La place qu’occupe la mangue haïtienne est très menacée sur le marché international, tenant compte de l’exigence des consommateurs étrangers en quête d’un produit de qualité. Classée parmi les dix premiers pays producteurs mondiaux de la mangue, la République d’Haïti doit tout mettre en œuvre pour mieux organiser l’exploitation de cette filière. Une étude, réalisée par le Laboratoire des relations haÑ—tiano-dominicaines (LAREHDO), révèle que cette filière représente 20% de la consommation de mangues en République Dominicaine.
P-au-P, 22 mai 06 [AlterPresse] --- Le commerce transfrontalier des mangues, quoique informel, contribuerait aux efforts de reboisement d’Haïti, où la production de mangues oscille entre 200 mille à 400 mille tonnes métriques (TM) l’an, sur une surface de l’ordre de 20 à 40 mille hectares, suivant une étude conduite par deux experts haïtiens, Alex Bellande et Paul Duret, pour le compte du Laboratoire des relations haÑ—tiano-dominicaines (LAREHDO).
Avec une centaine de variétés, les mangues permettent à Haïti de conserver encore une partie de sa couverture végétale. Blanc, Baptiste, Corne, Carotte, Doudouce, Fil (blanc et rouge), Francisque, Jean-Marie, Muscat et Rosalie, sont, entre autres, des variétés de mangues haïtiennes listées par le LAREHDO.
« Régulariser la commercialisation des mangues, c’est l’ouvrir au secteur formel. Ce serait un bon pas si l’Etat décidait de régulariser le marché, car cela mettrait les commerçants en confiance et il y aurait plus de sécurité sur le marché », confie l’ingénieur-agronome et économiste agricole Alex Bellande à un journaliste d’AlterPresse en marge de la présentation, en mai 2006, de cette étude achevée en novembre 2005.
Initié en 1992, le commerce transfrontalier (avec la République Dominicaine) de mangues s’est depuis accru. En 2005, les 7,000 à 8,000 tonnes métriques de mangues exportées étaient évaluées autour de 50 à 60 mille dollars américains.
Quinze communes d’Haïti, situées dans la zone frontalière entre Belladère (commune frontalière avec Elias Pina) et Ouanaminthe (Dajabon, du côté dominicain) sont impliquées dans cette activité.
La valeur finale de ce produit haïtien, calculée au prix payé par le consommateur dominicain, est de plus de 5 millions de dollars américains.
« La mangue d’Haïti contribue à la compétitivité de la mangue dominicaine à l’échelle internationale », explique l’économiste agricole Alex Bellande, aux yeux de qui les mangues importées d’Haïti permettraient de compléter les mangues d’exportation de la République Dominicaine vers d’autres pays.
Les mangues Francisque et Blanc sont les plus exportées vers les Etats-Unis d’Amérique et vers le Canada. Les volumes transitant par les circuits formels d’exportation sont annuellement de l’ordre de 6 à 10 mille TM.
Cependant, Bellande estime qu’il y a risque de perte de marché pour cette denrée haïtienne, du fait que certains consommateurs recherchent des mangues de meilleure qualité.
« Dans des zones aux Etats-Unis, la mangue costaricienne à prix dérisoire est préférée à celle d’Haïti », raconte le chercheur.
L’étude du LAREHDO mentionne que le conditionnement de mangues fraîches pour l’exportation vers les Etats-Unis exige des traitements strictement contrôlés par des agents des services de protection phytosanitaires américains et des installations coûteuses.
La mangue haïtienne est aussi utilisée dans la production significative de saumure de mangues, destinée à la fabrication, en Angleterre, de sauces épicées - Chutney - faisant usage de variétés locales à bon marché.
A cause du mauvais état de l’axe routier dans la plupart des zones frontalières, les opérations de vente et d’achat des mangues entre Haïti et la République Dominicaine se confinent sur de courtes distances, sauf pour la mangue Francisque qui est achetée jusqu’à Thomonde, à plus de 60 kilomètres au nord-est de Port-au-Prince, pour l’exportation aux Etats-Unis, souligne l’étude du LAREHDO.
L’étude de ce laboratoire montre que la production commerciale de ce fruit en République Dominicaine, voisine d’Haïti, a fortement progressé durant ces quinze dernières années. En 1989, poursuit l’étude, les surfaces cultivées étaient estimées à environ 1,250 hectares.
S’appuyant sur des statistiques officielles dominicaines, le LAREHDO estime, actuellement, que les surfaces emblavées se chiffreraient à plus de trois fois ce niveau et approcheraient les 4,400 hectares, dont plus de 3,000 hectares seraient des plantations récentes non encore exploitées.
L’essentiel de la production dominicaine (environ les deux tiers), est, selon l’étude, destinée à la consommation locale en frais. La consommation de jus de mangue s’accroît sur le marché local dominicain et cinq entreprises sont engagées dans la transformation de ce fruit.
Haïti se trouve dans l’impérieuse nécessité de développer avec ses voisins dominicains un programme binational de lutte intégrée contre un parasite (une mouche) qui ronge les mangues, de manière à réduire les pertes enregistrées susceptibles de dépasser 50% de la production, signale l’étude du LAREHDO.
Sur la commercialisation de produits d’Haïti avec la République Dominicaine, le laboratoire des Relations Haïtiano-Dominicaines a déjà réalisé, avec le soutien financier de l’Union Européenne, d’autres recherches, concernant notamment le café, le pois congo et les avocats en provenance d’Haïti. [do rc apr 22/05/2006 12:30]