Communique du GRALIP
17 janvier 2004
Le Groupe de Réflexion et d’Action pour la liberté de la Presse (GRALIP)
exprime son indignation et sa révolte devant les actes terroristes sans
précédent dans l’histoire nationale perpétrés contre la Presse Indépendante,
le mardi 13 Janvier 2004.
Une dizaine d’individus en cagoule, lourdement armés, circulant à bord de
deux jeeps, ont saccagé avec une violence inouïe les installations
électroniques de dix médias, quatre radios indépendantes, Radio Kiskeya,
Radio Signal FM, Radio Galaxie, Radio Magik Stéréo, toutes membres de
l’Association Nationale des Médias Haïtiens (ANMH) ; Radio Mégastar, Radio
Tropicale d’Haïti ; ainsi que les équipements de quatre autres stations
apparentées à Lavalas, Radio Mélodie FM, Radio Plus, Radio Commerciale
d’Haïti et Radio Télé Timoun.
Selon des informations crédibles, à l’issue de cette opération planifiée au
sommet du pouvoir, les exécutants, membres d’un cartel de gangsters
pro-lavalas, basé à « gran ravin », dans le quartier de Martissant, ont
amèrement regretté de n’avoir pas su démantibuler les émetteurs d’autres
stations indépendantes, logées sur le même site, à Boutiliers, dans les
hauteurs de Pétionville. Télé Haïti, la seule chaîne de Télévision
indépendante de la Capitale est aussi dans la ligne de mire des malfaiteurs,
tentés par l’idée d’incendier la station.
Le GRALIP précise que jamais en Haïti, les affres d’un régime politique
autoritaire contre les médias indépendants n’avaient connu une telle
ampleur. En effet, cette opération commando dépasse des attaques semblables
menées contre la presse indépendante le 28 novembre 1980 (sous Duvalier), en
Janvier 1986 (sous Duvalier) et en 1989 (sous Prosper Avril).
Tous les paramètres sont à réviser à la hausse : la sophistication de la
planification politique (réunions et coordination au plus haut niveau de
l’Etat), l’arsenal impressionnant de la logistique (deux véhicules tout
terrain appuyés par un troisième, des armes automatiques, des masses, des
marteaux, des machettes et des ciseaux), l’intensité de l’action (une
trentaine de minutes de démolition) et surtout l’immensité des dégâts
(500.000 dollars américains au bas mot).
Le GRALIP relève que, curieusement, les émetteurs des médias aux options
idéologiques diamétralement opposées ont été sabotés ; scénario classique de
camouflage de l’origine politique d’une tempête pourtant longtemps annoncée,
notamment par les voix tonitruantes du Président Aristide, du Secrétaire
d’Etat à la communication Mario Dupuy, de la déléguée de l’Ouest
Marie-Antoinette Gauthier et du remuant ex-député contesté Nawoon
Marcellus.
Le Président du 26 novembre a beau condamner le désastre de Boutilliers.
Mais il a été, une fois de plus, trahi par ses convictions intimes, en
ajoutant aussitôt que la presse doit avoir comme boussole l’objectivité et
le respect de la vérité ; une façon subtile de justifier un acte politique
criminel.
Le Groupe de Réflexion et d’Action pour la Liberté de la Presse présente ses
sympathies aux médias victimes de cette nouvelle infamie politique qui viole
le droit à la propriété privée, la liberté d’entreprise, la liberté
d’informer et le droit à l’information du public.
Dans le même temps, le GRALIP salue chaleureusement l’exemplarité de la
solidarité qui s’est manifestée dans tout l’espace médiatique indépendant, à
travers la diffusion en réseau, de l’édition de nouvelles spéciale de
L’ANMH, le mercredi 14 janvier2004 et le transfert en rotation sur les ondes
des stations sœurs, de plusieurs programmes réalisés par les média hors-
service.
Il s’agit là d’une première dans l’histoire de la radiodiffusion haïtienne
et d’une grande victoire pour la démocratie.
Enfin, face à un régime qui s’est fait le champion de la systématisation du
mensonge, de l’infantilisation des masses populaires, de
l’institutionnalisation de la violence politique et de la perversion du
discours politique progressiste, le GRALIP demande instamment à l’ensemble
des composantes de la société de comprendre la nécessité de sauvegarder la
première des institutions démocratiques, La Presse, en vue d’éviter un
péril collectif.
Vario Sérant, Coordonnateur Principal
Stéphane Pierre-Paul, Assistant Coordonnateur
Ronald Colbert, Administrateur