P-au-P, 2 déc. 2011 [AlterPresse] --- Les handicapés, vivant au camp « La piste », assurent eux-mêmes leur sécurité et font face aux bandits sans le soutien des autorités, constate AlterPresse.
Le camp « La piste » abrite plusieurs milliers de personnes handicapées. Il s’étend sur le site d’un ancien aéroport de l’armée d’Haïti (appelé dans le temps "aviation militaire") sur la route dite « piste » près de Delmas 2 (nord de la capitale).
Ici, ce sont les sourds-muets qui jouent le rôle de sentinelles. Depuis quelques mois, des individus armés cambriolent les abris construits dans le camp quasiment toutes les nuits.
« Regardez, mes yeux. Ils sont cernés. Je suis obligé de jouer le policier pour la communauté. Il n’y a même pas un policier sur le site », déplore un sourd-muet dont les propos ont été traduits par Philibert Gethro, unijambiste, interprète et porte-parole des sourds-muets.
Dans ce camp de plus de 400 abris préfabriqués, répartis en cinq compartiments, les amputés, les sourds-muets et les aveugles ne sont pas logés au même endroit. Ils ont toutefois développé une certaine solidarité.
« Si on déplace les sourds-muets, c’est la mort assurée pour nous. Les malfrats vont profiter pour voler nos affaires et violer nos filles. Comme handicapés nous ne pourrons nous défendre », confie, Felicia Felix, unijambiste, trésorière de l’Association des Handicapés « Nou Tout se Moun » (en français : « nous sommes tous des êtres » (ASHANTOM).
Félix n’a pas pu cacher ses larmes devant l’abandon dont elle et ses voisins sont victimes.
Non loin de là, l’espace destiné à servir de poste de police sur le camp « Piste », un abri préfabriqué d’environ 24 mètres carrés, n’a jamais été fréquenté par un policier, d’après les informations recueillies sur place.
Depuis le passage du séisme du 12 janvier 2010, le nombre de personnes handicapées a considérablement augmenté en Haïti. Selon la secrétairerie d’Etat, entre 4 à 6 mille nouveaux handicapés sont apparus après la catastrophe. Avant le séisme, ce chiffre se situait autour de 800 mille personnes.
« Nous sommes obligés de nous organiser nous-mêmes puisque les autorités nous oublient. Un handicapé est une personne comme les autres », déclare Felicia Felix.
Grace à un don de la Croix Rouge, certains résidents du camp ont établi un petit commerce informel. Cependant, leurs enfants déambulent dans la poussière du camp : beaucoup n’ont pas pu aller à l’école cette année.
Selon Norestène Jean, conseiller de l’Association des Handicapés, « ce camp connait tous les soucis du monde en raison de l’absence de l’Etat ».
Par ailleurs, il rappelle que la Croix rouge vient d’interrompre la distribution d’eau dans le camp, en dépit du fait que l’accès à l’eau est extrêmement difficile pour les résidents du camp en raison notamment de leur déficience physique. Pour cela, Jean demande aux responsables de l’Etat de se pencher sur le cas des personnes handicapées.
« Le seul cadeau que nous demandons à la Secrétairerie d’Etat à l’intégration des personnes handicapées, à l’occasion du 3 décembre, est la présence de policiers pour assurer notre sécurité sur le site », indique Félicia Félix.
Le 3 décembre ramène la célébration de la Journée Internationale des Personnes Handicapées. Cette journée a été proclamée par les Nations Unies, en 1992, afin de favoriser l’intégration et l’accès à la vie économique, sociale et politique des personnes handicapées. [efd jep kft gp apr 2/12/2011 12:22]