de compétitivité très faible par rapport aux autres pays de la région (Haïti est 141 e sur 142 pays, juste avant le Tchad, en matière de compétitivité, dans le classement rendu public en septembre 2011).
Entre-temps, le gouvernement du premier ministre Garry Conille a promis de faire connaître bientôt son agenda d’actions sur les 12 prochains mois afin de permettre à la population de suivre la politique conduite et de l’évaluer dans ses programmes.
Sur la question de corruption, l’ancienne Première ministre Michèle Duvivier Pierre-Louis a annoncé, le mercredi 7 décembre 2011, en exclusivité sur la station privée Radio Kiskeya, que la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (Cscca) a réalisé un audit qui la lave de tout soupçon dans le détournement présumé des 197 millions de dollars de Petrocaribe, un scandale qui avait entraîné, en 2009, la destitution de l’intéressée.
Précisant avoir reçu de la Cscca un certificat qui crédite a posteriori son gouvernement d’une saine gestion financière, Michèle Pierre-Louis déclare “attendre maintenant le verdict de l’unité de lutte contre la corruption (Ulcc) et de l’inspection générale des finances”, les deux autres instances appelées à auditer l’utilisation restée inexpliquée des 197 millions de dollars alloués à des interventions d’urgence après le passage de quatre cyclones, en 2008.
"J’ai fait mon expérience au gouvernement. Ce qui était important pour moi était de sortir la tête haute et je crois que j’y suis parvenue", a-t-elle lâché d’une voix rieuse. [rc apr 09/12/2011 11:00]