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Haïti : la manifestation la plus imposante depuis une décennie

P-au-P., 11 janv. 04 [AlterPresse] --- C’est une véritable marrée humaine qui a déferlé sur Port-au-Prince ce 11
janvier, à l’appel de la Plateforme Démocratique de la Société Civile et de
l’Opposition.

Cette nouvelle manifestation, qui visait à obtenir la démission du président
Jean Bertrand Aristide, a été impeccablement encadrée cette fois par la
police anti-émeute haïtienne.

Aucun incident majeur n’est à déplorer, à part quelques pierres lancées par
des partisans du Chef de l’Etat, en nombre insignifiant par rapport aux
dizaines de milliers de manifestants de l’opposition sociopolitique.

Pendant environ trois heures, les manifestants, issus de toutes les
catégories sociales, ont parcouru une dizaine de kilomètres, de la place
Saint Pierre, à Pétion Ville (banlieue sud de Port-au-Prince) à celle du
Canapé Vert située à quelque sept cents mètres du Palais Présidentiel.

Les organisateurs ont placé cette marche sous le signe de « l’union fait la
force », la devise du pays, et « l’espoir d’une nouvelle Haïti ».

Cette manifestation a été précédée d’une messe au cours de laquelle l’évêque
auxiliaire de Port-au-Prince, Monseigneur Pierre André Dumas avait assuré
l’assistance de la victoire et estimé dépassée la proposition de la
Conférence épiscopale qui offrait un compromis à l’opposition et au Chef de
l’Etat haïtien.

Le secrétaire d’Etat américain Colin Powell avait récemment invité les
acteurs politiques haïtiens à se saisir de l’opportunité offerte par la
proposition de la hiérarchie catholique ; ce qui avait fait « tiquer »
l’opposition et la société civile alors que le parti au pouvoir s’était
réjoui de la bonne appréciation de la situation par Washington.

Dans la même semaine, la France avait lancé un appel presque similaire.

C’est la première marche de cette envergure organisée à Port-au-Prince
depuis une décennie.
Des mobilisations anti-Aristide ont eu lieu également dans diverses villes
de province dont Petit Goâve (ouest), Marigot (sud est) et Miragoâne
(ouest).

Dans la ville côtière de Miragoâne (sud ouest de Port-au-Prince), un
partisan lavalas a été tué par balles où deux marches pro et
anti-gouvernementales se sont déroulées simultanément.

En représailles, les partisans du chef de l’Etat ont tenté d’infliger le
supplice du collier à un partisan de l’opposition et mis le feu dans
plusieurs bâtiments et installations appartenant à de présumés partisans de
l’opposition.

Par ailleurs, au Cap Haïtien (nord), un directeur départemental de la
police, Jeanty Edner, a été tué par balles dans la nuit du 10 au 11 janvier.

A Port-au-Prince, une nouvelle manifestation anti-gouvernementale, appelée
par les étudiants en médecine et appuyée par l’opposition sociopolitique, se
tient ce 12 janvier à Port-au-Prince.

Une précédente marche pour réclamer le départ du pouvoir de Jean Bertrand
Aristide, le 7 janvier, avait été violemment perturbée par des partisans du
chef de l’Etat. Les violences ayant émaillé cette journée avaient fait trois
morts et une trentaine de blessés.

C’est dans ce contexte de tension et de contestation sans précédent de son
régime que le président Aristide va participer, aux cotés d’une trentaine de
chefs d’Etat, au sommet de Monterrey, au Mexique.

D’ores et déjà , l’opposition sociopolitique, à travers l’ancien maire de
Port-au-Prince Evans Paul, prévient que les propos de Jean Bertrand Aristide
à cette réunion n’engageront que lui-même, les forces vives de la nation
haïtienne l’ayant déclaré hors-la-loi. [vs apr 12/01/2004 18 :00]