Par Ronald Colbert
P-au-P, 04 déc. 2011 [AlterPresse] --- L’avocate et militante dominicaine de droits humains, d’ascendance haïtienne, Sonia Pierre, est décédée d’un infarctus à la mi-journée de ce dimanche 4 décembre 2011, à l’âge de 48 ans, dans un hôpital à Villa Altagracia, en République Dominicaine, apprend l’agence en ligne AlterPresse.
« Elle a éprouvé un malaise ce matin et elle a été emmenée à l’hôpital “ Seguro social nuestra senora de la Altagracia », où elle a rendu l’âme vers 10:00 locales (environ 15:00 gmt) en République Dominicaine”, a confié à AlterPresse une de ses proches, éplorée et visiblement très affectée par la nouvelle de la disparition de Sonia Pierre.
Durant son existence, elle avait subi deux interventions chirurgicales au cœur, qui l’avait contrainte à circuler avec un appareil spécial.
La militante de droits humains avait été diagnostiquée au cœur en novembre 2006, lors de sa présence à Washington pour recevoir le Prix Robert F. Kennedy pour les droits humains.
Sur demande du docteur Baldwin, membre du conseil d’administration du prix, Sonia Pierre a accepté de subir cette intervention à l’hôpital méthodiste à Houston.
Les derniers mois de sa vie ont été marqués par une remontée drastique de l’antihaitianisme en République Dominicaine, où la Cour suprême a refusé le droit de descendants d’Haïtiens (considérés comme étant “en transit”) d’avoir la nationalité dominicaine.
La nouvelle de la disparition subite, après une crise cardiaque, de la militante dominicaine a provoqué un choc émotionnel très fort parmi les membres d’organisations de promotion de droits humains.
Le 17 novembre 2006, Sonia Pierre avait reçu le Prix 2006 des Droits Humains du Mémorial Robert F. Kennedy, offert par Ethel Kennedy pour son travail en faveur de la protection des droits des migrants haïtiens et leurs descendants en République Dominicaine.
« Ce prix fortifie notre travail, notre institution et nos communautés », avait alors déclaré Sonia Pierre.
« En tant qu’activiste de droits humains, qui, depuis mon plus jeune âge, mène une lutte pour la reconnaissance des droits humains des migrantes haïtiennes et migrants haïtiens et de leurs descendants, je dédie ce Prix aux communautés, avec lesquelles Movimiento de mujeres dominico-haitianas (Mudha) travaille, à mes compagnons et compagnes de travail, enfin, à tous ceux-celles qui ont collaboré et cru en notre mission et notre engagement », avait-t-elle dit.
Née en 1963, dans un batey d’une ancienne usine sucrière appelée Catarey (Nord de la République Dominicaine), d’une mère haïtienne – qui est en arrivée en 1951 sur le territoire voisin -, la militante a consacré toute sa vie à défendre la cause des descendantes et descendants d’Haïtiens, à qui l’administration politique refuse de reconnaître la nationalité dominicaine.
Elle a commencé très tôt, à l’âge de 13 ans (en 1976) à s’intéresser à la cause des migrantes et migrants en organisant une manifestation de cinq jours avec les travailleurs de la canne à sucre dans un des bateyes.
Son organisation, dénommée Mouvement de femmes dominico-haïtiennes (en espagnol Movimiento de mujeres dominico-haïtiennes / Mudha), a œuvré et continue de militer en faveur de la cause des Dominicaines et Dominicains, d’ascendance haïtienne, objet de stigmatisation en territoire voisin.
Après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, Mudha a implanté une branche à Léogane (à une trentaine de km au sud de Port-au-Prince).
Le vendredi 19 août 2011, après avoir suivi, pendant plusieurs mois sous les auspices de Mudha à Léogane, des cours techniques dans le domaine d’élaboration des produits cosmétiques et de nettoyage domestique, en décoration intérieure et bougies aromatiques, plus d’une centaine de femmes haïtiennes déplacées ont été graduées dans cette ville en présence de Sonia et de plusieurs militantes.
AlterPresse présente ses sympathies à la famille de Sonia, à ses 4 enfants, à toute l’équipe de Mudha, à la communauté des organismes de défense de droits humains, spécialement de droits des migrantes et migrants. [rc gp apr 04/12/2011 13:15]