Correspondance – Ronel Audate
Hinche, 18 Avril 2011 [AlterPresse] --- Après la baisse enregistrée au cours des deux derniers mois, les cas d’infection au cholera ont rebondi dans le département du Plateau Central (Est) et les autorités locales craignent le pire à l’approche de la saison des pluies.
A Hinche, principale ville du département, l’inquiétude se propage. Le directeur médical de l’hôpital de Hinche, le docteur Prince Pierre Sonson, signale que la situation est alarmante.
« En moins de deux semaines, on a 50 nouveaux cas d’hospitalisation, et on peut compter jusqu’à vingt le nombre de personnes infectées par le cholera qui fréquentent quotidiennement le centre hospitalier », précise Sonson Pierre qui ne fait état d’aucun décès parmi les victimes.
Le principal Centre de Traitement de Cholera (CTC) de la région est situé à l’hôpital Sainte Thérèse de Hinche et reçoit plus d’une trentaine de cas par jour, selon les informations recueillies. Ces victimes qui sont pour la plupart des enfants de moins de 10 ans et des personnes âgées de plus de 60 ans, habitent les sections communales et des quartiers à forte concentration et sans infrastructures sanitaires. Le CTC souffre en outre d’un manque de matériels sanitaires, et l’absence d’électricité paralyse son fonctionnement durant la nuit.
Challenge environnemental
« A Hinche, toutes les conditions sont réunies pour la propagation de l’épidémie de cholera », indique Moléon Richard, responsable de la Ligue pour la défense et le respect des droits de l’homme dans le plateau central. L’absence d’eau potable et d’assainissement sont déjà responsables de nombreux cas de malaria ou typho-malaria, selon lui.
« Les déchets sont très mal gérés, les canaux sont jonchés de détritus, et les deux grandes rivières (Guahamouc et Hinquitte) entourant la ville sont considérées comme des dépotoirs », signale le défenseur de droits humains qui réclame une action urgente des autorités.
Le cholera est apparu pour la première fois dans le département du Centre en octobre 2010. Cependant les pratiques d’hygiène nonchalantes caractérisant le mode de vie des populations ne se sont pas modifiées. Se baigner dans les rivières est une pratique quotidienne pour une grande majorité de la population en dépit de la présence d’animaux et de déchets dans les cours d’eau.
Aujourd’hui, se procurer de l’eau potable est un luxe pour la plupart des ménages. Il faut 30 ou 100 gourdes pour s’acheter de l’eau traitée en gallon dépendamment de la compagnie. La Direction Nationale de l’Eau Potable et de l’Assainissement (DINEPA), qui gère le réseau d’eau de Hinche confirme que sa capacité de production est pour l’heure de beaucoup inferieure à la demande croissante de la population.
Le réseau construit en 1982 devait desservir entre cinq et sept milles habitants avec 600 m3 d’eau. Aujourd’hui, la population est passée à cinquante milles habitants, et il faudrait un réseau de 2 500m3 pour répondre à ses besoins en eau, estime Glemo Pierre Paul, directeur départemental de la DINEPA, ajoutant toutefois que des démarches sont en cours en vue de réhabiliter le système.
Par ailleurs, on est toujours loin de la prévention de la propagation de l’épidémie, objectif pourtant fixé par les responsables sanitaires de ce département.
Saison pluvieuse : sombres perspectives
A Mirebalais, Bas Plateau Central, les cas de choléra en baisse dans la région pendant la saison sèche, ont augmenté timidement après les pluies qui se sont abattues sur cette commune durant la fin du mois de mars, déclare le maire principal de cette commune, Lochard Laguerre. Il dit être au courant de plusieurs dizaines de cas d’infection dans les sections de Sarrazin, et Gasgoye. Il préconise d’agir vite pour éviter une tragédie humanitaire.
« Les périodes pluvieuses pourraient handicaper les démarches pouvant permettre d’éradiquer l’épidémie de cholera. Nous avons un système de santé qui n’est pas standard, et notre capacité en matière de prévention et de gestion des risques et désastres est relativement faible », souligne André Renard, maire principal de la commune de Hinche et coordonateur communal du comité de la protection civile.
A Cerca-Cavajal les autorités lancent un appel au pouvoir central et aux ONGs pour qu’ils leur viennent en aide à l’approche de la saison cyclonique.
« Le cholera continue encore de faire des victimes. Toutes les localités sont touchées, et nous n’avons pas assez de moyens pour y faire face », affirme Geu Joanus, administrateur du centre de santé de la commune, qui précise que la saison pluvieuse pourrait augmenter le nombre des victimes.
A Thomassique, région fortement touchée par la première poussée de cholera avec plus de 400 victimes dont 167 morts, on craint le pire. Le maire Wilmane Mathé demande à la population de se montrer prudente face à cette épidémie.
« Il faut se mobiliser contre le cholera. La période pluvieuse a déjà démarré. On vient d’enregistrer 22 nouveaux cas. Le pire doit être évité », déclare le premier citoyen de cette ville. [ro kft gp apr 18/04/2011 14 :30]