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Haïti-Choléra : Des rescapés du choléra victimes de discrimination

Correspondance- Pierre Paul Ancion

Jacmel, 28 juil. 2011 [AlterPresse] --- « La première réaction de ma tante dès mon retour de l’Unité de traitement de choléra (UTC) de St Michel fut de m’interdire l’accès au réfrigérateur…Elle m’a donné mon assiette, ma cuillère, et mon gobelet », révèle à AlterPresse Jean Marc*, un jeune homme de vingt et un ans récemment traité du choléra.

Natacha*, qui avait elle aussi contracté le choléra, rapporte que depuis sa guérison c’est son petit ami qui la néglige.

« Trois mois après mon traitement, il refuse toujours de faire l’amour avec moi. Je n’ai plus droit à un baiser… Il a changé ses habitudes sexuelles avec moi », s’est plainte Natacha, qui compte déménager vers une autre région du pays, là où, dit-elle, personne ne la connaît.

Jean Marc et Natacha comme beaucoup d’autres citoyens du Sud-Est, guéris du choléra, souffrent actuellement de discrimination de la part de leur famille et de leurs voisins.

Rencontrés par AlterPresse, cette semaine, ils déclarent tous leur ras-le-bol. Ils souhaitent que le Ministère de la Santé Publique entame une campagne d’informations et de sensibilisation pour permettre à la population de mieux cerner la nature du choléra, et faire cesser les comportements discriminatoires.

Le rejet des personnes qui ont été victimes de l’épidémie de cholera soulève le risque que les malades cachent leur infection au lieu de demander de l’aide, ce qui favoriserait la propagation de la maladie.

« Il faut que ces gens sachent qu’eux aussi pourraient être infectés, et ils comprendront la cruauté de leur comportement face à ces citoyens », juge Claude Ernest Occélas, un médecin de l’hôpital St Michel de Jacmel.

Selon lui, les rescapés du choléra ont besoin du soutien de leurs proches pour les aider à traverser la période de récupération. Au lieu de les mettre en quarantaine, leurs amis et leurs voisins doivent plutôt les accompagner, ajoute t-il, soulignant cependant que durant les deux premiers mois de leur traitement, les personnes guéries du choléra sont des porteurs asymptomatiques.

Selon les données officielles de début juillet, l’épidémie de choléra a déjà causé la mort de 5899 personnes depuis son apparition en octobre 2010 en Haiti. Quelque 388 958 cas de personnes atteintes du choléra ont à date été enregistrés dans tout le pays.

Le taux de létalité global est de 1,5 pour cent, à l’échelle nationale. Dans la région métropolitaine de Port-au-Prince (Port-au-Prince, Carrefour, Cité Soleil, Delmas, Kenscoff, Pétion-ville, Port-au-Prince et Tabarre), le taux de létalité s’est stabilisé à 0,8 pour cent, alors qu’il continue de diminuer dans d’autres départements, mais il reste toujours élevé dans le département du Sud-est (5,7%). [app kft gp apr 28/07/2011 12 :10]

* Noms d’emprunt pour l’article, sur demande des concernés.