Correspondance : Ronel Odatte
P-au-P, 23 fév. 2011 [AlterPresse] --- La « situation est alarmante » dans les régions frontalières du Plateau Central qui subissent les contrecoups de l’insécurité et de l’épidémie de cholera, s’inquiètent les autorités locales.
Dans les localités de la Mielle, Ti Lory, et Bocbanique, l’insécurité rend impossible tout déplacement durant la nuit. « La situation tend à se dégénérer », et les coups de feu sont de plus en plus fréquents, selon un agent de l’ordre ayant requis l’anonymat.
Le juge titulaire du tribunal de paix de Thomassique (haut plateau central) Demoncier Desarmes indique que la circulation d’armes illicites a considérablement augmenté dans cette région. Le juge, qui n’a fait état d’aucune arrestation, souligne que cette commune compte 7 policiers pour une population de 57.496 habitants.
Selon de récentes estimations, la police nationale compte en tout 8 mille 475 membres, dont les 2/3 sont affectés au département de l’Ouest.
« On enregistre des cas de vols et de viols, tous les jours. Les gens demandent de l’aide, mais nous ne pouvons pas faire davantage, car la situation est compliquée », se désole Desarmes.
Terre d’accueil pour les rapatriés, lieu propice pour le commerce licite et illicite, le trafic d’être humain, et refuge pour les présumés meurtriers ou véritables criminels, le Plateau Central a toujours endossé une réputation peu reluisante.
Aujourd’hui outre l’insécurité, les cas de lynchage en lien avec l’épidémie de cholera persistent. Alors qu’on a déjà recensé 68 morts, le maire de la commune de Thomassique, Wilmane Mathé, a indiqué que 12 personnes ont été tuées à l’arme blanche entre novembre 2010 et janvier 2011 sous prétexte qu’elles avaient en leur possession une poudre magique capable de transmettre le cholera. Les coupables de ces actes n’ont pas été arrêtés.
D’autre part si l’épidémie déclenche la violence elle a aussi des incidences néfastes sur le commerce.
Les commerçants et commerçantes qui fréquentent les marchés dominicains se trouvent dans l’incapacité d’écouler leurs produits. Plusieurs d’entre eux ont déclaré que leurs activités commerciales sont paralysées depuis l’apparition du cholera en Haïti.
C’est interdit de se rendre à l’autre côté de la frontière, et les dominicains ne veulent pas transporter les produits venant d’Haïti de peur qu’ils ne soient contaminés, se plaignent ils.
Par ailleurs, la République Dominicaine continue de rapatrier des haïtiens vers la frontière. Le bureau du Groupe d’appui aux Refugiés et aux Rapatriés (GARR) à Thomassique reçoit plus de vingt personnes par jour, d’après sa directrice Délicieuse Paul.
Une fois rapatriées, ces personnes, qui pour la plupart ne sont pas originaires du Plateau Central, cherchent à s’établir dans la région alors que déjà, l’accès pour les riverains aux services de base est pratiquement inexistant, ajoute-t-elle.
Délicieuse Paul rappelle en outre que ces rapatriements se font dans l’irrespect des droits fondamentaux des migrants haïtiens. [ro kft gp apr 23/02/2011 12 :00]